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critiques de juin-août 2012

Vendredi 24 août 2012 5 24 /08 /Août /2012 13:53

Film britannique de Cary Fukunaga

 

Interprètes : Mia Wasikowsaka (Jane Eyre), Micahel Fassbender (Edward Rochester), Jaimie Bell (St. John Rivers), Judi Dench (Mme Fairfax)


Durée : 1 h 55

 

 Jane-Eyre.jpg


Note :
  6/10 


En deux mots :
  Cary Fukunaga ne retrouve pas la vitalité désespérée de son premier film, glacé par la fidélité académique à l’œuvre originale.

 


Le réalisateur :
 Né en 1977 à Oakland, Cary Fukunaga a vécu au Japon, en France et au Mexique où il réside actuellement. Il est diplômé d'histoire de l'Université de Californie, et de l'IEP de Grenoble. Il réalise un court métrage en 2004 "Victoria para Chino" qui obtient le prix du Festival de Sundance. En 2009, il tourne "Sin Nombre", très remarqué par la critique.

 

Le sujet : Recueillie par sa tante qui la maltraite, Jane Eyre se rebelle contre l’injustice dont elle est victime. Sa tante l’envoie alors dans le pensionnat de Lowood où règnent le froid  et les mauvais traitements. Elle se lie avec Helen Burns qui décède de la tuberculose. Devenue professeur dans le pensionnat, elle accepte le poste de gouvernante pour la jeune Adèle, une petite française recueillie par Mr Rochester, le maître du manoir.

 

La critique : Quand j’ai vu que le réalisateur du très intéressant « Sin Nombre » s’attaquait à la dix-huitième adaptation au grand écran du chef-d’œuvre de Charlotte Brontë, je me suis léché les babines, curieux de voir ce qu’allait en faire un metteur en scène dont le style tendu magnifié par une très belle photographie avait su donner vie à l’histoire tragique de deux gosses pris dans les griffes de la Mara salvadorienne. En effet, quel grand écart entre cette histoire moderne traitée avec une précision et une sécheresse proche du documentaire, et ce classique de la littérature romantique, entre deux univers si contextualisés et si différents, l’Amérique centrale d’aujourd’hui et l’Angleterre du milieu du XIX° siècle.

 

Le résultat est déconcertant, justement parce qu’il est sans surprise. Si on retrouve une très belle photographie, un soin particulier accordé au choix des cadres, et particulièrement une alternance de plans serrés sur les visages ou les mains et de plans de grand ensemble, comme cette plongée digne de « La Mort aux Trousses » sur Jane Eyre perdue dans la lande, c’est à peu près tout ce qui reste du style de « Sin Nombre ». Normal, direz-vous, vu le grand écart évoqué plus haut. Mais Cary Fukunaga n’apporte pas non plus de nouveauté et d’originalité dans le traitement de cette histoire si souvent adaptée. Au contraire, il fait souvent preuve d’un académisme compassé, et son sens du rythme semble gelé par le difficile exercice de réduire 736 pages à 1 h 55.

 

De ce point de vue, l’objectif est atteint. A l’aide d’un point de départ du récit au deux-tiers de l’histoire et de nombreux flash-backs, le scénario restitue fidèlement les principaux moments du roman. Mais en choisissant de centrer l’intrigue autour de l’affrontement amoureux de Jane et de Rochester, il accorde beaucoup d’importance aux scènes de dialogue, et ne s’autorise que quelques échappées dans des scènes plus réussies comme l’évocation de l’internat dickensien, ou comme le choix d’exagérer la dimension gothique du manoir de Thornfield-Hall.

 

La volonté de précision de la reconstitution se voit partout : choix des intérieurs et des extérieurs, manoirs et paysages, gamme chromatique des costumes, éclairage kubrickien à la bougie. Mais ces accessoires engoncent les personnages, et le jeu très intériorisé de Mia Wasikowsaka (à la Star Ac, on lui aurait dit qu’elle est mono-expressive !) et de Jaimie Bell renforce cette impression de componction qui finit par rendre le récit pesant et pour tout dire, un peu mou du genou. Le film a les qualités et les défauts de ce choix de la fidélité à l’intrigue et à l’ambiance. Il se laisse regarder parce que l’histoire est forte, la réalisation léchée et les acteurs impliqués. Mais il maintient aussi le spectateur à distance par manque de fantaisie et de touche personnelle.

 

Cluny

   

Par Cluny - Publié dans : critiques de juin-août 2012 - Communauté : Cinéma
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Vendredi 24 août 2012 5 24 /08 /Août /2012 11:58

Film français de Carine Tardieu

 

Interprètes : Agnès Jaoui (Colette Gladstein), Denis Podalydès (Michel Gladstein), Juliette Gombert (Rachel), Anna Lemarchand (Valérie)


Durée : 1 h 29

 

Vent-mollets.jpg


Note :
  3/10 


En deux mots :
 Carine Tardieu confirme tout le pire que laissait entrevoir son premier film, par une mise en scène mièvre et aguicheuse.


La réalisatrice :
 Après des études de cinéma à l'ESRA (Paris), Carine Tardieu été assistante réalisatrice sur de nombreux films et téléfilms. Elle a travaillé comme scénariste de fiction et réalisé des programmes courts pour la télévision. En 2002, elle réalise son premier court-métrage "Les baisers des autres". Multi-primé dans les festivals, ce film a aussi fait l'objet d'une novélisation par son auteur, inaugurant ainsi la collection "ciné-roman" chez Actes Sud Junior. En 2007, elle réalise son premier long métrage, "La tête de Maman".  

 

Le sujet : A 9 ans, Rachel Gladstein partage sa chambre avec sa grand-mère qui a été exclue de sa maison de retraite pour activité sexuelle débridée et qui ne se remet pas de son dernier A.V.C, souffre de  l’omniprésence de sa mère qui la gave de boulettes et d’angoisses et subit l’ironie absente d’un père revenu seul d’Auschwitz.

Elle rêve de devenir la meilleure amie de Marina Campbell, tellement attirante puisqu’elle vient de perdre sa mère. Mais à sa fête d’anniversaire où elle a invité toute sa classe ne vient que Valérie, garçon manqué au langage cru…

 

La critique : A la fin de ma critique de "La tête de Maman", je concluais ainsi : "Comme souvent dans les premiers films, Carine Tardieu a voulu traiter beaucoup de sujets, et montrer toute la palette des effets qu'elle pense maîtriser. Cet excès d'ambition, certes explicable, fait de la "Tête de Maman" un film fourre-tout parfois un peu racoleur. Une sincérité perceptible et quelques trouvailles originales peuvent nous donner envie de la revoir dans un projet mieux cerné." N’ayant qu’une parole, je suis donc allé voir cette adaptation du roman de Raphaëlle Moussafir. Je peux comprendre ce qui a attiré Carine Tardieu dans ce livre en relisant le pitch de "La tête de Maman" puisqu’on y retrouve à peu près les mêmes composantes : une mère névrosée, un père absent, une grand-mère complice, et une fille mal dans sa peau.

 

Peut-on parler ici de projet mieux cerné ? En un sens oui, puisqu’il y a une cohérence narrative, quand bien même celle-ci vient faire son marché dans le magasin des poncifs : la mère juive donc étouffante, la petite fille coincée qui se déniaise au contact  de la bad girl de la classe quitte à abandonner son rêve de devenir amie avec la future reine du bal, la grand-mère qui s’allie à sa petite-fille pour mieux enfoncer sa fille. Le scénario est donc cohérent, mais sans réelle surprise, du fait de la volonté de plaire dans un registre "L’Elégance du Hérisson", mélange de personnages soigneusement décalés (mais finalement terriblement stéréotypés), d'écart entre un point de vue enfantin et l’incohérence des adultes (mais finalement affreusement artificiel) et de recours aux grosses ficelles de l’émotion et des bons sentiments.

 

Je pointais déjà dans ma critique précédente le décalage entre l’ambition de la mise en scène et la maigre proportion de réussite dans ces tentatives. Ici, même constat, avec un déchet encore plus grand. Au rayon des idées qui fonctionnent (soyons honnête, j’ai dû rire trois fois, ce qui est plutôt un bon score pour une comédie française), quelques trouvailles presque subliminales : le tableau d’acuité visuelle d’Agnès Jaoui – sa mère est ophtalmologiste - qui compose des mots en rapport avec son état du moment (chouchoukha, ménopause, salope, Michel), l’image mentale que Rachel se fait de la déportation de son père (un garçon seul à la table familiale, avec une blouse Mobalpa – son père est installateur de cuisines – épinglée d’une étoile jaune), euh, et puis c’est tout.

 

La liste des scènes qui font flop est, elle, interminable : citons la pauvre Isabella Rossellini obligée d’assumer une réplique telle que « Chez Mme Trebla, c’est le lieu du blablabla », l’institutrice fringuée comme Karen Chéryl en plus allumeuse qui proclame à la classe le jour de la rentrée « Soyez gentils avec Marina, sa maman n’est plus de ce monde », ou les dialogues très écrits mis dans la bouche des malheureuses gamines qui les débitent sans les comprendre. Les idées pachydermiques pullulent : Rachel qui dort avec son cartable, la musique de "La Boum" qui résonne quand elle rencontre le frère de Valérie,  Colette qui n’arrive pas à tutoyer la séduisante mère de Valérie, et puisque Colette est séfarade, l’insistance autour des boulettes, aussi léger que la publicité pour Candia Silhouette active.

 

On aurait pu espérer quelque chose d’un casting à première vue intéressant : Agnès Jaoui qui fait un tournant à la Simone Signoret-Madame Rosa, Denis Podalydès, Isabella Rossellini, Isabelle Carré et Judith Magre. Ils se démènent tant bien que mal pour essayer de donner vie à des répliques téléphonées ou faire vivre des scènes improbables. A ce jeu, c’est sans doute Isabelle Carré qui s’en sort le mieux, parvenant à rendre crédible son personnage de mère célibataire fragile et enfantine, comme si son aura avait réussi à maintenir à distance toutes les scories imposées par la direction d’acteurs.

 

"Du Vent dans mes mollets" fait partie de ces films destinés à plaire, et particulièrement aux lecteurs d’Anna Gavalda, Eric-Emmanuel Schmitt ou Muriel Barbery. Pour cela, il ne recule devant rien, et comme il ne réussit jamais à susciter l’émotion par la grâce naturelle de son récit ou la sincérité de son propos, il ne recule devant aucun truc, le plus énorme et le plus putassier étant l’épisode final, souligné à coup de flash-back au ralenti, de filtre Davidhamiltonnien, de fleurs de pissenlit tournant dans l’air et de musique lacrymale impérative. Je parlais de sincérité et de maladresses dans le premier film. Grave erreur : tout est fabriqué, et bien plus que de maladresse, c’est de malhonnêteté dont il faut parler ici.

 

Cluny

Par Cluny - Publié dans : critiques de juin-août 2012 - Communauté : Cinéma
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Mercredi 15 août 2012 3 15 /08 /Août /2012 20:22
Film américain de Steven Soderbergh
 
Interprètes : Channing Tatum (Magic Mike), Alex Pettyfer (Adam, le Kid), Matthew McConaughey (Dallas), Cody Horn (Brooke)

Durée : 1 h 50

Magic-Mike.jpg

Note :
  6/10 

En deux mots :
 
Soderbergh passe à côté du grand film qu'il aurait pu faire, par un mélange de nonchalance et de volonté de plaire quand même.

Le réalisateur :
 Né en 1963 à Atlanta, Steven Soderbergh réalise un court-métrage, "Winston", qui lui permet de tourner son premier long-métrage "Sexe, mensonge et vidéo", qui obtient la Palme d'Or en 1989. Loin de tourner des films commerciaux, il réalise des films expérimentaux, comme "Kafka" (1991), "King of the Hill" (1993) ou "Schizopolis" (1996). Avec "Hors d'atteinte"en 1998, il tourne avec George Clooney avec lequel il va produire de nombreux films.

En 2000, il a deux films nommés aux oscars "Erin Brokovitch" et "Traffic". Il réalise ensuite "Ocean Eleven" (2001) , "Ocean Twelve" (2004), "Ocean Thirteen" (2007), ainsi que le dyptique sur le "Che" (2008), ce qui ne l'empêche pas de continuer un cinéma plus expérimental avec "Bubble" (2006), "The good German" (2007) ou "Girlfriend experience" (2009). Il a aussi réalisé " The Informant !" (2009) et "Contagion" (2011).

 

Le sujet : A 30 ans Mike mène une vie bien remplie : il travaille sur les chantiers le jour, possède une petite entreprise de pièces détachées automobiles, et la nuit, il est Magic Mike, streap-tiseur dans la boîte de Dallas ; mais son rêve, c'est de monter une entreprise de fabrication de meubles customisés. Sur un chantier, il rencontre Adam, 19 ans, qu'il emmène dans la boîte et qui devient à son tour strip-teaseur. Brooke, la soeur d'Adam, s'inquiète de voir son petit frère plongé dans ce monde d'argent facile, et demande à Mike de veiller sur lui.

La critique : Steven Soderbergh tourne beaucoup, au rythme de deux films par an, et il s'agit d'ailleurs de la sixième critique que je lui consacre, ce qui ne doit pas être loin d'un record. Alors, pas étonnant qu'il ne soit pas Terrence Mallick. Pas étonnant non plus qu'il y ait du déchet dans cette filmographie diarrhéique, et que, si le très bon s'est fait rare depuis longtemps ("Traffic" ? "Che : Guerilla" ?), le bon et le moins bon alterne régulièrement. Ce "Magic Mike" se situe un peu entre les deux, plutôt bon par le film qu'il aurait pu être, pas vraiment très bon par le film qu'il est, la faute à une certaine mollesse et à l'abandon de pistes intéressantes.

 

La genèse du projet vient de sa rencontre avec Channing Tatum qui a commencé sa carrière comme strip-teaseur, et à qui Soderbergh, intéressé par le potentiel narratif et cinématographique de ce milieu si particulier, a demandé d'écrire le synopsis. Et effectivement, il y a un vrai potentiel, parfaitement exploité sur la première moitié du film, quand on regarde toute cette entreprise de strip-tease masculin comme une parabole de l'Amérique d'aujourd'hui : peu importe la fin, peu importe les moyens, à partir du moment où on peut se faire du fric. On parle d'argent d'un bout à l'autre du film, et nombreuses sont les scènes qui illustrent l'adage qui dit que l'argent n'a pas d'odeur...

 

Cette apologie de l'ultra-libéralisme a son jedi : Dallas (joué par un Matthew McConaughey survitaminé), lui-même ancien strip-teaseur et proprio de la boîte qui proclame que son fils n'ira pas à l'école pour rester scotché devant les émissions financières de la télé, et son padawan, le jeune Adam qui vit son "dépucelage" dès sa première soirée à l'Xquisite, et à qui Dallas apprend les ficelles du métier le lendemain dans une scène assez drôle. Le but, c'est de faire du fric, essentiellement sous forme de billets verts glissés dans le string, et pour cela il faut séduire la clientèle, bien entendu exclusivement féminine. Le fond de commerce de ce public d'enterrement de vie de garçon évoque curieusement (ou pas, d'ailleurs) les clichés de la culture gay, et on retrouve des personnages à la Village People sur une chorégraphie de boys band, tout du moins jusqu'au moment où il faut aller au devant de son public. D'ailleurs, quand elle découvre le nouvel attirail d'Adam, sa soeur lui déclare que ses préférences n'ont pas d'importance et que quoiqu'il en soit il restera toujours son frère ! Visiblement, Soderbergh jubile a montrer le mauvais goût de ce concept artistique, dont le climax est sans doute la choré spéciale 4 juillet, qui concentre toutes les vertus américaines : patriotisme, sexe et libre entreprise.

 

A ce monde en roue libre entre alcool, extasy, sexe facile et appât du gain (la traduction européenne pourrait être footballeur professionnel !), il fallait un contrepoint. Il y en a deux ici : celui du personnage de Brooke, la grande soeur d'Adam, secrétaire médicale qui a la tête bien sur les épaules, ce qu'Adam et ses potes traduisent par "elle est un peu coincée". Plus intéressant, il y a un contrepoint interne, à savoir Mike lui-même, qui ne se contente pas de la vanité de son succès du moment, mais qui cherche à construire quelque chose, à savoir une entreprise de meubles customisés. On le voit donc en costard en train d'expliquer à la banquière qui s'apprête à lui refuser un prêt que l'origine de son gros paquet de billets froissés n'a rien d'illégal. Soderbergh souligne d'ailleurs l'opposition entre les deux mondes par l'usage d'un filtre jaune qui donne une couleur mordorée un peu iréelle à la vie de l'extérieur, alors que les couleurs des scènes à la boîte sont elles nettement plus criardes et clinquantes.

 

N'étant ni un adepte de la salle de sport, ni fasciné par l'intérêt visuel de corps mâles huilés, j'ai trouvé que les passages à l'Xquise s'étiraient un peu, et que l'ironie des scènes initiales laissait la place à un cahier des charges aux intentions plus douteuses. Plus dommageable encore, le récit perd de vue des pistes entrouvertes, comme le lien avec les dealers ou l'opposition entre la facilité du gain "amoral" et la difficulté à monter une entreprise "honnête", tout cela au profit de la préparation d'une happy end prévisible et convenue. Ce film frivole et mélancolique se laisse regarder malgré quelques longueurs, et rejoindra la liste des films précédents de Soiderbergh, vite vus, vite oubliés.

 

Cluny


Par Cluny - Publié dans : critiques de juin-août 2012 - Communauté : Cinéma
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Mardi 14 août 2012 2 14 /08 /Août /2012 08:11

Film iranien d'Asghar Farhadi  


Interprètes : Taraneh Alidoosti (Firouzeh), Babak Ansari (Ala), Faramarz Ghjaribian (Rahmati Abolghasem)


Durée : 1 h 41

 

Belle Ville


Note :  7,5/10 

En deux mots :
  Sept ans avant "Une Séparation", "Les Enfants de Belle Ville" en présente une ébauche moins aboutie, mais quand même passionnante et émouvante.

Le réalisateur :  Né en 1972, Asghar Farhadi est diplômé en théâtre de l'Université de Téhéran. Il commence par réaliser des films en super-8 et en 16 mm à Ispahan. Il réalise des films pour la télévision avant de tourner son premier film en 2003, "Dancing in the Dust". Il tourne ensuite "Les Enfants de la Haute Ville" en 2004, "La Fête du Feu" en 2007, et  "A propos d'Elly"en 2009 qui remporte l'Ours d'argent du meilleur réalisateur à Berlin. " Une Séparation" obtient l'Ours d'Or à Berlin, le Golden Globe, le César et l'Oscar du meilleur film étranger en 2010.

Le sujet : A 16 ans, Akbar a tué son amie dans un drame passionnel. Deux ans plus tard, il attend son exécution. Son compagnon de cellule, Ala, décide à sa sortie de prison de tout faire pour obtenir le pardon du père de la victime, qui seul peut permettre l'annulation de la condamnation à mort. Il retrouve Firouzeh, la soeur d'Akbar. Ensemble, ils vont tenter d'infléchir une homme au chagrin inconsolable.

La critique : Après un plan sur le drapeau iranien flottant devant le haut-parleur du centre de détention, le film débute par un gros plan de la sculpture que peaufine Akbar, seul dans son atelier. Survient un codétenu affolé qui, tel Bernardo, lui mime ce qui vient d'arriver : Ala s'est tailladé les veines. Akbar se précipite, fait irruption dans la chambre où tous les détenus sont rassemblés autour du lit où Ala git sous une couverture... jusqu'à ce que celui-ci se redresse et lance la fête d'anniversaire de son ami. Eclatent les chants, les danses, un pauvre pain fait office de gateau, alors que la caméra isole progressivemnt Akbar tétanisé au milieu de la foule qui lui fait fête : ses 18 ans signifient pour lui l'imminence de son exécution.

 

D'emblée, Ashgar Farhadi nous signifie que dans son film, et plus largement en Iran, ce qu'on voit n'est pas forcément la vérité, ou qu'en tout cas il en existe d'autres ; le titre est déjà annonciateur de cette dualité, Belle Ville étant le quartier pauvre et dangereux dans lequel vit Firouzeh, qui a accepté de vivre sous la surveillance jalouse de son ex-mari qui tient une échoppe juste à côté de sa maison afin de pouvoir dissimuler sa liberté. Tourné en 2004, le film bénéficie comme "La Fête du Feu" du succès mondial d'"Une Séparation" (Oscar et César, un million de spectateurs en France, record pour un film iranien puisque même "Le Goût de la Cerise" de Kiarostami, Palme d'Or en 87, n'avait pas atteint ce résultat). Il permet ainsi d'apprécier à la fois la constance du travail de Farhadi et son évolution.


Du point de vue de l'histoire, "Les Enfants de Belle Ville" est plus proche d'"Une Séparation" que d'"A propos d'Elly". On y retrouve la progression linéaire d'un récit à partir du télescopage d'une particularité du droit iranien (ici la loi du talion qui laisse la décision de la mise à mort au père de la victime, là la connaissance de la grossesse de la victime qui requalifie une bousculade en meurtre), du débat moral et religieux qu'il suscite, et des conséquences dramatiques qu'il provoque chez les différents protagonistes. De même, Farhadi présente les points de vue de tous les personnages, et quand le religieux dit à Ala "Ce n'est pas à vous de juger du bien", on sent bien que c'est aussi le réalisateur qui s'adresse en ces termes au spectateur.

 

Les personnages existent réellement, et ne se limitent pas à des stéréotypes, notamment ceux qui représentent la pouvoir. Ainsi, le responsable du centre éducatif, plus éducateur que maton, s'échine lui aussi à obtenir le pardon du père ; mais il renvoie Ala à son propre choix dans la discussion intense de la fin. De même le religieux explique que le Coran commence par la référence à un Dieu miséricordieux et non vengeur, et il fait tout pour convaincre le père d'abandonner sa vengeance. Mais quand Ala s'indigne de le voir partir à la prière plutôt que de le suivre pour empêcher le père de commettre un acte irréparable en lui disant" Alors, la prière est plus importante que la vie humaine ?", il répond sans une hésitation "Evidemment !"

 

Au fur et à mesure que la confrontation entre le père de la victime et Ala avance, les lignes se brouillent, avec la nouvelle épouse qui prend partie pour le pardon en espérant en tirer un profit pour sa fille handicapée, ou la relation entre Ala et Firouzeh qui prend une autre dimension. Mais en même temps, de nouvelles embûches se dressent, comme cette loi du sang hallucinante : comme la vie d'une femme vaut la moitié de celle d'un homme, le père devra donc payer une somme importante pour compenser la différence entre la "valeur" de sa fille et celle de son assassin ! A la différences des deux derniers films de Farhadi, celui-là ne se concentre pas sur la classe moyenne ou sur la lutte entre les classes symbolisée par l'opposition entre Nacer et le mari de Razieh dans "Une Séparation". Le conflit oppose ici un ouvrier licencié à une femme célibataire allié à un SDF sorti de prison, et le manque d'argent qui permettrait de résoudre les blocages juridiques représente un levier important du drame.

 

Farhadi vient du théâtre, et cela se voit par la précision de sa mise en scène, le crédit donné aux acteurs et l'importance du texte. Il a un sens de la tension dramatique qui compense une certaine langueur qu'on ne trouve plus dans ses films ultérieurs. La qualité de sa mise en scène est concentrée dans la magnifique scène du repas entre Firouzeh et Ala où se révèle leur amour, alors qu'un accordéoniste joue un air nostalgique. Farhadi s'attarde sur des détails, des petits gestes, Firouzeh qui donne sa viande à Ala, des regards, des sourires retenus... Il y a une dimension néoréaliste dans ce film, et la formidable Taraneh Alidoosti évoque par son alternance de souffrance et de beauté radieuse les Mères Courages incarnées par Anna Magnani.

 

Moins achevé, moins complexe et pour tout dire un peu moins subtil qu'"Une Séparation", "Les Enfants de Belle Ville" possède néanmoins tous les germes de ce cinéma brillant qui fait appel à l'intelligence du spectateur ; comme dans "Une Séparation", il laisse le spectateur face à l'incertitude quant au choix final des héros, ses dilemnes kafkaïens ressemblant furieusement à une métaphore de cette société bloquée qu'est l'Iran des mollahs où malgré tout s'expriment les valeurs de l'humanité que sont la compassion, le pardon et la solidarité.

 

Cluny

Par Cluny - Publié dans : critiques de juin-août 2012 - Communauté : Cinéma
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Dimanche 12 août 2012 7 12 /08 /Août /2012 16:05
Film australien de Wayne Blair

Titre original : The Sapphires

Interprètes : Chris O'Dowd (Dave Lovelace), Deborah Mailman (Gail McCrae), Jessica Mauboy (Julie McCrae) 
 
Durée : 1 h 40

Sapphires.jpg

Note :
  5 /10 

En deux mots :
Histoire sympathique, mais un scénario larmoyant, une réalisation sans grâce et un jeu d'acteurs inégal, ça fait beaucoup..
 

Le réalisateur : Né en 1971 en Nouvelle Galles du Sud dans une famille aborigène, Wayne Blair réalise deux courts métrages en 2003 et 2005 avant de tourner des séries pour la télévision australienne.

 

Le sujet : En 1967 en Australie, les trois soeurs McCrae, Gail, Julie et Cynthia veulent réaliser leur rêve : imposer leur groupe de musique country. Lors d'une audition, elles rencontrent Dave, un impresario irlandais raté. Elles le convainquent de les prendre sous sa coupe pour se faire engager par l'armée américaine pour une tournée au Viet-Nam auprès des troupes. Il accepte, à une condition : qu'elles abandonnent la country pour la seule vraie musique, la soul.

La critique : Il ne faut pas manquer le début du film, puisque celui-ci s'ouvre sur une suite de panneaux expliquant la situation des Aborigènes en 1967, "régis par un statut comparable à celui de la flore et de la faune" (cette expression n'est pas tirée d'un texte de la politique raciste de la White Australia, mais du manifeste fondateur du Black Power aborigène en 1970, "parce qu'ils disent que nous appartenons à la terre mais que la terre ne nous appartient pas"), la Génération volée, cette politique du gouvernement qui enlevait les enfants mulâtres pour les placer dans des orphelinats ou des familles d'accueil blanches, et qui précise pour finir, argument imparable, qu'il s'agit d'une histoire vraie.

 

Cet argument, renforcé par un panneau final qui explique que le scénariste est le fils d'une des protagonistes, semble nous intimer l'obligation d'adhérer à une histoire aussi sympathique et si symbolique de tant de causes. Seulement voilà, le cinéma se juge au résultat, or celui-ci ne tient pas les promesses annoncées et ce pour de nombreuses raisons. Tout d'abord parce que la multiplication des sujets et leur dramatisation cousue de cable blanc dispersent le récit : la place des Aborigènes dans la société australienne des années 60, les conséquences de l'enlèvement légal des enfants mulâtres, la lutte pour les droits civiques aux Etats-Unis et dans l'armée américaine au Viet-Nam ou la difficulté d'assumer son identité dans une société divisée par un apartheid qui ne dit pas son nom : résultat, le film traitent en surface tous ces sujets sans en approfondir aucun.

 

Ensuite parce que le scénario, relayé par la réalisation, utilise toutes les ficelles de l'émotion facile, appuyant les scènes larmoyantes (le concert devant les blessés dans un hôpital de campagne, le flash-back au ralenti sur l'irruption des agents gouvernementaux) en les étirant et en les soulignant à coup de répliques convenues. Et comme, à l'exception de l'Irlandais Chris O'Dowd, le jeu des acteurs sonne souvent faux, la sauce ne prend que très rarement. J'ai bien eu un peu d'espoir en voyant le scénario assumer une rupture tragique, mais trois scènes plus tard, il ressort un lapin du chapeau pour assurer le happy end. Une nouvelle fois l'adage se vérifie : les bons sentiments ne font pas les bons films.

 

Le meilleur se trouve donc ailleurs, dans la dimension musicale de cette aventure. Au départ, les quatre aborigènes chantent de la country, musique blanche s'il en est ; et c'est un Irlandais qui leur impose la soul, lui qui raconte que le jour où il a entendu "The Arms of mine" d'Ottis Redding sa vie a changé. Selon lui, les deux musiques évoquent la perte, mais alors que la country se situe dans la complainte, la soul exprime la détermination. Les nombreuses scènes de concert fonctionnent bien, grâce aux standards de Marvin Gaye, Wilson Pickett ou Sam and Dave, et à l'énergie des actrices-chanteuses. Ni vraiment drôle comme "Good Morning Viet-Nam", ni réellement mélancolique comme "Tournée", "Les Saphirs" nous raconte une histoire édifiante mais originale ; dommage que son traitement ne soit pas à la hauteur de ses ambitions.

 

Cluny


Par Cluny - Publié dans : critiques de juin-août 2012 - Communauté : Cinéma
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