Quantcast

Combien de critiques ?

A ce jour, il y a 536 critiques publiées dans ce blog.

Pages vues

A la télévision cette semaine

Les Aventures de Tintin

Sur Canal +

Intouchables

Sur Canal +

L'Arnacoeur

Sur Canal +

Alpha Dog

Le 21/12/12 à 01:10 sur France 2

La première étoile

Le 23/12/12 à 20:45 sur France 4

 

Recherche

Recommander

Syndication

  • Flux RSS des articles

Calendrier

Décembre 2012
L M M J V S D
          1 2
3 4 5 6 7 8 9
10 11 12 13 14 15 16
17 18 19 20 21 22 23
24 25 26 27 28 29 30
31            
<< < > >>

critiques d'avril 2010

Samedi 24 avril 2010 6 24 /04 /Avr /2010 16:10
Film français de Gustave Kervern et Benoît Delépine

Interprètes : Gérard Depardieu (Serge), Yolande Moreau
(Catherine), Isabelle Adjani (L'amour perdu), Ana Mouglalis (La fausse handicapée)

Durée : 1 h 32

Mammuth.jpg

Note :
  7/10 

En deux mots :
Road movie social et poétique du duo Kervern-Delépine, avec un Depardieu délibérément pachydermique ; souvent très réussi, parfois un peu trop glauque.

Les réalisateurs : Né en 1958, Benoît Delépine fait des études de journalisme avant d'entrer à Canal où il est écrit pour les Guignols pendant six ans. Puis il devient Michael Kael pour le Journal de Groland. Il écrit le scénario de "Michael Kael contre la World Company" en 1998.
Né en 1962 à l'Ile Maurice, Gustave Kervern collabore avec Bruno Sollo et Yvan Le Bolloc'h pour le Top 50 et Le Plein de super. Il rencontre Benoît Delépine à Canal sur l'émission Grolandsat. Ensemble, ils réalisent "Aaltra" en 2004, "Avida" en 2006 et "Louise-Michel" en 2008.

 

Le sujet : Serge Pilardosse vient d'avoir 60 ans, et il prend sa retraite de l'usine de salaison où il était employé depuis 10 ans.  Bien qu'il travaille depuis l'âge de 16 ans, il lui manque de nombreux trimestres pour valider une retraite complète, ses employeurs ayant omis de le déclarer. Poussé par sa femme Catherine, il décide de partir sur sa moto Mammuth à la recherche de ces précieuses attestations

La critique : La Münch Mammut est une moto allemande créée en 1968 qui présentait la particularité d'utiliser un moteur de voiture  en l'occurence un NSU de 1200 cc, et dont le surnom était dû à son allure de mastodonte. C'est ce engin devenu culte qui dormait sous une bâche depuis des décennies dans le garage du pavillon de Serge et de Catherine Pilardosse que ce dernier va prendre pour partir en quête de ce qu'il appelle ses "papelards", et pour sillonner les Charentes et leurs alentours à un rythme que Catherine qualifie "de retraité".

 

Mammuth, c'est aussi le surnom que trimbale Serge depuis des décennies, rapport à son physique massif. C'est ainsi que l'appellent spontanément tous ceux qu'il retrouve sur les lieux de ses boulots d'antan, fossoyeurs, motards, vignerons, ou videurs de boîte de nuit. Parti comme Jacques Dufilho sur son side-car dans "Une journée bien remplie" (film que j'évoquais déja dans ma critique de "Louise-Michel") avec un itinéraire bien défini, faute de partager avec le héros de Trintignant une réelle motivation, Serge se perd rapidement au fil de ses pérégrinations et des rencontres qu'il fait, voulues ou non, et le récit avec lui prend des tours et des détours de plus en plus erratiques.

 

Ma critique de "Louise-Michel" soulignait positivement la construction de l'histoire, et situait la faiblesse du film dans la vacuité caricaturale des personnages. Je fais référence au précédent film du duo, vu que de nombreux aspects de celui-ci se retrouvent dans celui-là : le petit discours du patron (ici le pot de départ de Serge, parasité par le bruit de mastcation des collègues du récipiendaire d'un magnifique puzzle de 2000 pièces), le principe du road-movie sinueux, la présence de Yolande Moreau, Bouli Lanners, Siné, Miss Ming ou Benoît Poelvoorde, ou encore la musique de Gaëtan Roussel (ex Louise Attaque).

 

On retrouve ici les mêmes qualités, à savoir l'existence d'une histoire plus stricturée qu'il n'y paraît s'appuyant sur une question sociale d'actualité (après les patrons voyous, les retraites), et même si certians aspects agaçants persistent, comme la scène inutilement provocatrice de la masturbation, le reproche du manque d'existence des personnages disparaît. Yolande Moreau porte la culotte du couple, et elle manifeste une ironie et une autorité qui la sort du personnage hébétée de Louise. Quant à Gérard Depardieu, il réussit l'exploit d'imposer son personnage de taiseux balourd par sa seule présence.

 

Quelques scènes suffisent à introduire son personnage : son altercation avec le boucher du Super-U (joué par Gustave Kervern) sur l'amour du travail bien fait dans le jambon, sa piteuse tentative de réparation de la serrure des WC. Puis progressivement, il impose sa lourde carcasse à la Mickey Rourke (façon "The Wrestler ", avec en commun la charcuterie et la fantasie capillaire) à coup de  fréquents silences et de rares explosions.

 

Le principe même du road movie permet des rencontres improbables ; "Mammuth" n'y déroge pas. On croise ainsi Dick Annegan en fossoyeur chantant, Siné en patron viticole odieux, Ana Mouglalis en routarde de l'arnaque minable, avec une mention spéciale pour Bruno Lochet en V.R.P. s'effondrant après un coup de téléphone dans une salle de restaurant peuplée d'hommes seuls qui craquent à leur tour. Et puis, il y a la présence d'Isabelle Adjani, l'amour de jeunesse perdu, dont les apparitions qualifiées à juste titre de bunueliennes par Christophe Carbonne dans Première ponctue le voyage de Serge, le transformant d'une simple collecte en pélerinage sur les traces d'un passé enfoui.

 

Tour à tour grave et léger, pamhlétaire et poétique, "Mammuth" marque une étape dans le parcours de Benoît Delépine et Gustave Kervern. Malgré la subsistance de quelques scories grolandaises, leur quatrième film présente une cohérence et une maîtrise de différents registres qui leur faisait défaut jusqu'à présent, et offre à Depardieu un de ses meilleurs rôles depuis bien longtemps.

 

Cluny

Par Cluny - Publié dans : critiques d'avril 2010 - Communauté : Cinéma
Ecrire un commentaire - Voir les 2 commentaires
Samedi 17 avril 2010 6 17 /04 /Avr /2010 16:33
Film français de Luc Besson

Interprètes : Louise Bourgoin (Adèle Blanc-Sec), Matthieu Amalric
(Dieuleveult), Gilles Lellouche (Caponi), Jean-Paul Rouve (De Saint-Hubert)

Durée : 1 h 45

Adele.jpg

Note :
  6 /10 

En deux mots :
L'univers caustique de Tardi passé à la moulinette de l'auteur des dialogues de "Taxi", ça fait une sorte de Canada Dry : pas vraiment bon mais pas désagréable, et ça n'est pas du Tardi.  

Le réalisateur : Né en 1959, Luc Besson réalise son premier film en 1983, « Le dernier combat ». Il rencontre un premier succès avec « Subway » en 1985. « Le Grand Bleu » (1988) est vu par 9 millions de spectateurs, et devient le film d’une génération. Il enchaîne d’autres succès : « Nikita » (1990), « Léon » (1994), « Le cinquième élément » (1997) et « Jeanne d’Arc » (1999).
Il devient aussi producteur de films grand public : la série des « Taxi », « Le baiser mortel du dragon », « Banlieue 13 », mais aussi des films d’auteurs, comme « Trois enterrements », de Tommy Lee Jones ou « Ne pas avaler », de Gary Oldman.
Il réalise aussi «Arthur et les minimoys » et "Angel-A".

 

Le sujet : Adèle Blanc-Sec trouve en Egypte la momie du médecin de Ramsés II et décide de la ramener à Paris. Pendant ce temps, un ptérodactyle éclot dans son oeuf fossilisé du Jardin des Plantes, et commence à semer la panique dans Paris. Le président Fallières ordonne qu'on y mette fin, et l'enquête est confié à l'inspecteur Caponi, qui se met sur la piste du paleantologiste Espérandieu.

La critique : Je garde un souvenir ému de ma découverte des Aventures d'Adèle Blanc-Sec dans la Librairie Générale d'Arcachon un après-midi d'été pluvieux, et de la présence incongrue de Pazuzu dans ce feuilleton déjanté et délibérément décousu qui m'avait permis d'en obtenir l'achat par ma mère, spécialiste des Antiquités Orientales. C'est donc avec curiosité, mais aussi inquiétude, que j'attendais l'adaptation qu'allait en faire Luc Besson, qui pour l'occasion a parjuré son serment de s'arrêter après son dixième film en tant que réalisateur.

 

Le film commence par une adaptation apparemment très fidèle de la bande dessinée, plus précisément le début de "Momies en Folie", avec la voix off qui remplace le commentaire encadré. On suit ainsi Edmond Choupard, étrangement rebaptisé Ferdinand, en train de regagner son domicile dans un état d'hébriété (je laisse la faute d'orthographe originale) avancé. Il passe bien devant la statue de Jeanne d'Arc, mais la différence de traitement de cet épisode entre Tardi et Besson est symptomatique : là où le dessinateur se contente de décrire ainsi : "Choupard jette un regard stupide et respectueux à la statue dorée, équestre et totalement dénuée d'intérêt de la pucelle d'Orléans", le cinéaste arrête son personnage pour le faire pisser contre le socle de la statue en déclamant: "Fais pas ta pucelle, c'est sûr que t'en as vu d'autres !"

 

Voilà qui annonce clairement les deux aspects essentiels du fiilm : le bon, la réussite de la recréation de l'univers graphique de Tardi, et le mauvais, la dénaturation de la tonalité du récit. Côté visuel, Besson a manifesté une fidélité très appréciable à de nombreuses planches de la B.D., allant jusqu'à reprendre les mêmes cadrages et les mêmes angles ; il est aussi fidèle au goût du dessinateur pour les monuments de Paris : le Jardin des Plantes, le Louvre, l'Elysée, aidé par la photographie de Thierry Arbogast. Cette fidélité se manifeste dans de nombreux détails, comme la chaudière en zinc qui fournit l'eau de la baignoire d'Adèle.

 

Autre réussite : l'animation des personnages (je reviendrais après sur Adèle). Mathieu Amalric, méconnaissable, incarne un Dieuleveult  très convaincant de haine et de folie ; Jean-Paul Rouve n'a pas eu de grands efforts de grimage à faire, vu sa ressemblance avec le Justin de Saint-Hubert dessiné par Tardi. Jacky Nercessian en Espérandieu et Philippe Nahon en Ménard  sont eux-aussi très fidèles à leurs modèles de papier. Mais le plus réussi est sans doute Gilles Lellouche dans le rôle de l'inspecteur Caponi, celui dont Tardi se demande à la fin du premier épisode "L'Inspecteur Caponi ne risque-t-il pas de devenir efficace à force d'essuyer échec sur échec ?"

 

Luc Besson a décidé de construire un scénario original à partir d'éléments piochés essentiellement dans le premier tome, "Adèle et la Bête", et le troisième, "Momies en Folie". Il n'avait pas vraiment d'autres choix, tant l'intrigue originale semblait impossible à reprendre in extenso, avec ces personnages démultipliés à l'infini : Albert, Joseph, Ripol, Flageolet, Edith Rabatjoie, Dugommier, Rove, Mouginot, Clara Bernardt ou Peissonnier... Il a donc tenté de donner un sens à ce qui était délibérément foutraque, en introduisant le personnage de la soeur d'Adèle et l'expédition en Egypte, réminiscence du "Cinquième Elément", ou en transformant certains épisodes, comme le sauvetage de Ripol par le ptérodactyle mécanique d'Edith qui devient celui de Dieuleveult par le vrai reptile dompté par Adèle.

 

Ce n'est pas l'abandon de tel ou tel épisode qui pose problème, mais la perte du style feuilletonnesque et abracadabrantesque, et du point de vue ironique du narrateur sur les valeurs dominantes de la bourgeoisie de la Belle Epoque, remplacé par un comique beaucoup plus basique et premier degré, qui transforme par moment Capoini en un ancêtre du commissaire Gibert, le flic neuneu joué par Bernard Farcy dans "Taxi".

 

Et Louise/Adèle ? Une première chose est sûre, ce n'est pas le même personnage. Tardi explique que dans les années 70, il n'existait dans la B.D.comme personnage principal féminin que Bécassine qui n'avait même pas de bouche, ou des pin-up du genre Barbarella. C'est pour cela qu'il a créé Adèle, avec les mêmes caractéristiques qu'un héros masculin. Moderne pour son époque (et même pour les années 70), Adèle fume, gagne sa vie et n'est pas dépendante des hommes.

 

L'Adèle des albums à la mine boudeuse, et elle passe son temps à se faire assommer et à se laisser entraîner par sa curiosité dans tous les pièges tendus par ses nombreux ennemis. L'Adèle du film est une sorte d'Indiana Jones en jupons, avec une touche d'Arsène Lupin pour les déguisements, et qui commence à jouer sa partie de tennis comme Suzanne Lenglen et la finit comme Venus Williams. Louise Bourgoin remplace l'air renfrogné de son modèle de papier par une énergie péremptoire, (dés)servie par des dialogues du type "J'ai une tête à boire du thé ?".


L'"Adèle Blanc-Sec" de Besson se laisse regarder, pour les raisons expliquées plus haut (la galerie de personnages, le respect de l'univers graphique de Tardi), et aussi pour l'enthousiasme naïf et communicatif de l'auteur de "Léon". Le film a certes beaucoup moins d'envergure que la B.D., que ce soit du point de vue de la narration que de la dénonciation de la société qui a engendré le grand massacre de 14-18, mais il offre quand même un honnête divertissement. 

 

Cluny

Par Cluny - Publié dans : critiques d'avril 2010 - Communauté : Cinéma
Ecrire un commentaire - Voir les 1 commentaires
Samedi 17 avril 2010 6 17 /04 /Avr /2010 15:36
Film franco-américain d'Olivier Dahan

Interprètes :
Renée Zellwege (Jane), Forest Whitaker (Joey), Nick Nolte (Caldwell)

Durée : 1 h 45

Own.jpg
Note :  5 /10 

En deux mots : Pour son premier film américain, Olivier Dahan échoue à cause d'n scénario caricatural.  

Le réalisateur : Né en 1967 à la Ciotat, Olivier Dahan suit une formation de plasticien à l'Ecole d'Art de Marseille. Il réalise des clips pour IAM, Mc Solaar, les Cranberries et Zucchero. En 1994, il tourne son premier film pour la série "Tous les Garçons et les Filles de leur âge" d'Arte, "Frère". En 1997, il passe au grand écran avec "Déjà mort", avant de tourner "Le petit Poucet" en 2001, "La Vie promise" en 2002 et "Les Rivières pourpres 2" en 2004. Son biopic sur Piaf, "La Môme ", permet à Marion Cotillard d'obtenir l'Oscar de la meilleure actrice en 2007.

Le sujet : Jane, une ex-chanteuse handicapée à la suite d'un accident de voiture, vit à proximité de Joey, un ancien pompier devenu S.D.F. Quand celui-ci découvre une lettre du fils de Jane qui vit dans une famille d'accueil et qui invite sa mère pour sa communion, il décide de convaincre Jane d'entreprendre ce voyage jusqu'à la Floride avec lui. 

La critique : Le cinéma américain a toujours su attirer à lui des réalisateurs de tous les pays. D'abord terre de refuge pour les Lubitsch, Curtiz ou Von Stoheim, Hollywood est devenu pour des Paul Verhoven, Sam Mendes, Ang Lee ou John Woo une garantie d'accès à un public mondial. Curieusement, peu de réalisateurs français ont tenté l'aventure américaine, et ils sont encore moins nombreux à y avoir rencontré un succès durable, les derniers échecs notables étant ceuxs de Costa-Gavaras, Kassovitz et Tavernier. 

Barrage de la langue ou incompatibilité génétique du cinéma d'auteur avec le fonctionnement des majors, les rares réussites sont à mettre au crédit de réalisateurs mineurs qui ont mis toute leur énergie à faire plus américain que loe modèle, comme Jean-François Richet ou Pierre Morel. Toujours est-il qu'auréoléde sa réputation toute neuve de faiseur d'oscar avec "La Môme", Olivier Dahan est parvenu à attirer des habitués des Academy Awards tels que Forest Whitaker, Renée Zellweger et Nick Nolte. 

On peut comprendre ce qui a séduit celui qui a reçu la statuette pour son incarnation de Idi Amin Dada dans "Le Dernier Roi d'Ecosse" dans ce road movie mettant aux prises deux éclopés de la vie. L'histoire du cinéma U.S. est jalonnée de ces performances : Dustin Hoffman dans "Tootsie" et "Rain Man", Daniel Day-Lewis dans "My Left Foot " ou Tom Hanks dans "Forrest Gump".

La (bonne) surprise de ce film vient de la relative sobriété de la réalisation : Olivier Dahan n'a pas cherché à en mettre plein la vue avec caméra virevoltante et effets spéciaux hype, bien au contraire. Il a ainsi choisi de filmer ses personnages en plan serré, pour évoquer l'enfermement de Jane dans son corps et celui de Joey dans son crâne, et de privilégier le hors champ, comme dans la scène où Jane reçoit les applaudissements, là où tout bon cinéaste américain aurait insisté à coup de ralentis sur la standing ovation.

Il a eu aussi le culot de filmer la poursuite en voiture la moins compréhensible et la plus intériorisée de l'histoire du cinéma en ayant recours au split screen psychédélique, et il a truffé son récit de petites parenthèses narratives élégantes, comme cette histoire du bluesman noir qui rencontra le diable filmée en rouge et bleu comme dans "Le Petit Poucet" dans une ambiance qui rappelle la fuite en bateau de "La Nuit du Chasseur", ou cet échange muet et burlesque entre Joey et Billie derrière une vitre dépolie.

Malheureusement, il n'a pas fait preuve de la même sobriété dans l'écriture du scénario, et le récit toujours sur le fil du rasoir du mélo larmoyant alterne petits moments de grâce et lourdes fautes de goût, comme les retrouvailles de Jane et de son fils. A signaler, la musique du film signée Bob Dylan, et une version de "This Land is Your land" de Woodie Guthrie chantée par Renée Zellweger.

Cluny
Par Cluny - Publié dans : critiques d'avril 2010 - Communauté : Cinéma
Ecrire un commentaire - Voir les 0 commentaires
Lundi 5 avril 2010 1 05 /04 /Avr /2010 17:22
Film français d'Anne Le Ny

Interprètes : Karine Viard (Babette), Fabrice Luchini
(Arnaud), Michel Aumont (Lucien), Valérie Benguigui (Karine)

Durée : 1 h 40
 

Invites.jpg
 
Note :
  8 /10
En deux mots : Comédie sociale et familiale d'une grande subtilité, avec une Karine Viard éblouissante.  

La réalisatrice : Actrice de télévision (Julie Lescaut, P.J., Avocat et associés) et de cinéma (pour Pierre Jolivet, Sophie Marceau, Agnés Jaoui) depuis 1991, Anne Le Ny passe à la réalisation en 2007 avec "Ceux qui restent".


Le sujet : Quand leur père Lucien leur annonce qu'il va accueillir des sans-papiers chez lui, ses enfants Arnaud et Babette ne sont pas étonnés de ce geste venant d'un ancien résistant, médecin militant pour l'avortement. Mais quand ils découvrent que les réfugiés sont une jeune moldave et sa petite fille, et qu'ils apprennent dans la foulée que Lucien a épousé Tatiana et que le mariage blanc a été consommé, cette révélation bouleverse leur vie et ravive d'anciennes blessures.

La critique : Par la situation originale, quelques répliques fulgurantes et la tête ahurie de Karine Viard quand elle apprend que son père la déshérite, la bande-annonce du deuxième film d'Anne Le Ny m'avait alléché, tout en me faisant redouter une caricature un peu appuyée des bourgeois-bohêmes tendance gauche caviar. Tous ces éléments sont bien présents, y compris la satire des assujettis à l'I.S.F. bien-pensants fêtant par un repas de famille l'arrivée des réfugiées, à qui ils offrent les vieux vêtements qu'ils n'ont pas encore donnés à la Croix-Rouge.


Mais très vite, on se rend compte que cette dimension politico-humanitaire ne représente qu'un des sujets du film, finalement rendu plus complexe et plus subtil par la personnalité de celle que Arnaud définit comme "une bombe avec l'idéologie de Milosevic", et qui se félicite que dans le collège de sa fille il n'y ait pas trop de Noirs et d'Arabes. Tatiana ne cache pas son objectif et ses ambitions, et quand pour plaire à sa fille, le fils d'Arnaud se prend un carton rouge après un tacle à la carotide, Karine a beau jeu de s'interroger sur "l'impact des Moldaves sur les hommes de la famille".


Car c'est une vraie qualité du film, soulignée par la critique, que l'absence de jugement. Tatiana peut légitimement apparaître comme une détourneuse d'héritage, mais elle est prête à bien des humiliations pour le bonheur de sa fille. Lucien peut paraître pathétique par ses compromissions avec les valeurs qu'il a professées toute sa vie et son aveuglement devant les manigances de Tatiana, mais n'a-t-il pas le droit de revendiquer cette dernière histoire d'amour ? Karine va commettre un acte moralement condamnable, mais ne manifeste-t-elle pas là un courage qui manque à son mari et à sa belle-soeur en accomplissant l'acte qui les libèrent ?

 

Et puis, l'irruption de Tatiana et de sa fille va servir de révélateur pour Arnaud et Babette de tous ces non-dits, tous ces vieux dossiers jamais apurés dans leur relation entre eux et surtout dans leur rapport à ce père, "un homme remarquable" dont la personnalité écrasante a provoqué chez sa fille le désir de se conformer au modèle paternel au mépris de ses propres envies, et la révolte néo-libérale chez le fils qui ne se sentait pas capable d'être à la hauteur.

 

La relation entre le frère et la soeur est au coeur du scénario d'Anne Le Ny et de Luc Béraud, qui participa à l'écriture de "L'Effrontée" et de "La Petite Voleuse". Elle est portée par le jeu des deux acteurs : Fabrice Luchini, remarquablement sobre, et Karine Viard, qui anime les plus beaux silences vu depuis longtemps dans le cinéma français pour donner vie à cette remise en cause libératoire et douloureuse de toute une éducation ("Je me suis construite sur un mensonge"). L'un et l'autre apportent leur intensité pour rendre crédible ce basculement permanent entre rire et émotion qui constitue une des grandes forces de ce film.

 

Les dialogues savoureux ("C'était pour une ration de blinis en plus, pas pour une relation incestueuse avec des échangistes", "Je travaille pas pour la Stasi") ne donne pas cette impression trop littéraire de bien des films d'auteur à la française ; ils s'intégrent dans le récit, cohérents avec la personnalité de ceux qui les prononcent. Cet ensemble de qualités : absence de manichéisme, subtilité du traitement de situations complexes, qualité de l'interprétation, fait de "Les Invités de mon père" une des bonnes surprises de ce début d'année du cinéma français.

 

Cluny

Par Cluny - Publié dans : critiques d'avril 2010 - Communauté : Cinéma
Ecrire un commentaire - Voir les 0 commentaires

Abonnez-vous sur Twitter

Pour être prévenu de chaque article, abonnez vous sur Twitter

 

TwittCC.PNG

Catégories

Créer un blog gratuit sur over-blog.com - Contact - C.G.U. - Signaler un abus - Articles les plus commentés