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critiques d'octobre 2009

Dimanche 25 octobre 2009 7 25 /10 /Oct /2009 20:34
Film autrichien de Michael Haneke

Titre original :
Weiße Band - Eine deutsche Kindergeschichte

 
Interprètes : Christian Friedel (l'instituteur), Burghard Klaußner (le pasteur), Ulrich Tukur (Le baron), Suzanne Lothar (la sage-femme)

Durée :
2 h 24

 

Note :
  9/10 

En deux mots :
Palme d'or méritée pour une plongée angoissante et vertigineuse dans les prémices du nazisme dans l'Allemagne de 1913. 

Le réalisateur :
Né en 1942 à Munich d'une actrice catholique et d'un metteur en scène protestant, Michael Haneke a étudié la philosophie à Vienne. Il monte de nombreuses pièces au théâtre, et réalise des téléfilms. En 1989, il tourne son premier film de cinéma, "Le Septième Continent", premier d'une trilogie sur la glaciation émotionnelle qui comprend aussi "Benny's Video" (1992) et "71 Fragments d'une chronologie du Hasard" (1994). Présenté à Cannes en 1997, "Funny Games" choque une partie du public, et en enthousiasme une autre partie.
Michael Haneke tourne ensuite "Code Inconnu" en 2001, puis "La Pianiste" qui obtient le Grand Prix du Jury à Cannes en 2002, "Le Temps des loups" en 2003, "Caché" en 2005 et "Funny Games US" (2008), duplicata américain de son film de 1997.


Le sujet : En 1913, un village de l'Allemagne du Nord connaît des événements troublants : un cable tendu entre deux arbres qui fauche le cheval du médecin lancé au galop, l'enlèvement du fils du baron, l'incendie d'une grange. L'instituteur, témoin de tous ces événements, se rend compte du comportement étrange de ses élèves.


La critique : Il existe quelques rares films qu'on reçoit comme une claque, et auxquels on repense souvent, un peu comme un rêve récurent. Incontestablement, "Le Ruban blanc" fait et fera partie de ceux-là, rejoignant en ce qui me concerne parmi les oeuvres traitant du bien et du mal "La Nuit du Chasseur" ou "Breaking the Waves", dont il reprend d'ailleurs curieusement la Siciliana de Bach, dans un film où la musique n'est pourtant présente que quand elle est jouée par les personnages : la baronne (encore une pianiste), l'instituteur, l'orchestre villageois lors de la fête des moissons ou la chorale d'enfants interprétant pour la fête de la réformation "Ein feste Burg ist unser Gott" de Martin Luther mis en musique par Bach.

Le récit commence par la voix off du narrateur, l'instituteur qu'on devine au soir de sa vie, sur un écran noir. Puis une ouverture au noir sur un plan fixe, nous montrant la chute du docteur dont le narrateur explique qu'elle a été le commencement des tragiques événements de cette année 1913. Nous découvrons ensuite l'instituteur avec sa bonne bouille à la sortie de sa classe, s'étonnant de la sollicitude que Klara, la fille du pasteur, manifeste pour les enfants du docteur.

Et alors qu'on voit s'éloigner dans le village Klara et ses copines, on se demande avec l'instituteur ce que peuvent cacher ces enfants trop polis, trop sages, trop graves qui évoquent les maléfiques enfants blonds du "Village des Damnés"(celui de Wolf Rilla, pas celui de John Carpenter). Témoins et/ou acteurs des atrocités qui vont bouleverser la quiétude du village, ils partagent tous la particularité de grandir dans la violence institutionnalisée, la frustration et la culpabilisation.

Certes, les vies des adultes ne sont pas non plus heureuses, que ce soit celle du paysan veuf de sa femme tuée à la scierie, celle du docteur qui montre sa propension à passer du statut de victime au rôle de bourreau dans une scène hallucinante de cruauté où il congédie sa maîtresse, celle des châtelains apeurés, ou celle du pasteur qui au nom de l'amour ligote son fils pour ne pas qu'il meurt de masturbation. Mais eux, au moins, s'accordent le droit d'exprimer leurs sentiments.

Les enfants ne se voient pas octroyer ce droit, et le symbole de ce dressage au nom de la morale puritaine est le ruban blanc que le pasteur impose à Klara et son frère, symbole de la pureté à laquelle ils doivent aspirer constamment, et qui s'oppose au noir de l'uniforme que la plupart de ces angelots porteront trente ans plus tard. La symbolique de ces couleurs explique le choix du noir et blanc, ainsi que l'association que fait Haneke aux photographies de cette époque. Loin d'être expressionniste, la superbe photographie de Christian Berger joue sur l'opposition du noir et du blanc d'un plan à un autre, et non sur le contraste créé dans un même plan à l'aide de l'éclairage.

Comme le souligne Haneke dans une interview, le narrateur débute son récit en disant : "J'ignore si ce que je veux vous raconter est totalement véridique ; j'en connais une partie seulement par ouï-dire." Le spectateur est d'emblée plongé dans l'incertitude, ce qui place bien "Le Ruban blanc" dans la continuité de l'oeuvre d'Haneke. Et, alors qu'un des enjeux dramatiques du film est de parvenir à identifier le ou les auteurs des événements, la survenue de la guerre et l'éloignement de l'instituteur nous laissent dans la même incertitude quant aux faits : car l'essentiel se situe ailleurs, dans la description de la genèse d'une des pires monstruosités de l'histoire de l'humainité.

Dans la même interview, Haneke se définit comme "un petit peu perfectionniste". Ce souci kubrickien de la maîtrise de tous les aspects du film s'est notamment manifesté dans le casting ; celui des acteurs ou des figurants, où il a privilégié les visages "à l'ancienne", allant chercher jusqu'en Roumanie des figurants à la peau tannée par le soleil. Mais c'est pour le choix des enfants que le processus a été le plus long, prenant plus de six mois. Après avoir casté plus de 7000 enfants, en évitant les agences spécialisées car les enfants sont déjà "gâchés" par les séries télévisées, il a en finalement sélectionné une trentaine dont dix se sont vus attribuer les rôles principaux au bout de nombreux essais. Ce travail préliminaire explique l'extraordinaire force du jeu de ces enfants acteurs. La scène où Anna répond à son petit frère de 5 ans à propos de la mort est bouleversante de justesse, comme celle où le cadet du docteur vient offrir à son père ce qu'il a de plus cher. On est à des années-lumières du jeu stéréotypé des pauvres acteurs du "Petit Nicolas"...

Je m'étais demandé si l'attribution de la Palme était due à la présence de l'actrice de "La Pianiste" à la tête du jury, ou au souci d'éviter une deuxième palme française consécutive en récompensant "Un Prophète" un an après "Entre les Murs". La vision de ce film à la fois captivant et oppressant, structuré par une maîtrise absolue des différents pupitres de la cinématographie :  construction scénaristique, mise en scène, montage, photographie, et direction d'acteur, suffit à justifier la consécration du "Ruban blanc", appelé à rester comme une des grandes Palmes d'Or, aux côtés du "Guépard", d'"Apocalypse Now", de "Mission" ou d'"Elephant".

Cluny



Par Cluny - Publié dans : critiques d'octobre 2009 - Communauté : Cinéma
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Samedi 24 octobre 2009 6 24 /10 /Oct /2009 19:13
Film mexicain de Cary Fukunaga
 
Interprètes : Edgar Flores (Casper/Willy), Paulina Gaitan (Sayra), Kristian Ferrer (Smiley)

Durée :
1 h 36



Note :
  8/10 

En deux mots :
Brillant premier film, mêlant habilement destinées personnelles et violence de la réalité sociale. 

Le réalisateur :
Né en 1977 à Oakland, Cary Fukunaga a vécu au Japon, en France et au Mexique où il réside actuellement. Il est diplômé d'histoire de l'Université de Californie, et de l'IEP de Grenoble. Il réalise un court métrage en 2004 "Victoria para Chino" qui obtient le prix du Festival de Sundance.


Le sujet : Au Salvador, Sayra retrouve son père qui vient d'être expulsé des Etats-Unis. Avec ce dernier et son oncle, elle prend la route du Nord : Guatemala, Mexique en direction de la frontière, en espérant atteindre le New Jersey. Au Chiapas, Casper fait partie du gang la Mara Salvatrucha. Après que son chef Lil Mago a tué sa petite amie, il se venge et le tue à son tour quand celui s'attaque à Sayra sur le toit du train où ils sont montés pour détrousser les émigrants. Casper et Sayra font route ensemble, avec le redoutable gang à leurs trousses.


La critique : Les gangs ont visiblement bien changé depuis "West Side Story". Les blocks qu'ils contrôlent ne sont plus à la dimension d'un pâté de maison, mais d'un continent. Ainsi, la Mara Salvatrucha à laquelle appartient Casper compterait de 50 000 à 100 000 membres répartis entre Etats-Unis, Salvador, Guatemala, Honduras, Mexique et Canada. Née dans les années 1980 à Los Angeles parmi des chicanos originaires du Salvador, la Mara tire son nom de marabunta, qui désigne l'invasion destructrice de fourmis légionnaires. C'est en filmant pour "La Vida loca" un gang slavadorien concurent, la Mara 18 qui croise d'ailleurs la route de nos personnages, que Christian Poveda a été assassiné au Salvador.

Le recours à ce tout jeune savoir wikipédiesque se justifie par la sécheresse du réalisme documentaire qui constitue un des aspects essentiels de ce premier long métrage de Cary Joji Fukunaga. Ainsi les différents rites initiatiques (tenir 13 secondes de passage à tabac, tuer un ennemi de sang-froid pour avoir droit à son premier tatouage), ainsi que la soumission inconditionnelle aux règles du gang sont intégrés avec intelligence dans l'intrigue, et représentent plus qu'une toile de fond.

On voit ainsi Willy, dont le pseudonyme de marero est Casper, aller chercher le tout jeune Benito en douce de sa grand-mère qui ose s'opposer à la toute-puissance du gang, pour lui faire passer son initiation qui l'autorisera à avoir son propre pseudo, Smiley. Après son tabassage, le chef du gang le cajole et lui explique qu'il pourra bénéficier partout de l'aide de la Mara, ce qui sera amplement démontré dans la seconde partie du film, à partir du moment où Caper passe du statut de prédateur à celui de proie. Cette dimension de protection d'une famille composée de dizaines de milliers de frères, dans des pays où l'Etat a depuis longtemps renoncé à son rôle d'aide sociale est très justement montrée dans toutes ses contradictions, dans la scène où Lil Mago annonce à un prisonnier  du C18 que son corps sera découpé en 18 morceaux et donné à manger aux chiens, le tout en portant avec tendresse un bébé dans ses bras.

En parallèle à cette action, on suit le long trajet de Sayra, de son père et de son oncle vers la Terre Promise du Nord, perchés sur le toit d'un train comme les vagabonds de la grande dépression. Avant d'atteindre la gare de départ, on voit le père faire réciter à ses deux compagnons le numéro de téléphone de sa femme au New Jersey ; cette scène donne un exemple de la subtilité du scénario : elle permet à la fois de montrer l'indépendance de caractère de Sayra qui se rebelle devant ce bachottage, et de placer un jalon qui prend tout son sens à la fin.

La force de "Sin Nombre" réside dans cette capacité à mêler l'aspect documentaire à la tension permanente d'un récit qui prend la dimension d'une tragédie, tout cela se trouvant magnifié par une très belle photographie et un choix de cadre très souvent pertinent. Mais le récit à lui seul suffit à rendre le film à la fois palpitant et poignant, notamment grâce à la performance de Paulina Gaitan qui a l'âge du rôle. Même si on sait comme Casper que la question n'est pas de savoir s'il échappera à son exécution, mais plutôt de savoir où et quand elle aura lieu, on se demande si le destin qui les a précipités l'un vers l'autre permettra que se réalise la prédiction de la voyante : "Tu arriveras aux Etats-Unis non par la grâce de Dieu, mais par les griffes du diable. "

Cluny
Par Cluny - Publié dans : critiques d'octobre 2009 - Communauté : Cinéma
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Dimanche 18 octobre 2009 7 18 /10 /Oct /2009 18:37
Film chilien de Sebastian Silva
 
Interprètes : Catalina Saavedra (Raquel), Claudia Celedon (Pilar), Alejandro Goic (Mundo)

Durée :
1 h 35



Note :
  7/10 

En deux mots :
Film intéressant sur un sujet original, un peu affadi par une happy end inutile. 

Le réalisateur :
Né en 1979, Sebastian Silva a suivi une école de cinéma à Santiago, avant d'étudier l'animation à Montréal. Peintre, il expose ses oeuvres et fonde un groupe de muique, CHC. En 2007, il réalise son premier film, "La Vida me mata".


Le sujet : Raquel travaille comme bonne pour la même famille depuis plus de vingt ans. Quand sa maîtresse décide d'engager une autre domestique pour la soulager, Raquel se sent menacée et rejetée, et elle fait tout pour dégoûter la nouvelle arrivée, avec succès.


La critique : J'avais manifesté ma déception il y a quelques mois pour le premier film chilien de ces critiques, le très déplaisant "Tony Manero" de Pablo Larain. Cette déception était d'autant plus grande que je gardais le souvenir de la vitalité du cinéma de l'Unité Populaire au début des années 70, avec des films comme "Le Chacal de Nahueltoro" de Miguel Litin, "La Métamorphose d'un Chef de la police" d'Helvio Soto, ou "Valparaiso mon amour" d'Aldo Francia. C'est donc avec une envie teintée d'un peu d'inquiétude que je suis allé voir ce deuxième film de Sebastian Silva.

Difficile pourtant de situer "La Nana" dans le contexte du Chili actuel, vu qu'à l'exception de quelques courtes scènes, la quasi-intégralité de l'action se déroule à huis clos dans la maison de la famille que Raquel sert depuis deux décennies. On ne sait rien de ce qui se passe à l'extérieur de cette villa, et quand les personnages en sortent, la caméra reste serrée sur eux en ne donnant à voir de l'environnement que des murs anonymes.

C'est donc ce qui se passe entre ces quatre murs qui a intéressé Sebastian Silva, qui raconte avoir eu des bonnes à la maison durant son enfance, et à qui il dédit d'ailleurs ce film. Il traite plus particulièrement de la place de Raquel dans cette famille, entre bonne conscience à la Le Quesnoy, préjugés de caste et réelle affection. Le film s'ouvre sur un gros plan de Raquel réfugiée dans la cuisine, alors qu'on entend hors cadre les voix des membres de la famille qui l'attendent dans la salle à manger pour célébrer son anniversaire. Raquel, gênée, refuse d'y aller, et il faut que ce soit le cadet, son chouchou, qui aille la chercher pour qu'elle accepte enfin de venir.

Mais quand la maîtresse de maison décide de lui adjoindre une autre bonne, Raquel se sent dépossédée de sa place privilégiée, notamment auprès des enfants auquels elle a sacrifié sa vie. Elle entame alors une guerilla impitoyable avec les candidates qui se succèdent, avec une prédilection pour sa tactique de les enfermer dehors. A y bien regarder, il n'y a rien de très étonnant à la voir adopter un comportement aussi puéril, tant les habitants de cette maison manifestent tous une forme d'immaturité : le père qui passe des heures à construire une maquette de bateau et qui supplie Raquel de cacher ses escapades au golf, la mère qui se fait régenter par sa propre mère qui lui reproche son libéralisme domestique, et l'aînée qui  projette un rejet adolescent contre Raquel - qui lui rend bien.

La description de ces relations se situe parfois sur le fil du rasoir, entre justesse de certains détails et caricature de quelques situations. Cet équilibre instable se percevait d'ailleurs nettement dans la salle où j'ai vu le film, avec des spectateurs qui manifestaient une gêne devant la cruauté un peu condescendante d'une scène, et d'autres qui riaient franchement. L'origine de cette condescendance est peut-être à chercher dans la description de la personnalité brute de décoffrage de Raquel, jouée par Catalina Saavedra qui a adopté une démarche monolithique et un mutisme perpétuellement sur la défensive.

Tourné en numérique, cadré de près à cause du manque de recul du décor de la maison, "La Nana" possède quand même une indéniable vitalité, et réussit à intriguer sur un sujet aussi désuet de nos jours, grâce à un sens du détail qui sonne souvent juste. Il est cependant dommage que le réalisateur ait choisi de façon un peu trop démonstrative de sortir Raquel de son néandertalisme au moyen de l'irruption d'un personnage, croisement de Mary Poppins et de Poppy de "Be Happy", choisissant ainsi de ne pas aller jusqu'au bout de l'énigme de son héroïne.

Cluny


Par Cluny - Publié dans : critiques d'octobre 2009 - Communauté : Cinéma
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Dimanche 4 octobre 2009 7 04 /10 /Oct /2009 16:32
Film français de Laurent Tirard 
 
Interprètes : Maxime Godard (Nicolas), Kad Merad (Le père de Nicolas), Valérie Lemercier (La mère de Nicolas)

Durée :
1 h 30



Note :
  5/10 

En deux mots :
Adaptation sans grand génie du classique de Goscinny et Sempé, avec un arrière-goût de naphtaline. 

Le réalisateur :
Laurent Tirard a suivi des études de cinéma à l'Université de New York, avant de devenir lecteur de scénarii  pour la Warner Bros à Los Angeles. Il a ensuite été journaliste à Studio Magazine. En 1999, il réalise son premier court métrage "De source sûre". Il écrit le scénario de "Le Plus Beau Jour de ma vie" et de "Prête-moi ta main". Il tourne son premier long métrage en 2004, "Mensonges et trahisons et plus si affinités..." suivi en 2007 par "Molière".


Le sujet : Nicolas coule des jours heureux avec son père et sa mère à la maison, et avec ses copains Clotaire, Alceste, Eudes et Rufus à l'école. Mais quand Joachim lui raconte qu'il vient d'avoir un petit frère et que ses parents ne veulent plus de lui, Nicolas devient persuadé que sa mère va attendre un bébé. Ses copains se mobilisent pour empêcher que ça arrive.


La critique : Il est toujours difficile d'adapter au cinéma un bon livre ; il l'est encore plus de porter à l'écran un classique de la littérature jeunesse, vu que ceux-ci portent souvent déjà en eux un univers original très riche. L'exemple en la matière est "Charlie et la Chocolaterie", où Tim Burton a su mettre son propre talent de créateur au service de l'oeuvre de Roald Dahl. Prenons un autre exemple : la transposition à l'écran des aventures du héros gaulois le plus célèbre, avec des résultats aussi différents entre "Mission Cléopâtre", très réussi, et "Astérix aux Jeux Olympiques", nullissime.

Dans le cas qui nous occupe, il y avait une difficulté supplémentaire : Le Petit Nicolas ne se réduit pas au texte d'Albert Goscinny, et l'adaptation devait aussi prendre en compte le dessin de Sempé, mélange d'épure et de soin du détail, que l'excellent générique fait de papiers animés rappelle au souvenir du spectateur. Résultat : trop de détails tue le détail. En effet, la reconstitution minutieuse, avec table en formica, 404 rutilante et culottes courtes finit par tout affadir, à la différence du "Fabuleux Destin d'Amelie Poulain" où Genet avait su isoler plastiquement tel ou tel élément signifiant.

Ici, le soin accordé aux costumes, aux décors et aux accessoires donne l'impression d'effeuiller une collection de cartes postales à la Robert Doisneau, mais il manque l'essentiel, le ressort comique du texte de Goscinny basé sur le décalage entre la naïveté des commentaires de Nicolas et la compréhension de la réalité que le lecteur déduit de ceux-ci. Dans le film, il y a bien la voix off de Nicolas, mais elle se contente d'adjoindre l'adjectif chouette à tout bout de champ, et ce fameux décalage se voit d'autant plus estompé qu'il est lourdement souligné par ce qui est donné à voir, et non par ce que le spectateur aurait à imaginer.

Le texte de Roald Dahl aussi bien que celui de Goscinny étaient le reflet d'une époque ; Burton a fait le choix de rendre son récit intemporel, en créant un univers plastique qui emprunte à différentes époques. Laurent Tirard au contraire a choisi de restituer la France des années gaullo-pompidoliennes, en prenant le risque de souligner encore d'avantage son échec à donner de la modernité à un récit forcément daté.

Les scènes les plus réussies, hélas furtives, sont celles qui s'inscrivent dans un registre purement visuel, comme les baffes que se prend Agnan chaque fois qu'il enlève ses lunettes à la visite médicale, la substitution texaverienne des raviolis du petit par le homard honni par M. Moucheboume ou l'arrivée de la 4004 dans la forêt sur une musique à la Danny Elfman. Mais ces bonnes idées à la limite du burlesque ne durent pas, ou au contraire perdent leur efficacité à force d'être diluées.

Il en est du Petit Nicolas comme de Tintin : ce sont deux éléments neutres qui servent de révélateur aux personnages qui les entourent, ici essentiellement les copains de classe. Malheureusement, les enfants-acteurs ont bien du mal à donner vie à un texte très écrit, et les adultes se retrouvent bien enfermés dans leurs personnages, à la notable exception d'Anémone et de Michel Galabru.

En voyant la scène de Clotaire regardant l'aiguille de la pendule de la cour, on ne peut s'empêcher de penser à la scène qui l'a inspirée dans "L'Argent de Poche", et la comparaison est impitoyable. La référence à Truffaut, outre la citation du gamin qui déchire les pages de son cahier taché d'encre, rappelle la concomitance de la sortie des "400 Coups" et de la publication de la première histoire du Petit Nicolas dans Sud-Ouest en 1959.

Alors que le film de Truffaut était une projection de vitalité juvénile tournée vers l'avenir, le "Petit Nicolas" de Laurent Tirard fait effet de retour en arrière, de nouvel avatar de la qualité française ronronnante dénoncée par la Nouvelle Vague ; c'est toute la différence entre un film d'auteur et un produit destiné à plaire au plus grand nombre, en évitant bien tout ce qui pourrait dépasser.

Cluny
Par Cluny - Publié dans : critiques d'octobre 2009 - Communauté : Cinéma
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Samedi 3 octobre 2009 6 03 /10 /Oct /2009 15:49
Film américain de Steven Soderbergh
 
Interprètes : Matt Damon (Mark Whitacre), Scott Bakula (L'agent Brian Shepard), Joel MacHale (l'agent Robert Herndon)

Durée : 1 h 47



Note :
  7/10 

En deux mots :
Le Soderbergh semestriel s'intéresse à un manipulateur bipolaire ; mineur, mais divertissant. 

Le réalisateur :
 Né en 1963 à Atlanta, Steven Soderbergh réalise un court-métrage, "Winston", qui lui permet de tourner son premier long-métrage "Sexe, mensonge et vidéo", qui obtient la Palme d'Or en 1989. Loin de tourner des films commerciaux, il réalise des films expérimentaux, comme "Kafka" (1991), "King of the Hill" (1993) ou "Schizopolis" (1996). Avec "Hors d'atteinte"en 1998, il tourne avec George Clooney avec lequel il va produire de nombreux films.

En 2000, il a deux films nommés aux oscars "Erin Brokovitch" et "Traffic". Il réalise ensuite "Ocean Eleven" (2001) , "Ocean Twelve" (2004), "Ocean Thirteen" (2007), ainsi que le dyptique sur le "Che" (2008), ce qui ne l'empêche pas de continuer un cinéma plus expérimental avec "Bubble" (2006), "The good German" (2007) ou "Girlfriend experience" (2009).

 
Le sujet : Mark Whitacre travaille pour la compagnie agroindustrielle ADM, où il gagne bien sa vie comme responsable de la production d'un des produits-phares, la lysine. Pourtant, il prend contact avec l'agent Shepard du FBI venu enquêter sur une affaire de chantage pour lui révéler l'entente illicite qu'ADM passe avec ses concurrents. Pendant deux ans et demi, il va enregistrer les conversations de ces réunions secrètes. Mais quand le FBI a assez d'éléments pour interpeller les dirigeants d'ADM, une autre vérité se fait jour à propos de Mark Whitacre.

La critique : Soderbergh est avec Woody Allen le cinéaste contemporain le plus prolifique, le seul à soutenir en cette période où la pré-production d'un film prend souvent un temps considérable, le rythme d'un Hitchcock ou d'un Douglas Sirk de la grande époque. Alors, forcément, dans une filmographie aussi fournie, il y a du très réussi et du moins bon. "The Informant !" ne restera pas à la hauteur de "Traffic", mais il n'en est pas pour autant dénué d'intérêt, particulièrement dans la malice de sa narration.

Mark Whitacre raconte à qui veut l'entendre qu'il a perdu ses parents à l'âge de 3 ans, et qu'il a été adopté par un millionnaire qui lui a offert les meilleures études. Marié à Ginger qu'il a rencontré au collège, il a lui même adopté des enfants et avec son revenu mensuel à cinq zéros, il collectionne les voitures de luxe.

Il a les traits d'un Matt Damon que Soderberg a choisi pour son "charme juvénile et son côté propre sur lui", et qui a pris quelques vingt kilos pour le rôle. Choix judicieux, car malgré sa moustache, sa moumoute et ses cravates bariolées, Mark Whitacre présente un côté enfantin, voire puéril, notamment dans sa façon d'aborder vérité et mensonges. Car le noeud de l'intrigue se situe dans la personnalité du héros, et la finesse de Soderbergh réside dans l'adoption du point de vue de celui-ci, quitte à entraîner le spectateur sur des fausses pistes dont on comprend l'origine lors de la révélation finale.

Cette démarche de faire entrer  le spectateur dans la psychologie perturbée du personnage en introduisant progressivement le doute sur la véracité de ses dires évoque celle de "Shutter Island", le livre de Dennis Lehane, en attendant le film de Scorsese, dont la sortie a été repoussée d'octobre à février. On comprend mieux alors la voix off qui multiplie au milieu d'un dialogue les commentaires sur la conscience que doivent avoir les ours blancs de la noirceur de leur truffe, même si ces digressions n'aident pas à éclaircir une intrigue bien touffue.

Soderbergh s'est centré autour de ce procéde narratif et du jeu de Matt Damon, mettant à leur service le classicisme de la réalisation, avec des effetsqui évoquent plus les seventies que les années 90 où se situe l'action : photographie tirant sur le marron, titres jaunes ou fuschia au graphisme pop, jusqu'à la musique de Marvin Hamlisch, le compositeur de la B.O. de "L'Arnaque". La confusion voulue sur les différentes péripéties de l'enquête judiciaro-financière peut conduire le spectateur à décrocher par moment, mais on s'aperçoit assez vite qu'il ne s'agit que d'un MacGuffin, puisque le réel sujet du film se trouve dans la personnalité même de Whitacre.

Oeuvre mineure dans la filmographie de Soderbergh, "The Informant !" est quand même un film divertissant, prétexte à une composition assez épatante de Matt Damon, et à une nouvelle réflexion sur le mensonge et l'apparence, thème présent dans l'oeuvre du réalisateur depuis ses débuts.

Cluny
Par Cluny - Publié dans : critiques d'octobre 2009 - Communauté : Cinéma
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