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critiques de février 2007

Vendredi 23 février 2007 5 23 /02 /Fév /2007 20:30

Bug

Film américain de William Friedkin


Interprètes : Ashley Judd (Agnes), Michael Shannon (Peter), Harry Connick Jr. (Jerry Gross)


Durée : 1 h 42




Note : 8/10 


En deux mots : Huis clos étouffant, plongée dans la paranoïa et parabole sur la crédulité de son pays : William Friedkin is back.


Le réalisateur : Né en 1939 à Chicago, William Friedkin a appris le métier sur les plateaux de la télévision, réalisant même un épisode de la série "Alfred Hitchcock présente". Il tourne son premier film sur grand écran en 1967 "Good Time", puis adapte trois pièces de théâtre : "L'Anniversaire", "The Night they raided Minsky" et "Les garçons de la bande". Il rencontre le succès en 1971 avec "French Connection", puis en 1973 avec "L'Exorciste". Il attend quatre ans avant de tourner son film suivant, "Le Convoi de la Peur", un remake du "Salaire de la Peur". Il enchaîne ensuite des films inégaux, revenant parfois à la télévision : "La Chasse" (1980), "Police Fédérale Los Angeles" (1985), "Le Sang du Châtiment" (1988), "Nurse" (1990), "L'Enfer du Devoir" (2000) et "Traqué" (2003).

 

L'histoire : Serveuse solitaire, Agnes habite dans un motel miteux et vit dans la crainte du retour de Joss, son ex-mari qui vient de sortir de prison. Dix ans auparavant, son fils a disparu ; elle l'a cherché pendant des années, et elle n'a renoncé que récemment. Elle accueille Peter, un vagabond mystérieux amené par une copine de boulot. Le lendemain, Joss fait irruption, la frappe et repart en la menaçant de revenir.

Peter s'installe chez Agnes. Le soir où ils font l'amour, Peter se plaint d'avoir été piqué par un aphide, un insecte minuscule. Il lui révèle alors son passé de cobaye de l'armée dans le Golfe, et  réussit à entraîner Agnes dans la traque de ces insectes.


La critique :  Bug, cela signifie insecte. Dans le film de Friedkin, les insectes sont partout, et nulle part à la fois, puisque seul Peter les repère. Au début, Agnes ne les voit pas et se moque même de la phobie de son compagnon ; ce n'est que par la persuasion qu'il réussit à la convaincre de leur présence, et à l'instar de tout un chacun qui se met à se gratter la tête dès qu'il entend parler de poux, elle en arrive à se scarifier pour se débarasser d'eux, ce qui est un moindre mal par rapport à l'automutilation que pratique Peter (âmes sensibles, s'abstenir !).


La force de Friedkin, c'est de placer le spectateur dans la même situation que celle d'Agnes. Après tout, comparé aux autres personnages (une serveuse dépressive et un ex-taulard violent), Peter à son arrivée a l'air calme et raisonnable, et même s'il semble auréolé d'un mystère et porteur de quelque chose de douloureux, on comprend qu'après toutes les épreuves qu'elle a traversées, Agnes ait eu besoin de se réfugier sous son aile. Quand il commence à pourchasser les bestioles, on peut accepter ses explications : qui a déjà vu un aphide ? Seules quelques images subliminales d'insectes nous annoncent que les bugs ne sont peut-être ceux dont on parle.


Car bug, cela signifie aussi une anomalie de fonctionnement d'un programme, depuis qu'un papillon nocturne s'est pris dans l'ordinateur d'Harvard en 1946, inspirant le cafard qui transforme de nom de Tuttle en Buttle dans "Brazil". Et le film nous parle du bug mental que représente la paranoïa, comment un petit fait peut entraîner en cascade une série de dysfonctionnements jusqu'à l'implosion de tout le système. Les insectes sont ici une métaphore de la maladie mentale, insidieuse et douloureuse à la fois.


De la paranoïa, le film reprend deux caractéristiques : l'enfermement et la structuration. L'enfermement, puisqu'à l'exception d'une ou deux scènes, tout se passe dans le studio du motel (hommage à "Psychose", de son modèle Hitchcock et autre grand film sur la paranoïa ?). William Friedkin retrouve ainsi le huis clos qui marquait la dernière demi-heure de "L'Exorciste", et sa mise en scène réussit à renouveler en permanence la façon de capter cette claustration - même s'il utilise des techniques surannées comme les zooms avant.


La structuration, à la fois dans le découpage et l'évolution du décor jusqu'à cette alu-cinante chambre de décontamination digne de Lynch ou de Cronenberg, et dans la logique implacable du discours délirant du complot, culminant dans le monologue d'Agnes où elle intègre dans une cohérence implacable les mutations génétiques, Timothy McVeigh (l'auteur de l'attentat d'Oklahoma City) et Unabomber. Risible et terrifiant, surtout dans un pays qui a gobé sans sourciller la fable des armes de destruction massive.


William Friedkin explique : "Dans Bug, il y a bien entendu les insectes, la paranoïa rampante, mais c'est surtout l'histoire d'une personne qui prend l'ascendant sur l'autre et qui la contrôle". Cette prise de pouvoir est filmée magistralement, d'autant plus que les procédés utilisés par Peter vis-à-vis d'Agnes sont les mêmes qu'emploie Friedkin vis-à-vis du spectateur (ne pas montrer, juste persuader), et Ashley Judd donne corps avec l'énergie du désespoir à ce personnage écorché - du sens figuré au sens propre. Construit sur un crescendo haletant, "Bug" est le film drôle et effrayant d'un malicieux jeune homme de 68 ans, qui a réussi à créer une atmosphère proche de celle de deux cinéastes qu'il déclare admirer, Clouzot et Haneke.


Cluny

Par Cluny - Publié dans : critiques de février 2007 - Communauté : Cinéma
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Mardi 20 février 2007 2 20 /02 /Fév /2007 22:51

Film américain de Clint Eastwood


Titre original : Letters from Iwo Jima


Interprètes : Ken Watanabe (Le général Kuribayashi), Kazunari Ninomiya (Saïgo), Shido Nakamura (Ito)


Durée : 2 h 20




Note : 7,5/10 


En deux mots : Clint Eastwood utilise avec brio tous les canons du film de guerre américain pour raconter la bataille d'Iwo Jima vue par les Japonais.


Le réalisateur : Né en 1930 à San-Francisco, Clint Eastwood a fait de nombreux petits boulots après son retour de l'amée. Il obtient quelques rôles de cinéma avant de figurer dans la série western "Rawhide". C'est avec Sergio Leone et Don Siegel (L'inspecteur Harry) qu'il rencontre le succès. En 1971 il réalise son premier film, "Un Frisson dans la nuit". "Honkytonk Man" (1982) lui vaut une reconnaissance de la critique, avant "Bird" (1988), présenté à Cannes. Son western crépusculaire "Impitoyable" remporte quatre oscars en 1992. Depuis, il enchaîne les succès, tant vis-à-vis du public que de la critique : "Un Monde Parfait" (1993), "Sur la Route de Madison"(1996), "Minuit dans le Jardin du Bien et du Mal" (1998),  "Jugé Coupable" (1999), "Space Cowboys" (2000), "Mystic River" (2003), "Million dollar Baby" (2005) à nouveau récompensé à la cérémonie des oscars. Il tourne enfin deux films sur la bataille d'Iwo Jima : "Mémoires de nos Pères", vu du côté des Américains, et "Lettres d'Iwo Jima" vu du côté des Japonais.

 

L'histoire : Après la destruction de la flotte impériale dans la bataille des Mariannes, les Américains peuvent se lancer à la conquête du Japon. Le premier morceau du territoire nippon est un ilôt désertique, Iwo Jima, qui présente pourtant un intérêt stratégique primordial. Le Général Kuribayashi est nommé à la tête de la garnison de 20 000 hommes qui n'ont aucun espoir de victoire ni de survie face à la supériorité numérique et matérielle des Américains. Devant faire face aux querelles entre les différentes armes et à l'opposition d'une partie de ses officiers qui ne comprennent pas sa stratégie de défense de l'île à partir des galeries qu'il fait creuser, il réussit à galvaniser ses troupes et à installer ses défenses qui permettront aux Japonais de résister 40 jours.


La critique :  Deuxième volet du diptyque consacré à cette bataille déterminante pour le sort de la guerre du Pacifique, "Lettres d'Iwo Jima" sort quatre mois à peine après "Mémoires de nos Pères" consacré au point de vue des Américains. J'avais assez peu aimé le premier opus, reprochant au scénario de Paul Haggis de se perdre dans un va et vient permanent entre la bataille et l'après-guerre, tout cela pour dénoncer de façon bien démonstrative la récupération politique de l'héroïsme des boys.


Le volant Japonais ne tombe pas dans ce travers, et respecte à la fois l'unité de temps et l'unité de lieu. Le film est découpé de façon très classique en deux parties à peu près égales consacrées respectivement à la préparation et au combat lui même, un peu comme dans "Les sept Samouraïs". La première partie permet de découvrir les deux personnages principaux, à l'opposé de la hiérarchie et pourtant unis par le sort réservé à leurs lettres : le général Kuribayashi et Saïgo, le boulanger devenu soldat. Elle nous fait aussi comprendre qu'au delà du sentiment partagé du devoir patriotique et du sens du sacrifice, l'armée japonaise est traversée par des corporatismes (la marine contre l'armée de terre) et des antagonismes (les deux officiers capables de montrer un peu de compassion et d'humanité ayant comme par hasard tous les deux vécu aux Etats-Unis).


Unité de lieu ensuite ; à part quelques flash-back fugitifs, destinés à éclaircir le passé des personnages et à montrer le militarisme et le contrôle policier de l'arrière, toute l'action se passe sur les quelques kilomètres carrés de ce bout de rocher, ou plutôt en dessous, puisque la plupart des scènes se déroulent dans les grottes creusées pour résister au pilonnage de l'île. Ce huis-clos permet de maintenir la tension dramatique, et mon évocation de Kurozawa n'est pas fortuite, si l'on pense par exemple à la communauté de destin entre les sept samouraïs et les défenseurs d'Iwo Jima, ainsi qu'à une façon de cadrer et d'éclairer les visages qui rappelle celle du réalisateur de "Rashomon".


"Mémoires d'une Geisha" était le premier film américain destiné au grand public tourné entièrement avec des acteurs asiatiques, mais il était quand même joué en anglais. Là, Clint Eastwood va au bout de la démarche et "Lettres d'Iwo Jima" vient de recevoir le Golden Globe du meilleur film en langue étrangère. "Tora, Tora, Tora" de Richard Fleisher et Kinji Fukasaku avait introduit la vision japonaise dans un film de guerre américain. Mais l'approche d'Eastwood est encore plus radicale, en consacrant tout un film au point de vue de l'ennemi ; et cette approche est d'autant plus intéressante quand on se rappelle que les Etats-Unis sont engagés aujourd'hui dans un autre conflit. Et quand le réalisateur raconte :"J'ai fait ces deux films en hommage à l'homme moyen. La moyenne d'âge des soldats américains était de 19 ans, celle des Japonais n'était pas très différente", cela renvoie à la jeunesse des soldats envoyés en Irak.


Malheureusement, on retrouve deux éléments qui m'avaient dérangé dans "Mémoires de nos Pères" : la photographie délavée aussi belle que la version colorisée de "La Vache et le Prisonnier", et la caméra parkinsonienne des scènes de combats, figure de style obligée depuis "Il faut sauver le soldat Ryan" (Spielberg est d'ailleurs le coproducteur de "Lettres d'Iwo Jima"). A ces défauts, j'ajouterai le reproche d'un certain manichéisme dans la peinture de l'opposition des bons, dont la nature généreuse se cristallise dans l'aide apportée à un GI blessé, et des méchants qui nous feraient prendre le capitaine Yonoi dans "Furyo" pour un philanthrope. Reste un beau film de guerre, paradoxalement plus américain par son clacissisme que le premier volet, et une vision de la guerre et des ses horreurs filmée au plus près des hommes, général en chef ou simple trouffion.


Cluny


Par Cluny - Publié dans : critiques de février 2007 - Communauté : Cinéma
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Mercredi 14 février 2007 3 14 /02 /Fév /2007 20:46

Film américain de Steven Soderbergh


Interprètes : George Clooney (Jacob Geismar), Cate Blanchett (Lena Brandt), Tobey Maguire (Tully)


Durée : 1 h 45




Note : 7/10 


En deux mots : Exercice de style plastiquement très réussi mais narrativement un peu mou.


Le réalisateur : Né en 1963 à Atlanta, Steven Soderbergh réalise un court-métrage, "Winston", qui lui permet de tourner son premier long-métrage "Sexe, mensonge et vidéo", qui obtient la Palme d'Or en 1989. Loin de tourner des films commerciaux, il réalise des films expérimentaux, comme "Kafka" (1991), "King of the Hill" (1993) ou "Schizopolis" (1996). Avec "Hors d'atteinte"en 1998, il tourne avec George Clooney avec lequel il va produire de nombreux films. En 2000, il a deux films nommés aux oscars "Erin Brokovitch" et "Traffic". Il réalise ensuite "Ocean Eleven" (2001) et "Ocean Twelve" (2004), avant de tourner un film expérimental, "Bubble".

 

 

L'histoire : Juillet 1945. Dans Berlin dévasté, le correspondant de guerre Jake Geismar débarque pour couvrir la conférence de Postdam. Il a pour chauffeur Tully, petit magouilleur cynique qui s'enrichit grâce au marché noir, et dont la compagne Lena est une ancienne maîtresse de Jake. Tully essaie de vendre aux soviétiques Emil, le mari de Lena pourtant déclaré mort depuis plusiseurs mois ; mais peu après on retrouve son corps dans le secteur russe. Entre les mensonges de Lena et les pressions des différents services de l'armée américaine, Jake mène son enquête et découvre bien vite que l'enjeu de cette chasse à l'homme est la transition entre la guerre qui vient de s'achever et la guerre froide qui s'annonce.


La critique :  Le début du film est à l'image de la bande-annonce, dans le respect des canons du film d'espionnage de l'immédiate après-guerre, du côté du "Troisième Homme" ou de "Notorious" : un héros blasé qui se prend une rouste tous les quarts d'heure, un femme fatale au passé trouble, des anciens nazis, des Américains et des Russes qui préparent le passage du statut d'alliés à celui d'adversaires, et surtout une intrigue emberlificotée.


Tout cela est filmé avec une caméra d'époque dans un superbe noir et blanc, avec des cadrages en plongée et en contre-plongée qui mettent en valeur les ruines des habitations de la bourgeoisie prussienne et un travail de la lumière digne de l'expressionisme allemand. C'est beau, c'est bourré de clins d'oeil aux grands cinéastes de cette période... et c'est assez vide.


La faute à une reconstitution peut-être trop soignée, avec des acteurs engoncés dans des uniformes impeccables ou des robes glamour, et à une intrigue opaque et légèrement répétitive ; quant aux personnages, ils ont du mal à exister au-delà du cliché : Clooney en détective victime d'une manipulation qui le dépasse, Cate Blanchett en épouse juive d'un officier SS, Tobey Maguire en une petite crapule prospérant dans le marché noir.


Et puis, quand l'intrigue se précise, le film prend enfin du sens : ce qui est en jeu dans cette chasse à l'homme entre les zones américaines et soviétiques, ce n'est pas tant de découvrir qui de l'ouest ou de l'est mettra la main le premier sur les savants d'Hitler, mais bien la question morale de savoir si ces transfuges peuvent se payer au prix de l'amnistie des pires crimes. Question posée à toute l'humanité, et question posée intimement à Jake dans une scène copie conforme de la scène finale de "Casablanca" : peut-il oublier au nom de son amour pour Lena ce qu'elle a fait pendant la guerre ?


Cluny


Par Cluny - Publié dans : critiques de février 2007 - Communauté : Cinéma
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Lundi 12 février 2007 1 12 /02 /Fév /2007 21:56

Film français d'Olivier Dahan


Interprètes : Marion Cotillard (Edith Piaf), Gérard Depardieu (Louis Leplée), Pascal Greggory (Louis Barrier), Sylvie Testud (Momone)


Durée : 2 h 20




Note : 7/10


En deux mots : Reconstitution foisonnante et parfois un peu pataude de la vie de Piaf, portée par la môme Cotillard, éblouissante.


Le réalisateur : Né en 1967 à la Ciotat, Olivier Dahan suit une formation de plasticien à l'Ecole d'Art de Marseille. Il réalise des clips pour IAM, Mc Solaar, les Cranberries et Zucchero. En 1994, il tourne son premier film pour la série "Tous les Garçons et les Filles de leur âge" d'Arte, "Frère". En 1997, il passe au grand écran avec "Déjà mort", avant de tourner "Le petit Poucet" en 2001, "La Vie promise" en 2002 et "Les Rivières pourpres 2" en 2004.

 

L'histoire : Abandonnée par sa mère partie chercher la gloire, la petite Edith est placée par son père chez sa grand-mère, tenancière d'un bordel en Normandie. Chouchoutée par ces dames, la môme vit comme un déchirement le moment où son père vient la récupérer pour qu'elle le suive dans sa vie de contortionniste. A 20 ans, elle chante dans les rues avec sa copine Momone quand elle est repérée par Louis Leplée qui la fait débuter dans son cabaret et lui donne son surnom de "Môme Piaf". Mais l'assassinat de Leplée, porté au crédit des relations d'Edith dans le milieu lui vaut d'être rejetée de partout. Raymond Asso la prend alors sous sa coupe, et la transforme : c'est le debut du succès.


La critique :  Les producteurs qui ont misé sur ce film (Alain Goldman notamment) ont sans doute voulu surfer sur la vague  des "Biopics" comme "Ray" ou "Walk The Line". Parmi les figures imposées de ces biographies venues d'outre-Atlantique, on retrouve la place accordée aux traumatismes de l'enfance et le rôle de la drogue dans la déchéance du personnage. Là s'arrête la comparaison, car malgré la proportion de scènes se déroulant aux Etats-Unis (volonté de le vendre  là-bas ?), il s'agit d'un film bien français.


Par la nature même du cadre de l'histoire tout d'abord, et surtout par le traitement qui en est fait. Olivier Dahan est un plasticien de formation, et son univers visuel particulier marquait déjà "Le petit Poucet". Ici, il louche du côté de Brassaï, de Francis Carco et du réalisme poétique du cinéma français d'avant-guerre, et ses maisons closes, ses caboulots et ses cabarets évoquent plus des décors de théâtre que des reconstitutions naturalistes.

Par les personnages ensuite, qui sont ceux de l'histoire de la France du siècle dernier : Cerdan, Cocteau, Coquatrix, Marlène Dietrich, même si la grande histoire n'effleure jamais le scénario, la seule évocation de la seconde guerre mondiale étant l'uniforme de piou-piou de Michel Emer venu lui présenter son "Accordéonniste". Ce défilé des guest-stars n'est pas toujours filmé avec la légèreté nécessaire, et cela nous vaut des dialogues du style "C'est grâce à la puissance de la radio, mon cher Coquatrix ! - Mais aussi au charme du Music-hall, mon cher Canetti !"


Olivier Dahan a choisi de raconter la vie de Piaf avec des flash-backs imbriqués les uns dans les autres ; cela a le mérite de rompre avec une linéarité trop conventionnelle, mais il en use malheureusement un peu trop pour faire des raprochements didactiques entre ces différentes périodes et expliquer par le montage, au cas où cela nous aurait échappé, que l'amour de la chanson, découverte dans la bouche d'une fille de joie, n'a fait que suppléer l'absence d'amour d'une mère... On frise même parfois le ridicule comme l'apparition de Sainte-Thérèse, heureusement plus papillonnante et moins sulpicienne que celle de Jésus dans "World Trade Center", ou la répétition des scènes d'alcoolisme d'Edith et surtout de Momone. Mais il y a aussi des passages très réussis, comme la rencontre entre Edith et Marcel, ou le plan-séquence de cinq minutes au moment de l'annonce de la mort de Cerdan.


Reste LA question : et Marion Cotillard ? La réponse est claire : à elle seule, elle justifie le déplacement pour aller voir "La Môme". On a beaucoup parlé des six heures quotidiennes de maquillage ou du travail de coaching autour de la voix. C'est vrai, c'est impressionnant, et en arrive à oublier le visage même de Cotillard ; mais le plus époustouflant est certainement la cohérence de l'ensemble. Je ne sais pas si Piaf avait cette démarche cassée dès la jeunesse, si son parler était aussi gouailleur ; cela n'a pas d'importance, car Marion Cotillard impose sa vision du personnage, et particulièrement toute sa gestuelle : le fait d'avoir dû laisser sa voix à Piaf sur les chansons explique peut-être pourquoi et comment elle a adopté ce jeu proche de celui du cinéma muet.


Elle a déclaré "Quand vous faites une composition comme cela, la frontière est très fine entre le trop et le pas assez. Un peu trop, vous êtes ridicule ; pas assez, vous êtes en dessous de l'énergie de Piaf." Une ou deux fois, elle est peut-être dans le un peu trop, mais cela passe justement grâce à cette énergie qui nous emporte. Destiné au grand public et promis au succès au box-office, "La Môme" a toutes les qualités et les défauts d'un film populaire ; la composition de Marion Cotillard en fait quelque chose de plus, à l'instar d'un "Rain Man" ou d'un "Monster" où ce qui reste longtemps après avoir vu le film est le souvenir d'une performance exceptionnelle.


Cluny


Par Cluny - Publié dans : critiques de février 2007 - Communauté : Cinéma
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Vendredi 9 février 2007 5 09 /02 /Fév /2007 21:32

Film américain de David Lynch


Interprètes : Laura Dern (Nikki/Sue), Justin Theroux (Devon/Billy), Jeremy Irons (Kingsley), Harry Dean Stanton (Freddy)


Durée : 2 h 52




Note : 7/10 (Mais j'ai hésité entre 2 et 9,5...)


En deux mots : Si on perçoit "INLAND EMPIRE" comme une expérience sensorielle plus que comme un film, on peut se laisser entraîner.


Le réalisateur : Né en 1946 dans le Montana, David Lynch tourne son premier film en 1976, "Eraserhead", qui est devenu depuis un film-culte. Mel Brooks lui confie en 1981 la réalisation de "Elephant Man", qui obtient huit nominations aux oscars. Suivent "Dune" (1985), "Blue Velvet" (1987), et "Sailor et Lula" qui obtient la Palme d'Or à Cannes en 1990. La même année, il réalise la série télévisée "Twin Peaks". Il tourne ensuite des films aussi différents que "Lost Highway" (1997), "Une Histoire simple" (1999) et "Mullholland Drive" (2001).

 

L'histoire : Dans la grande banlieue de Los Angeles, surnommée Inland Empire, l'actrice Nikki Grace reçoit la visite d'une voisine, inquiétante imprécatrice. Elle va tourner un film avec l'acteur Devon Berke, et leurs personnages, Sue et Billy, leur ressemblent étrangement. En Pologne, une femme se fait tabasser. Sur une scène, des personnages à têtes de lapin débitent une réplique par minute, déclenchant des rires enregistrés...


La critique :  Au bout de plus de deux heures de film, Laura Dern (je dis Laura Dern, car ça faisait longtemps que je ne savais plus si elle était Nikki ou Sue) proclame : "On ne sait plus si on est avant ou après, c'est ça qui nique la tête". Avis partagé par la bonne dizaine de spectateurs qui ont quitté la salle avant la fin, je n'avais pas assisté à un tel exode depuis "Les Valseuses".


De nombreux critiques ont dit d'"INLAND EMPIRE" (David Lynch tient aux majuscules) qu'on n'avait que deux possibilités : adorer ou détester. Choix réducteur, en tout cas pour moi, puisque je suis ressorti surtout perplexe, et qu'encore maintenant, j'ai du mal à dire si j'ai aimé ou pas. Je ne fais pas partie de ces gens qui iront voir le film 17 fois et qui s'enorgueilliront d'être capables de reconstituer l'entrelac narratif entre Hollywood, la Pologne et le théâtre aux lapins. Je ne me retrouve pas dans cette démarche sectaire ; je pense qu'un film est fait pour être vu une fois, même si après on peut prendre plaisir à le revoir ou même à chercher à comprendre comment il a été réalisé.


David Lynch explique : "Un film, c'est une expérience subjective. Je dirai donc aux gens d'entrer dans ce monde, de vivre cette expérience et de voir ce qu'ils en retiennent." Regarder ce film avec son cerveau gauche serait donc bien une erreur, et la volonté cartésienne de comprendre le récit ferait écran à la perception de cette "expérience". Vu comme cela, "INLAND EMPIRE" offre des sensations assez étonnantes, et on pense par moment à Kubrick et à Von Trier. Le choix de filmer en numérique avec une caméra video portée par David Lynch ou l'absence d'éclairage le rapprochent d'ailleurs du Dogme, dont il se distingue cependant par l'utilisation très lynchienne de la musique.


Dans ces presque trois heures d'images en vrac, il y a du bon et du beaucoup moins bon ; ce qui fait l'intérêt de certaines scènes, comme l'étirement de l'action, cela même pourra être à la limite de l'insupportable et du ridicule dans la suivante. Objet filmique non identifié, "INLAND EMPIRE" représente un intérêt plus par la démarche que par le résultat obtenu, et on ne peut s'empêcher de souhaiter qu'une fois cette recherche faite, David Lynch revienne à un format plus accessible.


Cluny


Par Cluny - Publié dans : critiques de février 2007 - Communauté : Cinéma
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