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critiques de juillet-août 2009

Samedi 29 août 2009 6 29 /08 /Août /2009 17:56

Film français de Jacques Audiard  

Interprètes : Tahar Rahim (Malik El Djebena), Niels Arestrup (César Luciani), Adel Bencherif (Ryad)



Durée : 2 h 35

Note :  8,5/10

En deux mots : Film passionnant, brillant et étouffant qui nous montre comment la prison fait d'une petite frappe un caïd.

Le réalisateur : Né en 1952 à Paris, Jacques Audiard est le fils du réalisateur et dialoguiste Michel Audiard. Après des études de lettres, il commence dans le cinéma comme monteur, puis écrit notamment les scénarios de "Mortelle Randonnée" et "Baxter". En 1994, il réalise son premier film, "Regarde les Hommes tomber" qui remporte le César du premier film et le Prix Louis Delluc ; il tourne ensuite "Un Héros très discret" (Prix du meilleur scénario à Cannes) en 1996, "Sur mes lèvres"(César du meilleur scénario en 2001), et "De battre mon coeur s'est arrêté" (8 Césars en 2005, dont celui du meilleur film).

 

Le sujet : Condamné à 6 ans de prison pour coups à agents, Malik arrive en Centrale, illettré et isolé. Repéré par César Luciani, chef du clan des Corses qui régente la prison, il se voit contraint d'égorger un détenu que Luciani veut éliminer. En échange, celui-ci lui offre sa protection. Dans son ombre, Malik fait son apprentissage, en navigant entre Corses, intégristes et ses propres affaires.

La critique : Dans Libération, Jacques Audiard répond à une question sur son film comme charge contre l'administration pénitentiaire française : "C'est la facilité, on rameute le fait de société parce qu'on craint de parler du film. C'est ce qui s'est passé avec Entre les murs. Laurent Cantet n'est pas un journaliste, et pourtant il a fallu qu'il réponde à des questions sur l'école. Bien sûr, l'école est dans son film, mais c'est un cinéaste, et en tant que tel, il a trouvé la métaphore adéquate, sinon son film ne tiendrait pas. J'espère que je ne vais pas devenir le "monsieur prison" du cinéma français."

"Un Prophète" commence juste avant l'incarcération de Malik, par une dernière vision furtive de la liberté à travers le grillage du fourgon cellulaire. Il s'achève six ans plus tard, au moment où il est libéré, et la majorité des 2 h 35 du film se passe entre les quatre murs de la prison reconstituée à Gennevilliers par Michel Barthélémy, à l'exception de quelques escapades lors des permissions du détenu "modèle", et de très brèves évocations d'événements où exceptionnellement, Tahar Rahim n'est pas à l'écran.

Ce que nous montre le film de la prison est terrifiant, en ce que cet endroit où la vie des détenus devrait être réglée par l'administration étatique pour viser à leur future réinsertion est en réalité régi par la loi de la jungle, par l'argent sous toutes ses formes et par les rapports de force. Les gardiens n'y apparaissent que comme des silhouettes, ou comme des partenaires privilégies de Luciani.

Pourtant, Audiard a raison : "Un Prophète" n'est pas un film de prison, un "Prison Break" ou un "Midnight Express" à la française. Ce n'est même pas un film sur la prison, il s'agit juste d'un film où la prison finit par devenir un personnage mais où le récit parle de bien d'autres choses, sur le fond comme sur la forme, que d'une énième dénonciation de l'univers carcéral.

Car même si Jacques Audiard aborde un milieu très différent de la Résistance à la Libération ou des marchands de sommeil, on retrouve finalement le sujet de la plupart de ses films : comment un jeune homme doit se forger une identité dans un milieu exogène, et comment il y parvient par le biais d'un père étranger. Quand Malik arrive à la centrale, il ne sait ni lire ni écrire, et répond, terrorisé, par de simples mots-phrases. Quand il en ressort, il a trois voitures luxueuses qui attendent pour escorter le nouveau caïd.

Il a su profiter mieux que les autres du peu de formation qu'offre la prison : il a appris à lire et à écrire, mais comme il a aussi appris à mentir et à tricher, il s'en sert aussitôt pour apprendre le corse avec un dictionnaire afin de comprendre ce que se disent Luciani et ses lieutenants. Il a aussi vite compris la subtile géopolitique qui structure les fragiles équilibres de la centrale, et comment jouer les uns contre les autres.

Même si parfois les arcanes de ces manigances deviennent dures à suivre, le parcours de Malik et les risques qu'il prend pour asseoir son propre pouvoir suffisent à rendre passionnantes les 155 minutes du film, d'autant que Jacques Audiard ne se cantonne pas à un registre naturaliste ; il y a de brèves scènes oniriques à la lisière du fantastique qui s'inscrivent dans le récit, comme la présence du fantôme de celui qu'il a égorgé sur commande, ou la vision de biches dans l'arrière-pays marseillais.

Il utilise aussi bien d'autres outils du cinéma pour créer et maintenir la tension de ce récit implacable : ouvertures et fermetures au noir evanescentes, découpage en chapitres, utilisation de la musique (et de toute l'ambiance sonore) tranchant avec le remplissage redondant de la production moyenne : certaines scènes trouvent leur pulsation par la musique d'Alexandre Desplats, alors que d'autres qui auraient eu droit ailleurs à la dose usuelle de violons se déroulent avec les seuls bruits de la prison et trouvent tout leur ressort dramatique dans le seul langage de l'image.

Par ce travail formel remarquable, il atteint totalement son objectif ainsi définit dans Libé : "Il y a un rapport avec l'histoire du cinéma, ce qu'on appelait la cinéphilie, qui est mort. Très modestement et très immodestement, je crois que le cinéma doit proposer de nouveaux modèles et de nouvelles formes. J'étais inquiet d'en finir avec mes films précédents par crainte de m'installer dans la répétition, l'académisme."

Quelques mots sur les acteurs : au milieu de figurants pour beaucoup recrutés parmi d'anciens taulards et qui renforcent la crédibilité du récit, on trouve Tahar Rahim, dont Libé a très justement résumé ainsi la formidable présence : entre l'Enfant Sauvage de Truffaut et le Scarface de De Palma. Niels Arestrup lui donne la réplique en tyran corse implacable, tour à tour charmeur et halluciné, toujours menaçant.

Reste à attendre "Le Ruban blanc", pour comprendre pourquoi ce film fulgurant n'a pas obtenu la Palme d'Or que beaucoup lui voyait  promise ; réponse le 21 octobre.

Cluny  
Par Cluny - Publié dans : critiques de juillet-août 2009 - Communauté : Cinéma
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Vendredi 21 août 2009 5 21 /08 /Août /2009 15:22
Film américain de Quentin Tarantino 
 
Interprètes : Brad Pitt (Lt Aldo Raine), Christoph Waltz (Colonel Hans Landa), Mélanie Laurent (Shosanna Dreyfus), Diane Kruger (Bridget Von Hammersmarck

Durée :
2 h 33 


Note :
  6,5/10 

En deux mots :
Tarantino pense que le cinéma peut vaincre le nazisme, et invente le nazixploitation spaghetti : bavard et souvent proche du dérapage. 

Le réalisateur :
 Né en 1973 à Knoxville, Quentin Tarantino assouvit sa passion des séries B en travaillant dans un videoclub. Il vend les scripts de "True Romance" et "Tueurs Nés", et avec l'argent il réalise "Réservoir Dog" en 1992. Son second film, "Pulp Fiction", obtient la Palme d'Or en 1994. Suivent "Jackie Brown" en 1997, "Kill Bill 1" en 2003 et "Kill Bill 2" en 2004. Il signe en 2007 un des deux volets des films Grind House, "Boulevard de la Mort". 

Le sujet :
En 1940, le colonel SS Hans Landa, surnommé le "Chasseur de Juifs", élimine toute la famille Dreyfus, à l'exception de Shosanna qui réussit à s'enfuir. Trois ans plus tard, Shosanna est devenue propriétaire d'un cinéma à Paris. Remarquée par un héros de la Wermacht, Zoller, elle voit son cinéma désigné par Goebbels pour accueillir la première du film consacré aux exploits du sniper. Elle projette alors de mettre le feu au cinéma au milieu de la projection, à laquelle Hitler a prévu de participer. Mais elle ne sait pas qu'un commando de juifs américains commandé par le Lieutenant Raines et spécialisé dans l'élimination des nazis, s'est vu attribuer la même mission.


La critique : Voici donc le tant attendu "Inglorious Basterds", rentré bredouille de Cannes à l'exception du Prix d'interprétation (mérité) pour l'acteur autrichien Christoph Waltz. Suite à l'accueil mitigé de la Croisette, Tarantino a refait le montage, rajoutant notamment quelques scènes.

Il a juste oublié une chose : le relatif échec de ses bâtards sans gloire ne s'explique pas par un simple problème de structure narrative ou de rythme, mais par le sujet même du film et son traitement. Dans son interview à Libération, Quentin Tarantino déclare : "L'idée est toute simple : le cinéma a foutu par terre le III° Reich ! C'est une idée foutrement agréable à manier."

Rendons lui justice : il montre de la cohérence et va jusqu'au bout de son idée. Quand Zoller aborde Shosanna, c'est parce qu'elle affiche le nom d'un film au fronton de son cinéma ; quand les Alliés cherchent un spécialiste pour guider les Basterds, c'est à un cinéphile amateur du cinéma de Pabst qu'ils s'adressent ; et quand Shosanna a besoin d'un matériel inflammable pour carboniser le gotha du Reich de mille ans, c'est bien naturellement aux films au nitrate qu'elle pense.
 
La malaise qui naît du traitement d'un tel sujet ne provient pas des libertés prises avec l'Histoire ; après tout, comme le dit Tarantino avec sa logique implacable, "Mes personnages changent le cours de la Seconde Guerre Mondiale parce que justement, ils n'existent pas." On accepte bien les romans de Philip K. Dick, de Robert Harris ou de Philippe Roth basés sur un parti pris uchronique. Non, ce sentiment de trouble vient sans doute du télescopage de la liberté que s'accorde le réalisateur et des apparences de réalité qu'impose tout le décorum d'un film de ce genre ; on peut joyeusement faire éclater des têtes de prisonniers désarmés à coup de batte, les scalper ou leur graver une croix gammée sur le front puisque ce sont les Méchants, et qu'en plus, ils n'existent pas.

Cette complaisance pour la violence et sa chorégraphie a toujours existé chez Tarantino, et je n'avais pas évoqué la réalité des traditions des samouraïs pour analyser le duel délirant de "Kill Bill". Mais là, nous étions dans la parodie-hommage aux films de sabre ; dans "Inglorious Basterds", il ne cherche pas vraiment à s'inspirer des films de guerre du style "Les Canons de Navarone" ou "Un Pont trop loin" ; certes, l'idée de départ provient des "Douze Salopards", mais en réalité, l'inspiration est plutôt à chercher du côté de Sergio Leone, que Tarantino désigne comme son réalisateur préféré.

Le prologue du film, intitulé "Il était une fois la France occupée par les nazis", s'ouvre sur une musique western, avec un paysan français au nom improbable (Perrier LaPadite) qui coupe du bois avec la dégaine de Charles Ingalls pendant qu'arrivent au loin les Allemands. Suit un long jeu du chat et de la souris entre le colonel Landa et le paysan, avec un dialogue destiné à prendre place au Panthéon des grandioses bavardages tarantinesques aux côtés de celui sur le Quater Pond et le Big Mac dans "Pulp Fiction", avant que n'éclate brutalement la violence annoncée par une musique stridente.

Car cela peut sembler paradoxal pour un film d'action -mais pas pour un Tarantino-, ça cause beaucoup, et vraiment longtemps, entre deux brèves scènes d'action, et ces interminables causeries finissent par se ressembler toutes, sans compter qu'elles évoquent d'autres scènes du même type dans les films précédents. Dans le paquet, il y a certes quelques bons mots : "J'adore les rumeurs", révèle Hans Landa avec un air de midinette ; "On est très fan de votre boulot", déclare Raine à un Allemand qui a exécuté à mains nues un paquet de gestapistes ; "Je suis française, nous respectons les réalisateurs" proclame Shosanna, renvoi d'ascenseur du Palmé d'Or et Président du Jury du Festival de Cannes.

Cela n'empêche pas qu'une nouvelle fois après d'innombrables productions américaines, la représentation de la France fleure bon l'image d'Epinal hollywoodienne : fronton du cinéma "Le Gamaar"(Ca devait être le Garmar, mais le décorateur a "merdé", dixit Q.T.) typiquement américain, bar "La Louisiane" dans le village "Nadine"...

Il y a quand même quelques belles trouvailles, comme le plan de l'amas de pellicules au nitrate prêtes à s'enflammer derrière l'écran où s'entassent les munitions tirées par Zoller, ou le visage de Shosanna qui se reflète, déformé et imprécateur, sur la fumée de l'incendie. Mais cela ne suffit pas pour renouveler une oeuvre qui a tendance à bien tourner en rond alors qu'il ne signe ici que son septième film.

Cluny 
Par Cluny - Publié dans : critiques de juillet-août 2009 - Communauté : Cinéma
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Samedi 15 août 2009 6 15 /08 /Août /2009 11:33

Film palestinien d'Elia Suleiman

Titre original : The Time that remains 

Interprètes : Saleh Bakri (Fuad), Yaszmine Hadj (Nadia), Elia Suleiman (Elia)



Durée : 1 h 45

Note :  8/10

En deux mots : Histoire subjective et sensible de la Palestine, à travers un hommage émouvant au père et à la mère du réalisateur.

Le réalisateur : Né en 1960 à Nazareth, Elia Suleiman est forcé de quitter la Palestine occupée par les Israeéiens et s'installe à New York de 1982 à 1993. Il y réalise des courts métrages, dont un documentaire sur la vision des Arabes à la télévision américaine. En 1996, son premier long métrage, "Chronique d'une disparition", obtient le prix du meilleur premier film à Venise. En 2002, son second film, "Intervention divine", reçoit le Prix du Jury à Cannes.

 

Le sujet : En 1948 à Nazareth, tandis que le maire de la ville capitule devant les Israéliens, Fuad se fait tabasser pour avoir porté secours à un blessé. En 1970, il vit toujours à Nazareth avec sa femme et son fils Elia, allant à la pêche avec un ami et sauvant régulièrement son voisin, pompiste dépressif de l'immolation, tandis qu'Elia se fait gronder pour ses propos anti-impérialiste par son maître dans l'école qui accueille les Arabes israéliens comme lui.


La critique : Dans le dossier de presse, Elia Suleiman explique : "Je ne veux pas délivrer un truisme, mais d'une certaine façon le libéralisme décide du positionnement des médias, qui attendent du cinéaste qu'il délivre une information. Mes films sont à l'opposé de cela, ils en sont même la négation. Personne ne m'a attendu pour connaître les événements qui se sont produits en 1948, le 1948 que je montre n'est jamais que "mon" 1948." Cette démarche paraît évidente à la vision du film, tant la façon de raconter 60 ans de vie en Cisjordanie occupée par les Isaréliens se fait au travers du double prisme de la mémoire du réalisateur, et de la vision qu'il a pu se faire des récits de son père.

Le film est découpé en quatre parties : 1948, date de l'indépendance d'Israël et début de l'occupation pour les Palestiniens ; 1970, date de la mort de Nasser et de la fin de l'illusion de l'unité arabe ; 1980, au lendemain des accords de Camp David : et aujourd'hui, en pleine seconde intifada. Mais cette dimension historique n'apparaît qu'en arrière-plan, grâce à des scènes là encore marquées par la subjectivité : une chorale d'écoliers arabes israéliens recevant le prix du concours de chant hébraïque, la police perquisionnant et prenant un plat de boulghour pour de l'explosif, la mention dans une lettre de la mère de la délivrance du permis de chasse à Fuad, 32 après le début de l'occupation.

Les scènes de 1948, reconstituées à partir du récit du père magnifié par le souvenir du fils, semblent échappées d'un album de Tintin, jusqu'à la couleur jaune de l'avion israélien qui pourchasse la voiture. Le dynamisme de ce découpage très visuel est dû en grande partie au choix de cadrage et au sens du montage qui justifie une de mes grandes théories : pas besoin de mettre une caméra sur des grues sophistiquées pour créer le mouvement. Car dans "Le Temps qui reste", il n'y a que des plans fixes ; certes de nombreuses scènes sont tournées à bord de voitures, mais ce sont alors les véhicules qui bougent, pas la caméra.

Cette dimension naïve, presque enfantine, se trouve renforcée par la direction d'acteurs, proche du cinéma muet. Les plans commencent souvent avec un personnage immobile au milieu du cadre, fixant les spectateurs, avant de se lancer dans une diatribe comme le voisin dépressif avec ses théories ponctués de grossièretés, ou Elia lui-même, enfant, adolescent ou adulte, enfermé dans un mutisme keatonien.

Car le sous-titre de film est : "Chronique d'un présent-absent". Comme son père très actif, voire activiste, en 1948 devient par la suite enfermé dans le silence et les activités statiques (pêcher, boire un coup avec les voisins), Elia semble comme absent de sa propre vie, simple témoin de la condition de minorité de son peuple sur sa terre. Sa mère, qui ponctue en 1970 et 1980 le film par ses lettres à sa famille émigrée en Jordanie, finit elle aussi par se réfugier dans le même silence, prise en charge par le voisin policier et sa femme asiatique qui joue la garde-malade.

Sur un sujet aussi nostalgique, on pourrait craindre le trop-plein de mélo. Mais la distance gardée avec les personnages, et la dimension absurde, voire burlesque, des situations évitent tout pathos ; au contraire, il y a une légèreté grave qui fait souvent penser à Kaurismäki et à Moretti. Des scènes comme celle des retrouvailles avec ses amis après des années d'exils, filmée comme une chorégraphie sur un air oriental qui adopte le rythme du tango, celle du miltaire israélien annonçant le couvre-feu devant la boîte disco et qui ponctue son message d'un beat de la tête, ou encore le canon du Merkava de Tsahal qui suit le déplacement d'un Palestinien sorti pour vider sa poubelle, toutes ces scènes apportent un note poétique qui soulignent l'absurdité de la situation.

Je n'avais pas vu les deux premiers films d'Elia Suleiman. Je confesse que je suis allé voir "Le Temps qui reste" un peu dans l'idée de rajouter un pays à la liste des critiques clunysiennes. J'avoue aussi que par exemple, j'ai toujours trouvé une forme de maladresse démonstrative très datée aux films de Youssef Chahine. Ce fut donc pour moi une excellente surprise que de découvrir une oeuvre accomplie, où un réalisateur utilise avec intelligence et grâce tous les moyens du cinéma pour émouvoir, raconter et inciter à réfléchir.

Cluny
Par Cluny - Publié dans : critiques de juillet-août 2009 - Communauté : Cinéma
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Dimanche 9 août 2009 7 09 /08 /Août /2009 18:51

Film américain de James DeMonaco

Titre original : Staten Island

Interprètes : Vincent d'Onofrio (Parmie), Ethan Hawke (Sully), Seymour Cassel (Jasper)



Durée : 1 h 36

Note :  7/10

En deux mots : Premier film assez réussi à la construction tarantinienne.

Le réalisateur : Né en 1969 à Brooklyn, James DeMonaco a écrit des scénarios pour Coppola ("Jack", 1996), Gary Gray ("Négociateur") ou Jim Isaac ("Skin Walkers").

 

Le sujet : Dans le quartier new-yorkais de Staten Island, le gangster Parmetto Tarzo, dit Parmie, a décidé de prendre le contrôle de toute l'île, ce qui ne semble pas enthousiasmer ses lieutenants. Sully, vidangeur de fosses septiques, découvre dans une clinique que des modifications embryonnaires peuvent garantir que son futur enfant sera surdoué, et décide de trouver à tout prix les 50 000 $ nécessaires. Jasper, épicier sourd-muet, ne supporte plus le sale travail que lui impose Parmie et sa bande.


La critique : A la lecture du résumé, on peut avoir l'impression de trois histoires sans grands rapports entre elles. D'ailleurs, le film est découpé en trois chapitres distincts, séparés par des intertitres évocateurs : "Le maffieux obstiné et sa quête de gloire éternelle", "L'introspectif vidangeur de fosses septiques" et "L'épicier sourd et muet et ses aventures au pays de la viande froide".

Pourtant, cette construction reprend le principe de "Pulp Fiction" : raconter différents morceaux d'une même intrigue en se fichant de la chronologie, et en montrant un même événement du points de vue des différents personnages. Du coup, chaque épisode éclaire d'un jour nouveau les péripéties vues précédemment, avec comme lien le quartier de Staten Island qui a donné son titre original ; une nouvelle fois, les distributeurs français ont trouvé pertinent de traduire un titre anglais par autre titre anglais... Peur de la confusion avec le "Shutter Island" à venir de Martin Scorsese, ou volonté de capitaliser la notoriété de New York, en récupérant au passage la clientèle de "Little Odessa" ?

Le film commence d'ailleurs par un documentaire en couleurs sixties sur Staten island, dont on nous explique qu'il s'agit du seul quartier de New York à ne pas avoir le droit à des prévisions de températures sur le bulletin météo, le conseil municipal l'ayant oublié quand il a voté les crédits. Puis le commentateur se met à vanter la mixité sociale de l'île, qui accueille des hommes d'affaires, des avocats, et autres professions libérales, mais aussi des pompiers ou des policiers... avant de souligner son exceptionnelle population de maffieux, attirés par ses bois qui facilitent l'enterrement des corps.

On l'a compris, la tonalité est volontairement décalée, avec des personnages plus proches des stéréotypes des films maffieux que de la pure réalité sociologique. Parmie, incarné par un Vincent d'Onofrio d'anthologie, possède tout l'attirail du goodfella : costard blanc, pompes bicolores, lunettes à grosse monture : mais il a aussi son violon d'Ingres : le projet de battre le record d'apnée en piscine, sans doute un reminiscence du personnage de Baleine dans "Full Metal Jacket" ?

Ethan Hawke, méconnaissable, campe le vidangeur magouilleur avec un mélange de suractivité et de fragilité plutôt convaincant, même si une ou deux scènes basculent dans le too much quand il se trouve confronté aux conséquences angoissantes de ses petites affaires. Quant à l'épicier sourd et muet, il est joué brillamment par Seymour Cassel, acteur fétiche de John Cassavettes, à qui James DeMonaco inflige un traitement malicieux mais légèrement grandguignolesque.  

Il y a un certain nombre de scènes savoureuses, filmées avec un sens de la composition qui souligne bien l'intention du réalisateur, comme ces plans de la mère de Parmie en fauteuil roulant s'adressant avec un mégaphone à son fils perché dans un arbre suite à une brusque prise de conscience écologique un brin intéressée, ou la boîte en fer blanc où Jasper collectionne les boutons, macabres trophées de son petit boulot imposé par Parmie.

Tout n'est pas parfait dans ce "Little New York", et certains effets font flop, comme le ralenti sur le le lancer de saucisson ou la rencontre un peu appuyée entre l'aigle et lé néo-écolo maffieux. Mais il y a un véritable sens du rythme, une construction à la fois ambitieuse et futée qui ne tombe pas dans l'exercice de style mais au contraire se met au service d'un intrigue qui fonctionne, et une distribution d'acteurs dont on sent le plaisir à participer à cette aventure qu'est toujours un premier film.

Cluny

 
Par Cluny - Publié dans : critiques de juillet-août 2009 - Communauté : Cinéma
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Dimanche 9 août 2009 7 09 /08 /Août /2009 08:34

Film français de Claude Miller   



Durée : 1 h 37

Note :  5/10

En deux mots : Claude Miller poursuit deux sujets : l'espoir suscité par la candidature d'Obama et les fanfares universitaires, sans réussir à en traiter un à fond.

Le réalisateur : Né en 1942 à Paris dans une famille juive ashkénaze, Claude Miller entre à l'IDHEC en 1962. Il est assistant réalisateur pour Jean-Luc Godard, Robert Bresson ou Jacques Demy, puis directeur de production pour François Truffaut. Après trois courts métrages, il tourne son premier long en 1975, "La meilleure Façon de marcher", puis en 1977  "Dites-lui que je l'aime". Il rencontre son premier grand succès en 1981 avec "Garde à Vue". Suivent "Mortelle Randonnée" (1983), "L'Effrontée" (1985), "La petite Voleuse" (1987), "L'Accompagnatrice" (1992), "La Classe de Neige" (1998), "Betty Fisher et autres histoires" (2001), "La Petite Lili" (2003) et "Un Secret" (2007)

 

Le sujet : A 100 jours de l'élection du 44° président des Etats-Unis, les marching bands de deux universités de Virginie commencent leurs répétitions : celle de la très sélect University of Virginia (UVA), et celle de la Virginia State University (VSU), traditionnellement afro-américaine. Claude Miller suit les activités de ces gigantesques fanfares universitaires et enregistre les attentes et les espérances de leur membres alors que se profile un évènement historique : la possible élection d'un président noir..

La critique : Claude Miller explique ainsi la génèse de son projet : "L'envie est née en voyant "Block Party" de Michel Gondry, documentaire sur un concert donné à New York. Je me suis rendu compte à quel point j'aimais cette tradition des marching bands. Mais je me disais en même temps que ce n'était pas vraiment un sujet de film. Quand la campagne pour les élections présidentielles amériacines a commencé, j'ai eu l'idée de donner la parole à ces jeunes gens composant les marching bands et de leur demander de se positionner par rapport à cet évènement qu'ils étaient en train de vivre." Interview intéressante, car elle résume parfaitement les causes du relatif échec de ce projet.

Première affirmation : les marching bands ne forment pas à eux seuls un sujet de film. Première contestation : si on n'essaie même pas, il y a peu de chance qu'on puisse effectivement réussir à en faire un ; et justement, c'est l'impression que m'a laissée la vision de ce documentaire : on voit des moments de la vie des fanfares (la photo officielle, les répétitions, un match de football US universitaire). mais si on compare à un documentaire récent sur la vie d'une formation musicale, "I feel good", il y manque tout ce qui fait la vie d'un groupe : les espoirs liés au projet, les doutes, les choix difficiles du chef, la rencontre des publics. Paradoxalement, on ne voit jamais ces marching bands défiler !

On devine -et on ne peut que deviner - qu'une formation de 260 membres répéte surtout par pupitres ; on assiste à un charriage d'une joueuse de piccolo par un mastodonte engoncé dans un tuba. Mais ces rapports entre les différentes composantes de la formation (sans parler des cheerleaders) qui peuvent faire penser à l'opposition entre pack et lignes arrières dans une équipe de rugby ne sont qu'effleurés. De même, rien ne nous est dit sur la dimension chorégraphique essentielle de ces groupes ; on interviewe un cadre du band d'UVA et le chef de celui de VSU, mais plus pour les faire parler d'Obama que de la complexité de leur travail.

Deuxième affirmation : donner la parole à ces jeunes et leur demander de se positionner. Ca, ça a été fait; et ça se voit : interview mises en scène de certains membres dans leur ravissant costume, croisement entre celui d'un cadet de West Point, d'un mousquetaire et d'une majorette. Malheureusement, ce qu'ils racontent n'a rien de très passionnant, et on a l'impression de l'avoir vu une bonne centaine de fois en novembre dernier dans les nombreux reportages. Ils sont plus émouvants quand ils parlent de leur appartenance à ce band ("Je fais partie de quelque chose de plus grand que moi", ou "Sans la musique, je pense que je serais en prison") que quand ils dissertent pesamment sur la signification du mot changement.

Claude Miller n'a pas casté les bons personnages, ou bien il n'a pas été capable de trouver un angle d'attaque supplémentaire pour faire le lien entre ses deux sujets. Mon avis est d'ailleurs qu'il aurait sans doute mieux atteint le deuxième en se concentrant sur le premier ; quand sur la photo au premier plan il y a deux noirs (pardon, afro-américains) d'un côté et deux blancs (pardon, caucasiens) de l'autre et que spontanément, l'un dit "faut alterner", cela nous en dit sans doute plus que les interviews figées et téléguidées.

Et puis, étrange choix de distribution que de sortir ce film juste au moment où s'achève l'état de grâce d'Obama, condamné à monter un sommet de la bière pour rattraper son commentaire sur le racisme dans la police. Si "Marching Mand" offrait un point de vue novateur et pertinent (ou impertinent) sur l'élection du premier président noir, ce décalage temporel trouverait sa justification. Faute de cette vision innovante, on a juste l'impression d'une rediffusion estivale d'"Envoyé Spécial".

Cluny
Par Cluny - Publié dans : critiques de juillet-août 2009 - Communauté : Cinéma
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