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critiques de juillet-août 2008

Dimanche 31 août 2008 7 31 /08 /Août /2008 20:50

Film anglais de Mike Leigh

Titre original : Happy-go-Lucky


Interprètes : Sally Hawkins (Poppy), Alexis Zegerman (Zoe), Eddie Marsan (Scott)


Durée : 1 h 58

Note :  6/10

En deux mots : Mike Leigh nous revient avec une comédie un peu longuette sur une jeune femme à l'optimisme horripilant.

Le réalisateur : Né en 1943 près de Manchester, petit-fils d'un miniaturiste juif russe réfugié en Angleterre, Mike Leigh a commencé par étudier le jeu d'acteur à la Royal Academy of Dramatic Art de Londres, avant de suivre les cours de la London Film School. Après avoir travaillé à la télévision et au théâtre, il adapte une de ses pièces à l'écran en 1971, "Bleak Moments", avec Albert Finney. Malgré le succès critique du film, il doit attendre 17 ans avant de pouvoir tourner son deuxième film, "High Hopes". Il tourne ensuite "Life is sweet" (1991), puis "Naked" (1993) qui lui vaut le Prix de la Mise en Scène à Cannes. En 1996, c'est la Palme d'Or qui couronne "Vérités et Mensonges". Il réalise encore "Toopsy-Turvy" (2000), "All or Nothing" (2002) et "Vera Drake", qui obtient le Lion d'Or à Venise en 2005.

Le sujet : Pauline Cross, alias Poppy, a 30 ans. Elle est institutrice, vit en colocation depuis 10 ans avec sa collègue Zoe, et elle partage ses loisirs entre sorties en boîtes avec ses copines, le trampoline et des cours de flamenco. Mais, surtout, elle est d'un indéfectible optimisme, prenant tous les événements de la vie avec bonne humeur. Quand elle se fait voler son vélo, elle se résout à suivre des cours de conduite avec Scott, moniteur bigot, xénophobe et atrabilaire.


La critique : Le générique défile sur un écran où apparaît une Poppy bariolée qui circule à vélo dans Londres, déjà avec un sourire extatique, faisant bonjour de la main deci delà. Elle rentre dans une librairie, tenue par un type taciturne, qu'elle commence à saouler de remarques et de questions. Quand elle ressort de la boutique, son vélo a disparu, ce qui ne lui fait pas perdre son sourire, et lui arrache simplement cette remarque "Je n'ai même pas pu te dire au revoir !". Petite cause, grands effets : puisqu'elle ne veut pas remplacer sa bicyclette chérie, elle va prendre des leçons de conduite.

Car Poppy est comme ça, incurablement positive, heureuse d'être contente, comme le suggère le titre anglais "Happy-go-lucky", stupidement "traduit" par "Be Happy" : il lui suffit d'être joyeuse, elle ne se prend pas non plus pour une missionnaire de de la bonne humeur, elle attend tout au plus un effet de contagion qu'elle observe auprès de ses copines, de ses collègues, de ses élèves et de sa coloc et meilleure amie. Malgré cette bonhommie, elle est toujours célibataire à 30 ans, et même si le modèle de sa petite soeur mariée, enceinte et déjà préoccupée de son plan de retraite ne peut que la décomplexer, on sent bien qu'il y a comme un manque que masque son éternel sourire.

Tant de jovialité finit cependant par devenir crispant, et le jeu tout en mimiques de Sally Hawkins couronnée au Festival de Berlin amène le spectateur à se demander combien de temps il tiendrait avant de craquer devant cette débauche de positivité stressante et d'ironie ravageuse, et même son amie de dix ans la supplie d'arrêter d'être si gentille.

Comme pas mal d'enseignants, Poppy est une déplorable apprenante. En flamenco tout d'abord, où elle se lance en sus de ses séances de trampoline à la suite d'une copine, malgré le talent pédagogique de la prof ibérique qui vit si intensément la passion anadalouse qu'elle part en pleurs de sa salle de danse. En tant qu'apprentie-conductrice ensuite ; faut dire qu'elle est tombée sur son exacte antithèse en la personne de Scott : grognon, bourré de complexes et de préjugés, et ayant recours à une pédagogie musclée. Quand il craque à la fin, il lui reproche de l'avoir vampirisé et de lui avoir ôté sa joie de vivre, et Poppy découvre enfin qu'à vouloir un monde à son image, elle peut elle aussi faire du mal.

Je reste dubitatif devant le propos de Mike Leigh. On ne retrouve pas ici la fluidité narrative et la justesse des personnages de "Vérités et Mensonges" et de "Vera Drake", la faute sans doute à cette héroïne hypervoltée, et certains passages tournent carrément au ridicule, comme la rencontre qui se veut onirique avec un S.D.F. ; les ruptures de rythme, si elles reposent un peu le spectateur, ne gagnent pas en véracité, à l'instar de l'épisode de Nick, digne de "L'Instit" ou de "Fabien Cosma". Restent quelques scènes qui fonctionnent  grâce à leur énergie, comme le cours de flamenco ou certaines escarmouches entre Scott et Poppy ; c'est insuffisant pour en faire une comédie vraiment réussie, et on n'a pas non plus d'un autre côté une comédie dramatique cohérente.

Cluny
Par Cluny - Publié dans : critiques de juillet-août 2008 - Communauté : Cinéma
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Samedi 30 août 2008 6 30 /08 /Août /2008 16:39

Film italien de Matteo Garrone

Interprètes : Salvatore Abbuzzese (Toto), Gian felice Imparato (Don Ciro), Maria Nazionale (Maria)


Durée : 2 h 05

Note :  8/10

En deux mots : Fresque réaliste et glaçante sur la pieuvre napolitaine, filmée au plus près des gens qui vivent sous sa coupe.

Le réalisateur : Né en 1968 à Rome, Matteo Garrone a commencé comme assistant réalisateur en 1986. Après plusieurs courts métrages, il réalise son premier long métrage en 1997, "Terra Di Mezzo". En 1998, "Les Hôtes" aborde le thème de l'immigration clandestine, et "Estate Romana" est un chronique tragicomique sur trois personnages. Présenté à Cannes en 2004, "L'Etrange Monsieur Peppino" est une variation sur le thème de la Belle et la Bête, alors que "Premier Amour" fait partie de la sélection officielle du Festival de Berlin en 2005.

Le sujet : A Naples et dans la région de la Campanie, la Camorra exerce son contrôle mafieux et sanguinaire sur de nombreux quartiers et sur des pans entiers de l'économie. Alors qu'éclate une guerre entre camorristes et sécessionnistes, les destins de plusieurs personnes se jouent : un caissier de l'organisation, deux jeunes qui veulent une place au soleil, un gamin fasciné par le prestige des voyous, un honorable homme d'affaire qui enfouit dans des carrières les déchets toxiques de toute l'Europe, un contremaître d'un atelier de couture qui commet le crime de conseiller des Chinois...


La critique : Pour adapter le best-seller de Roberto Saviano (qui a participé au scénario), Matteo Garrone a choisi un parti pris formel très clair : "Pour recréer l'impact émotionnel que j'ai ressenti en me rendant dans ces territoires, il m'a semblé que ma réalisation devait être la plus discrète possible. L'histoire suggérait elle-même ce langage très simple ; toute volonté de beaux cadrages, de beaux mouvements de caméra était rejetée assez naturellement par le film. Les reportages de guerre que j'ai vus m'ont influencé aussi. Je voulais donner aux spectateurs la sensation qu'ils se situent au coeur de l'action. Je voulais qu'ils puissent ressentir les odeurs."

La première scène du film semble contredire cette intention : quatre petites frappes se prélassent dans un institut de beauté, auréolés de la lumière bleutée des cabines U.V., quand ils se font abattre à bout portant. Cette scène d'ouverture dans une telle atmosphère irréelle plante le décor, puisque nous ne reviendrons plus sur cette épisode. Il montre juste la détermination et l'organisation de ces tueurs qui sortent tranquillement de la boutique, après avoir déposé leurs calibres dans un sac qu'évacue une jeune fille.

Ensuite, le réalisateur se conforme à son intention, évitant l'esthétisme gratuit, même s'il montre un sens aigu du cadrage, tant pour restituer l'architecture carcérale du H.L.M. où se déroule l'essentiel de l'action, que pour filmer les espaces naturels où les camorristes viennent déverser les déchets ou essayer leurs armes. Il manifeste aussi une véritable maîtrise du montage, notamment dans l'alternance de plans serrés et de plans très larges qui souligne ainsi la complicité silencieuse de toute une population.

On est vraiment loin de Coppola, Scorsese ou DePalma, même si les pitoyables apprentis affranchis citent en permanence Tony Montana. Contrairement aux "Affranchis", à la saga du "Parrain" ou à "Scarface", on ne suit pas de l'intérieur le fonctionnement de l'honorable société. Plutôt que de montrer les parrains et leurs lieutenants, Garrone a choisi de s'intéresser à la Camorra d'en bas : Don Ciro, "caissier" chargé de distribuer les allocations que le clan a décidé d'attribuer aux familles des affiliés morts ou en prison ; Marco et Piselli, deux pieds nickelés dont les minables exactions dérangent la quiétude du trafic "officiel" ; Maria, déclarée persona non grata dans son propre quartier parce que son fils est un "sécessionniste" ;  Toto, un gamin serviable qui fait les livraisons de l'épicerie de sa mère mais qui est fasciné par les caïds du quartier ; Pasquale, un chef d'atelier de haute couture (avec la tête de Delanoë !) qui accepte de coacher des couturiers chinois ; Franco, un camorriste en costard, qui organise l'enfouissement de déchets toxiques.

D'abord éclaté, le récit prend petit à petit sa cohérence, et les destins des uns et des autres finissent par se croiser - ou pas. Il mélange efficacement le déroulement des différentes intrigues, et la description de la vie sous la coupe de la Camorra : le "casting" des portes-flingues, où chaque impétrant rentre à tour de rôle dans les ténèbres pour se faire tirer dessus protégé par un vieux gilet pare-balle ; la mobilisation de dizaines de guetteurs pour permettre le deal de drogue à grande échelle ; la réquisition de gamins de douze ans pour conduire des camions que leurs chauffeurs ont abandonné quand ils ont découvert ce qu'ils contenaient ; le commentaire de la victime d'un attentat à la bombe qui rigole en le qualifiant de relance de paiement, ou celui de Don Franco qui proclame que c'est grâce à des gens comme lui "que ce pays de merde est rentré dans l'Europe".

Les dialogues reflètent aussi cette empreinte de la loi mafieuse sur les âmes : "Je répéterai à qui de droit", "Tu es avec nous ou contre nous", "Ne pense pas, c'est à nous de penser". Loin des costumes en alpaga des affranchis, les tueurs sont bedonnants, en tongs et en débardeur, même s'ils circulent en Austin mini. Comme dans les pires cités de France, la police n'apparaît qu'en nombre, comme une force d'occupation. Il y a bien quelques notes d'espoir, comme la trajectoire de Roberto et de Pascuale qui montrent qu'il est possible de dire non à l'inéluctable, même si c'est au prix de l'exil.

Grand Prix du Jury mérité du Festival de Cannes, "Gomorra" allie l'intelligence narrative à la précision documentaire, tout en évitant toute complaisance pour ces misérables sicaires. La preuve en est qu'on peut être sûr que dans aucune cité en Europe, on ne prendra pour modèle Toto, Marco ou Piselli, pourtant bien plus réel que Tony Montana ou Tommy de Vito.

Cluny
Par Cluny - Publié dans : critiques de juillet-août 2008 - Communauté : Cinéma
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Samedi 30 août 2008 6 30 /08 /Août /2008 10:08

Film belge de Luc et Jean-Pierre Dardenne

Interprètes :
 Arta Dobroshi (Lorna), Jérémie Rénier (Claudy), Fabrizio Rongione (Fabio)

 

Durée : 1 h 45


Note :  6,5/10


En deux mots : Le nouveau film des frères Dardenne sur la culpabilité, l'argent et l'exploitation, plus inégal que les oeuvres précédentes.


Les réalisateurs : Jean-Pierre Dardenne est né en 1951 et son frère Luc en 1954 ; ils passent leur enfance dans la banlieue industrielle de Liège, à Seraing où ils tourneront tous leurs films. Jean-Pierre suit des cours d'arts dramatique, tandis que Luc fait des études de philosophie. Armand Gatti qui a eu Jean-Pierre comme élève leurs propose de devenir ses assistants ; ils réalisent alors des films militants dans les cités ouvrières de Wallonie.

Après de nombreux documentaires, ils tournent leur première oeuvre de fiction en 1987, "Falsch", puis "Je Pense à vous" en 1992 et "La Promesse" en 1996. En 1999, "Rosetta" leur permet d'obtenir leur première Palme d'or à Cannes, "Le Fils" vaut à Olivier Gourmet le Prix d'interprétation en 2002 et "L'Enfant" une nouvelle Palme d'Or en 2005.


Le sujet : Pour devenir propriétaire d'un snack avec son amoureux Sokol, Lorna, une jeune immigrée albanaise vivant à Liège, est devenue la complice d'une machination de Fabio, un homme du milieu. Fabio lui a organisé un mariage blanc avec Claudy, un jeune toxicomane, pour qu'elle obtienne la nationalité belge et épouse ensuite un mafieux russe prêt à payer cher pour devenir belge.

Ils ont prévu de se débarrasser de Claudy en lui administrant une overdose. A l'approche de cette échéance, Lorna tente de convaincre Fabio de renoncer à ce projet en obtenant un divorce.


La critique : Devant l'enthousiasme de la critique, c'est plein d'espoir que je suis allé voir "Le Silence de Lorna", à la fois alléché par la cruauté du sujet et porté par mon admiration pour l'oeuvre des frères Dardenne. 1 h 45 après, c'est surtout la perplexité qui m'habitait. Perplexité devant l'impression de n'avoir retrouvé ce qui fait la qualité des films des auteurs de "Rosetta" que par intermittence, avec notamment une fin qui ne cadre ni avec leur style, ni avec ce qu'ils nous avaient donné à voir du personnage de Lorna. 


Est-ce le déplacement de 10 km du lieu de tournage, de Seraing à Liège ? Sans doute pas, puisque comme toujours, les personnages sont cadrés serrés et que jusqu'à la scène finale il n'y a aucun plan d'ensemble ; ne verrait-on pas les plaques minéralogiques blanches et rouges qu'on pourrait se croire dans n'importe quelle métropole européenne.


Est-ce le choix d'utiliser une caméra 35 mm qui auraient transformé leur style narratif, puisqu'ils expliquent : "Nous avons fait des essais avec 5 caméras numériques, une 35 mm et une super 16 mm. Ce sont les images tournées de nuit avec la 35 mm qui étaient les plus proches de ce que nous cherchions. Par ailleurs, nous avons décidé que, pour ce film, notre caméra bougerait moins, écrirait moins, serait plus là pour enregistrer. Le poids de la 35 mm, sa plus grande inertie étaient dès lors intéressants pour notre film." Hypothèse séduisante, puisqu'en limitant les mouvements de caméra (je dis "en limitant", car on n'est pas encore chez Tsai-Ming Liang) et en réduisant sa place dans l'écriture, ils mettent plus à nu le scénario.


Or, c'est justement au niveau du scénario (pourtant objet de leur prix à Cannes) qu'il me semble que le bât blesse. Pourtant, après un départ poussif mais intriguant (Qui est Claudy pour Lorna ? Quelle est la raison de cette cohabitation marquée par la dépendance et l'agacement ? A qui téléphone-telle ?), la dynamique du récit s'enclenche, autour de l'enjeu moral et narratif de savoir si Lorna réussira à convaincre Fabio de renoncer à son intention meurtrière.


Dans la partie centrale du film, on retrouve la tension et la justesse des films précédents, avec une Lorna qui arpente Liège pour mener à bien ses différents projets comme Rosetta sillonnait Seraing pour trouver un travail, et des scènes étirées puis interrompues par un montage cut, jusqu'à la bouleversante ellipse qui marque le basculement du "Silence de Lorna". L'évolution de la relation de Lorna et de Claudy, qui culmine dans une superbe scène, soutend toute cette montée dramatique, porté par le jeu d'un Jérémie Rénier qui rappelle Denis Lavant dans "Les Amants du Pont-Neuf". Malheureusement, cette équilibre acrobatique se perd à partir du moment où Lorna rencontre le mafieux russe ;  le récit bascule alors dans un mélodramatisme didactique, et Lorna qui avait traversé la première moitié du film avec une force intérieure inquiétante, sombre dans un délire dont la justification psychologique est bien lourdement appuyée.


Le scénario se perd dans trop de directions, contrairement aux films précédents qui étaient chacun structurés autour d'un enjeu moral, et cette dispersion finit par susciter l'ennui. S'il était resté centré sur la marchandisation de la vie humaine, avec ce fil rouge que représente l'argent (celui que Lorna retire pour Claudy dans la scène d'ouverture, et qu'il lui confie comme symbole de sa dépendance, celui que Lorna finit par accepter de Fabio, mille euros qui valent trente deniers, et celui du partage dans la voiture, pour solde de tout compte mafieux) et sur le prix que Lorna finira par payer pour son silence, il aurait sans doute permis de garantir en permanence cette fulgurance qu'il ne manifeste que par à-coups.


Cluny


Par Cluny - Publié dans : critiques de juillet-août 2008 - Communauté : Cinéma
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Lundi 25 août 2008 1 25 /08 /Août /2008 18:32

Film islandais de Solveig Anspach

Titre original : Skrapp ùt 


Interprètes : Didda Jonsdottir (Anna Hallgrimsdottir), Julien Cottereau (Raphaël), Joy Doyle (Joy)


Durée : 1 h 32

Note :  6/10

En deux mots : Comédie foutraque et sympathique entre superbes paysages et petit commerce de joints.

Le réalisateur : Née en 1960 à Vestmannaeyjar d'un père américain et d'une mère islandaise, Solveig Anspach est diplômée de la FEMIS en 1989. Après plusieurs courts métrages documentaires, elle réalise son premier long en 1999, "Haut les Coeurs" avec Karin Viard. Elle réalise ensuite un documentaire sur la peine de mort "Made in USA" (2001), puis "Stormy Weather" (2003).

Le sujet : Anna Hallgrimsdottir est une célèbre poétesse islandaise ; elle tient aussi un commerce d'herbe qui lui vaut la clientèle de la moitié de l'île. Tandis qu'elle s'est absentée pour revendre son portable, ses clients se fient à son panneau indiquant "Back soon" et attendent chez elle. Mais une cascade d'événements retarde son retour : son frère qui la vire de sa voiture devant une prison, un vague cousin qui fait une tentative de suicide, et un jarre qui avale son précieux portable.


La critique : Quand elle découvre son cousin vautré au milieu de ses boites de barbituriques, Anna lâche cette remarque laconique : "D'habitude, les gens ne se suicident pas au début de l'été". Dans cet "Alcatraz du Nord", on sent bien que le climat, l'insularité et l'omniprésence des manifestations de la puissance de la nature ne peuvent que façonner des gens pittoresques. D'ailleurs, à part une rugueuse équipe de handball, on ne connaît de l'Islande que Björk, qui se pose là point de vue originalité.

Solveig Anspach ayant par ailleurs choisi comme héroïne de sa première comédie une poétesse dealeuse, et l'action étant construite sur un montage parallèle entre ses pérégrinations qui la conduisent à la prison, l'hôpital et une ferme perdue au fin fond de l'île, et le défilé de ses clients dans sa salle d'attente, le condensé d'humanité qui vient acheter de la marijuana chez Mme Hallgrimsdottir ("La fille de la pierre cachée") oscille entre le loufoque et l'excentrique. C'est d'ailleurs là que réside la faiblesse du film, surtout dans sa première moitié : le défilé de personnages tous plus siphonnés les uns que les autres qui enchaînent leurs numéros (une boxeuse, un slammeur tatoué, un chirurgien écologiste, un Gonzague Saint-Bris contreténor), servis par des acteurs inégaux, tout cela donne une impression assez factice, et la narration semble aussi ballottée que sa principale protagoniste.

Et puis, heureusement, tout en conservant un rythme un peu bancal, le récit se recentre sur un MacGuffin bien trouvé : comment récupérer le portable (avec dans son répertoire la précieuse liste des clients d'Anna) avalé par un jarre  forcément bien islandais. Même si on se sent un peu dans la peau de l'étudiant français coincé dans sa perception cérébrale, on se laisse porter par l'absurde des situations et la beauté des paysages.

Car un des personnages principaux de ce film atypique, c'est l'Islande elle-même, comme le montre le premier plan du film, un travelling avant sur une faille volcanique. A l'entassement anarchique des clients dans la salle d'attente s'opposent les vues aériennes sur la route qui serpente entre fjörds et glaciers, avec cette lumière si particulière.

Malgré le jeu approximatif de certains acteurs et quelques situations un peu convenues (le père du fils aîné d'Anna qui débarque avec son bel uniforme de pilote de ligne), d'autant plus déplacées dans
ce joyeux capharnaüm, "Back soon" a la fraîcheur acidulé d'un Stimorol, et un sympatique exotisme venu du grand Nord qui démontre une fois de plus l'universalité du cinéma.

Cluny
Par Cluny - Publié dans : critiques de juillet-août 2008 - Communauté : Cinéma
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Mercredi 20 août 2008 3 20 /08 /Août /2008 10:11

Film américain de Christopher Nolan

Titre original : The Dark Knight

Interprètes : Christian Bale (Bruce Wayne/Batman), Heath Ledger (Le Joker), Aaron Eckhart (Harvey Dent/Double Face), Maggie Gyllenhal (Rachel Dawes)


Durée : 2 h 27

Note :  7/10

En deux mots : Bien qu'un peu longuet, ce nouvel opus de la saga de la chauve-souris milliardaire vaut par son atmosphère crépusculaire et surtout par une performance impressionnante de Heath Ledger.

Le réalisateur : Né en 1971 à Londres d'un père anglais et d'une mère américaine, Christopher Nolan a commencé à réaliser des courts métrages avec la caméra 8 mm de son père. Il tourne en 1999 "Following", l'histoire d'un voyeur, ce qui lui permet l'année suivante de réaliser "Memento", un polar captivant et ingénieux construit à coup de flash backs. Il réalise en 2003 "Insomnia", le remake du film norvégien, avant de se voir confier en 2005 "Batman Begins" avec Christian Bale, qu'il retrouve en 2006 dans "Le Prestige".

Le sujet : Avec l'aide du lieutenant Gordon et du nouveau procureur Harvey Dent, Batman a entrepris de démanteler les dernières organisations criminelles de Gotham City. Apparaît alors le Joker, qui impose sa domination au syndicat du crime et qui provoque Batman pour le forcer à se démasquer.


La critique : Les fidèles lecteurs de ces critiques connaissent mon avis sur les comics et sur l'inflation de films hollywoodiens qui en sont tirés : exaltation de ce qu'il y a de plus nauséabond dans les "valeurs" américaines, manichéisme simpliste, grosses ficelles narratives et absence totale de prise de risques des studios. Concernant cette reprise de Batman par Christopher Nolan, dont "The Dark Night" est le deuxième volet après "Batman Begins", on peut aussi ajouter le questionnement sur ce que ces films peuvent apporter de plus ou de différent après Tim Burton, puisque celui-ci avait déjà mis en scène l'opposition du chiroptère justicier, d'Harvey "Double-Face" Dent et du Joker.

"Batman Begins" ne m'avait pas convaincu, malgré un a priori favorable pour Christopher Nolan dont j'avais beaucoup apprécié "Memento", la faute à un Christian Bale mono-expressif, à une intrusion de ninjas capilotractée et à beaucoup de bavardages. Ce deuxième essai ne corrige pas ces défauts : si les ninjas ne sont pas de retour malgré une virée à Hong Kong, Christian Bale est toujours aussi inexpressif, même s'il est concurrencé par Aaron Eckhart pour une place chez Mme Tussaud, et les 147 minutes du film comptent bien plus de causeries que de scènes d'action.

Pourtant, c'est sans doute cette dernière caractéristique qui fait pour moi l'intérêt du film, par la gigantesque imposture réjouissante qu'elle représente. Plébiscité par les spectateurs américains (déjà plus de 470 millions de $ de recettes) et français (1 200 000 spectateurs en première semaine) en pleine période estivale propice aux blockbusters, "The Dark Knight" est en réalité un film complexe, à la narration austère, et où seuls les dialogues entre les personnages principaux permettent de comprendre la dimension morale des affrontements.

Dans la lignée du film précédent, Chris Nolan a choisi une ambiance sombre, tant du point de vue narratif que visuel. Si le film a été tourné à Chicago, les références au 11 septembre sont légion, comme dans la plupart des films catastrophe  hollywoodiens de ces dernières années : l'effondrement de l'hôpital dans un nuage de poussière, les clients d'un bar tétanisés devant les images diffusées à la télévision, les ponts et les tunnels fermés, jusqu'à l'image quasi-subliminale d'un camion de pompiers en feu. Ce pessimisme trouve sa justification dans le postulat choisi par Nolan : loin de ramener la tranquillité, le combat de Batman attire à Gotham le crime et la folie.

La folie s'exprime d'emblée par l'inflation de faux Batman bedonnants qui tentent de jouer les supplétifs ; elle continue par un braquage hommage à celui de "Heat", où les masques de hockey sont remplacés par ceux de bouffons. Elle culmine avec le personnage du Joker, joué par un Heath Ledger époustouflant. Loin du timide vacher pédé (c'est comme ça qu'on francise "cowboy gay" ?) du "Secret de Brokeback Moutain", très différent de l'histrion dandy joué par Nicholson dans le "Batman" de Burton, il incarne un joker grunge dont les bouffonneries et les rodomontades (ses explications individualisées de l'origine de sa cicatrice, par exemple) ne découlent pas uniquement d'une pathologie psychiatrique, mais bien d'une mission dont il se sent investi, celle d'apporter le chaos et de démontrer la noirceur de l'âme humaine.

Dans une narration qui s'emberlificote de temps en temps entre les différents enjeux (la double rivalité de Bruce Wayne et d'Harvey Dent pour la conquête du coeur de Rachel et pour le leadership dans la lutte contre le crime, les luttes internes à la pègre et l'action des flics ripoux), chacune de ses apparitions apporte un coup de fouet à une intrigue qui s'étire parfois. Même en faisant abstraction de son destin tragique, la dernière prestation d'Heath Ledger le place incontestablement au panthéon des grands psychopathes du cinéma, entre Anton Chigurh et le Révérend Harry Powell.

Cluny

Par Cluny - Publié dans : critiques de juillet-août 2008 - Communauté : Cinéma
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