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critiques de mai 2008

Dimanche 1 juin 2008 7 01 /06 /Juin /2008 20:48

Film franco-marocain de Souad El-Bouhati

Interprètes :
Hafsia Herzi (Sofia), Farida Herzi (La mère), Maher Kamoun (Le père)




Durée
: 1 h 24

Note :
  4/10

En deux mots
: Le destin d'une jeune fille entre France et Maroc. Malheureusement décousu et mal dirigé.

Le réalisateur :
Né en 1962 à Roubaix, Souad El-Bouhati est titulaire d'une maîtrise de cinéma à l'Université Paris VIII. Elle a d'abord été éducatrice sociale dans des centres d'hébergement pour personnes en difficulté à Toulouse. Elle se décide par la suite à devenir assistante scripte. Elle travaille sur diverses petites productions et écrit et réalise un moyen-métrage en 1999, "Salam".
.
Le sujet : Sofia vit en France avec ses parents, son petit frère et sa grande soeur. Bonne élève, elle coule une vie heureuse, faite de disputes avec sa soeur et de jalousie avec sa copine Elodie. Mais un jour, sans la prévenir, ses parents repartent de nuit au pays. Dix ans plus tard, Sofia ne continue à rêver que d'une chose : revenir en France, le pays de son enfance. Elle passe ses week-ends dans la ferme familiale, et ses semaines dans un foyer de jeunes filles pour préparer son bac. En effet, son père a promis de lui rendre son passeport français si elle réussissait ses examens.

La critique : "Mais toi, tu es française, africaine, marocaine ou arabe ?" demande Elodie à Sofia quand la maîtresse veut démarrer sa leçon de géographie en demandant aux enfants les plus colorés de la classe où ils sont nés. On comprend qu'elle ait du mal à cataloguer sa copine, tant elles semblent partager la même vie, et son père l'autorise sans aucune réticence à passer une journée champêtre avec Sofia et sa famille.

Cette question de l'identité de ces enfants aux deux pays, Marocains en France et Français au Maroc, le coeur partagé des deux côtés de la Méditerranée, fournit un sujet passionnant et peu souvent traité au cinéma. Le point de vue de la réalisatrice n'est d'ailleurs  pas celui de Sofia, mais celui d'Elodie qui disparaît pourtant après 20 minutes : "Le point de départ du scénario remonte à une expérience de mon enfance qui m'a énormément marquée. J'avais une petite copine algérienne qui, du jour au lendemain, a disparu. Aux nombreuses questions que je posais, la seule réponse qui m'était faite était : "Elle est retournée dans son pays." Pour moi, c'était l'incompréhension : elle était bonne élève, elle était née en France, elle ne m'avait jamais parlé de l'Algérie. Pour l'enfant que j'étais, c'était un paradoxe insoluble : comment peut-on avoir un pays qu'on ne connaît pas ?"

Louables intentions, et sujet passionnant : voilà donc les ingrédients d'un film intéressant. Malheureusement, on déchante très vite, car on n'arrive pas à rentrer dans cette histoire. La faute à la mise en scène, hiératique et schématique. Chaque plan commence avec des personnages figés, dans des attitudes artificielles, puis ils se mettent en mouvement, comme il leur a sans doute été demandé, trois secondes après le "Action !". Le père est malheureux à cause de sa situation financière : il traverse les scènes la mâchoire crispée et les sourcils froncés ; Sofia est heureuse parce que son père lui a promis de lui rendre son passeport : elle sautille comme Candy, un sourire extatique aux lèvres.

On a aussi du mal à comprendre Sofia, et on en arrive presque à approuver son entourage, tant son entêtement et sa façon de balancer sa nationalité française d'un air de supériorité dédaigneuse à la tête des "bledards", que ce soit sa camarade de chambre ou son petit ami, finit par agacer. Si, comme l'explique Souad El-Bouhati, "Le pays d'origine qui lui manque tant n'est pas la France, c'est son enfance", comme le montre la scène finale en trompe-l'oeil, son attitude n'en est pas moins très souvent incohérente, à l'image de sa fugue du foyer qui en l'empêchant de passer son bac, la condamne à rester au pays.

Hafsia Herzi, honorée du César du meilleur espoir féminin pour "La Graine et le Mulet", est ici en roues libres, et son jeu se limite trop souvent faute de direction à une démarche à la Rosetta et à des explosions du type "Vous pouvez pas comprendre !!!". Le reste de la distribution ne rattrape pas ce manque de naturel, loin de là ; parfois, le recours à des acteurs non professionnels ou novices peut devenir une force, quand la mise en scène joue de cette fragilité, comme chez Bresson, Dumont ou les frères Dardenne. Ici au contraire, elle en souligne la fausseté par sa pesanteur et un rythme perpétuellement à contre-temps.

Une nouvelle fois, de bonnes intentions ne font pas un bon film. La réalisatrice est restée au milieu du gué : n'ayant pas la maîtrise de la grammaire du cinéma qui permet la fluidité, elle ne s'est pas non plus affranchie clairement des règles canoniques, enfermant au contraire son récit dans le carcan d'une raideur narrative. Dommage, car le résultat va à l'encontre de l'intention, et l'agacement se dispute à l'incompréhension devant une aussi vaine agitation.

Cluny
Par Cluny - Publié dans : critiques de mai 2008 - Communauté : Cinéma
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Dimanche 25 mai 2008 7 25 /05 /Mai /2008 19:03

Film américain de Steven Spielberg

Titre original :  Indiana Jones and the Kingdom of the Crystal Skull

Interprètes :
Harrisson Ford (Dr Henry "Indiana" Jones Jr), Cate Blanchett (Irina Spalko), Karen Allen (Marion Ravenwood), Shia LeBoeuf (Mutt Williams)

Durée : 2 h 35

 

Note : 6/10

En deux mots : Fidèle, trop fidèle au cahier des charges, ce quatrième Indiana Jones est à l'image de son interprète principal : un peu ridé, mais toujours divertissant.

Le Réalisateur : Né en 1946 à Cincinnati, Steven Spielberg réalise en 1971 un premier téléfilm remarqué, «Duel». Son premier long-métrage de cinéma, «Sugarland Express» sort en 1974, un an avant son premier succès, «Les Dents de la Mer».
Grâce à ses premiers gains, il monte sa société de production, Dreamworks, et enchaîne les succès planétaires : «Rencontre du troisième type» (1978), «E.T.» (1982), la trilogie «Indiana Jones», «Jurassic Park» (1993), «La liste de Schindler» (1993), «Il faut sauver le soldat Ryan» (1998), «A.I.» (2001), «Minority Report» (2002), «Munich» (2006)

Le sujet : En 1957, Indiana Jones et son copain Mac sont enlevés par un commando soviétique et conduits dans une base secrète de l'armée US pour y identifier une caisse déposée là depuis 1947 et venant de Roswell. Après leur avoir échappé, ainsi qu'à une explosion nucléaire, Indy découvre qu'il est suspecté par le F.B.I. et suspendu de son université. Il est contacté par une jeune motard, Mutt Williams, qui lui révèle que son ami Oxley parti sur la trace du crâne de cristal a disparu au Pérou...

La critique : Heureusement, j'ai revu les trois premiers Indiana Jones ces derniers temps. Heureusement, car cette re-vision (révison ?) des aventures de l'ersatz spielbergo-lucasien de Tintin m'a permis de dissiper l'aura créée par le souvenir autour de ces trois films, et donc d'en réévaluer les charmes indéniables mais aussi les évidents défauts.

Pour les premiers, citons un irréalisme tranquillement assumé (traverser l'océan accroché à un sous-marin, sauter d'un avion avec pour parachute un canot de sauvetage), une autodérision des personnages, et notamment du héros affublé d'un nom de clebs et victime d'herpétophobie handicapante, ou encore un sens du rythme symbolisé par la ritournelle péplumique de John Williams.

Du côté des défauts, on trouve justement l'exacerbation de ces mêmes qualités, ce jusqu'au-boutisme qui fait que l'éternel ado qu'est Spielberg ne sait pas s'arrêter, et qui conduit au too much. Pas étonnant donc que cette hyperbolisme soit particulièrement visible dans "Le Temple Maudit", avec la déclinaison jusqu'à la nausée de la gastronomie gore des hindous, ou l'interminable scène de la cérémonie sacrificielle dans les entrailles de la Terre, puisque ce deuxième épisode est aujourd'hui renié par Spielberg et Lucas. Mais ce mauvais goût pubertaire et cette absence de mesure étaient aussi perceptible dans les deux autres films de la première trilogie, notamment dans le recours au salmigondis bliblico-ésotérique qui justifie allégrement les pires incohérences scénaristiques.

Ce long préambule pour prévenir que je ne ferai pas partie de la cohorte des partisans du "C'était mieux avant". Ce n'était mieux que parce qu'ils avaient 28 ans de moins quand ils ont découvert le héros au fouet et au borsalino, et que depuis, 28 ans de cinéma d'action et d'effets spéciaux 3D sont venus brouiller leurs souvenirs.

Non, au contraire, la qualité essentielle -et en contrepartie sa principale limite - de cet "Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal", c'est la fidélité au cahier des charges canonique. On retrouve en effet dans ce film tous les ingrédients de la recette qui avait fait le succès des premiers épisodes.

Une vingtaine d'années a passé, pour justifier les rides sur le visage d'Harrisson Ford. Au titre de la guerre froide, les nazis ont laissé leur place au nouvel ennemi de l'Amérique, les soviétiques du KGB qui se déplacent en colonne blindée aux USA ou au Pérou avec encore plus de facilité que les apprentis pilotes d'Al Qaida, et qui sont commandés, parité oblige, par une commissaire politique médiumique "chouchoute de Staline" incarnée par une Cate Blanchett en roue libre. Cet anticommunisme primaire se voit équilibré par une dénonciation du maccarthysme dont est victime Indy lui-même, malgré ses années de service dans l'OSS, et qui l'amène à constater : "De nos jours, on peut même douter de nos amis".

Le conflit père-fils, si cher au cinéma hollywoodien, et qui avait si bien marché avec l'opposition entre Harrisson Ford et Sean Connery, saute ici une génération, puisqu'Indy se découvre un fils (dans ce qui est sans doute la meilleure scène du film). Il se murmure aussi que Shia LeBoeuf, qui campe cet Henry Jones III, pourrait être le héros d'une nouvel trilogie, son paternel ne pouvant pas enchaîner les cascades pendant encore vingt ans.

On retrouve aussi pêle-mêle des passages secrets dans des cryptes couvertes de toiles d'araignées, des croquis mystérieux qui servent d'indices pour le jeu de piste, des courses-poursuites au bord de précipices abyssaux, des bébêtes grouillantes : scorpions, fourmis et bien sûr serpents, et des déplacements intercontinentaux représentés par un trait rouge avançant sur une carte se superposant à des images d'avion.

Plus encore que dans les films précédents, le n'importe-quoi mystico-historico-ésotérique permet de remplacer un scénario construit, et cette fois on fait appel à la légende des crânes de cristal, inventé au milieu du XIX° siècle par un faussaire français, au mythe de l'Eldorado, à la créature de Roswell et aux cousins du troisième type d'E.T.

Du fait du respect si scrupuleux du canon indianesque, les surprises sont rares, et "Indiana Jones et le Royaume des Crânes de cristal" peut se regader plus dans la recherche de ces correspondances et de ces auto-citations, que pour son intrigue franchement prévisible. On peut aussi s'amuser à repérer les autres emprunts : la plaine désertique de "La Mort aux Trousses", les ados en caisse rutilante d'"American Grafitti", ou le motard à casquette de "L'Equipée sauvage".

Une autre qualité de cette fidélité réside dans le courage de tourner un film d'action en 2008 sans succomber à la mode du montage clipesque et de la débauche d'effets 3D. C'est filmé "à l'ancienne", dans des décors qui ne sont pas des incrustations sur des fonds bleus, et le traveling aérien remplace avantageusement le montage stroboscopique.

Resteront sans doute aussi quelques scènes qui enrichiront le musée des adorateurs du prof d'archéologie (à mi-temps), comme cette façon si réaliste de survivre à une explosion nucléaire, ou la poursuite à moto dans les locaux de l'université du Dr Jones. Pour les afficionados débarassés d'une nostalgie superfétatoire, ce sera sans doute suffisant pour leur faire adopter ce nouvel avatar de la saga. Pour un spectateur novice dans cet univers, les incohérences scénaristiques et les longueurs -paradoxalement particulièrement sensibles dans les scènes d'action -, risquent d'être rédhibitoires.

Cluny

Par Cluny - Publié dans : critiques de mai 2008 - Communauté : Cinéma
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Samedi 24 mai 2008 6 24 /05 /Mai /2008 15:08

Film français de Arnaud Desplechin

Interprètes :
Mathieu Amalric (Henri), Catherine Deneuve (Junon), Anne Consigny (Elizabeth), Jean-Paul Roussillon (Abel)




Durée
: 2 h 30

Note :
  5/10



En deux mots
: "La Bûche" croisée avec "Festen", ça donne un trèèèèèèèèèès long film symptomatique du cinéma français à Cannes.

Le réalisateur :
Né en 1960 à Roubaix, Arnaud Desplechin est diplômé de l'Idhec dans la section "réalisation et prises de vues". Il commence comme directeur de la photographie avant de réaliser en 1991 son premier moyen métrage, "La Vie des Morts", qui reçoit le Prix Jean Vigo. Son premier long, "La Sentinelle", est présenté en compétition à Cannes en 1992. Suivent "Comment je me suis disputé... (ma vie sexuelle)" (1996), "Esther Kahn" (2000, tourné en anglais), "Léo en jouant "Dans la Compagnie des Hommes" (2004), "Rois et Reines" (2004), et son premier documentaire, "L'Aimée" (2007).

Le sujet : Junon et Abel ont eu deux enfants, Elizabeth et Joseph. Ce dernier est atteint d'une leucémie, et il ne peut être sauvé que si on trouve un donneur de moelle compatible. Ils font alors un troisième enfant, Henri, mais celui-ci se révèle incompatible et Joseph meurt. Cet enfant inutile grandit alors sans l'amour de sa mère, et avec la haine farouche de sa soeur, qui des années plus tard, le sauve de la prison pour banqueroute frauduleuse à une condition expresse : qu'il ne paraisse plus jamais devant elle.

Cinq ans après, c'est au tour de Junon d'être atteinte d'un cancer qui nécessite une greffe de moelle. Cette fois, Henri s'avère compatible, ainsi que Paul, le fils d'Elizabeth. Toute la famille se retrouve pour la première fois depuis des années à Roubaix pour passer Noël ensemble.

La critique : Le moins qu'on puisse dire, c'est que la famille Vuillard ne va pas bien. Il y a d'abord la mère, Junon, au prénom annonciateur de querelles, qui assume de ne jamais avoir aimé son fils Henri, et qui à l'évocation de celui qui est mort à 7 ans, ne trouve rien d'autre à dire que "Il était si laid quand il était petit". Il y a ensuite l'aînée dépressive et mélancolique, mère qui se définit comme stérile et qui décrète et obtient de facto le bannissement de son frère. Il y a donc Henri, mauvais fils et mauvais frère désigné, escroc à la petite semaine, suborneur et ivrogne. Il y a ensuite Simon, le neveu recueilli par Abel et Junon, schizophrène alcoolisé, jamais remis d'avoir abandonné Sylvia à son cousin Ivan. Il y a enfin Paul, adolescent à la limite de l'autisme, qui cherche la reconnaissance de l'oncle honni et qui n'a le droit de sa part qu'à "Paul le Fou ? Il est complètement con !".

Le seul qui semble traverser les tempêtes est Abel, patriarche au prénom trompeur, qui sur la tombe de Joseph déclare "La souffrance est une toile peinte", et qui décrète devant les déchirement de ses enfants "Ce ne sont pas nos affaires", préceptes qui le protègent des différentes déclinaisons de la névrose familiale. Ce thème des secrets de famille apparaît dès l'origine dans le cinéma de Desplechin, puisqu'il définissait "La Vie des Morts" comme "un film pour dire du mal de ma famille", et que son dernier film et premier documentaire, "L'Aimée", montre son père lors du déménagement de la maison familiale.

A la fois attiré et inquiété par la énième sélection cannoise de Desplechin, et par le décalage habituel entre la critique française (unanime) et l'accueil (contrasté) du public sur les différents blogs et forums, j'ai mis un certain temps -et du temps, j'en avais devant moi !- à décider si j'aimais ou non ce "Conte de Noël", virée dans le Nord aux antipodes de celle de Philippe Abrams. Dans la colonne "plus", il y a un début attractif et inventif, avec la narration multiforme de la geste familiale, qui fait appel à la voix off, au témoignage face caméra des protagonistes et même au théâtre d'ombre. Il y a aussi la distribution impressionnante, où seul Melvil Poupaud fait figure de bizuth au milieu de la troupe des anciens : Amalric, Devos, Deneuve, Roussillon, Consigny, Girardot ou Mastroianni. Et puis, il y a l'indiscutable maîtrise de la réalisation, avec le recours à toutes les techniques du cinéma, y compris les plus anciennes : ouverture et fermeture à l'iris, faible profondeur de champ, travellings optiques, split screen...

Pourtant assez vite, la colonne "moins" a commencé à se remplir : la dispersion des intrigues (le conflit Elizabeth/Henri, la relation sans amour d'Henri et de sa mère, l'émancipation de Paul, la découverte par Sylvia du sacrifice de Simon...), le schématisme de certaines situations (le judaïsme intolérant de Faunia -qui s'exclame à propos de Madeleine : "Quel prénom bizarre !"-, la tabagie systématique des personnages), le côté artificiel de nombreux dialogues bien trop littéraires. Mais le pire est sans doute la longueur et la dilution du récit, que ne contrebalance pas le découpage en chapitres. Progressivement, on se détache de ces pantins cyclothimiques, quelque soit la qualité du jeu des acteurs, et monte l'agacement devant l'intellectualisme d'un autre âge qui soutend le propos et sur lequel s'extasie la critique parisienne.

Je prends le risque à 24 h de la proclamation du palmarés : je ne suis pas persuadé que la Palme d'Or (annoncée par la presse hexagonale, beaucoup moins par son homologue internationale) attribuée 21 ans après "Sous le Soleil de Satan" au film de Desplechin serait une bonne chose pour le cinéma français. Ce serait une encouragement à limiter celui-ci à son fond de commerce éternellement post-nouvelle vague, alors que les cinémas du monde entier, en Amérique latine, en Asie et ailleurs en Europe explorent depuis longtemps d'autre voies que ces chemins d'un autre âge.

Cluny
Par Cluny - Publié dans : critiques de mai 2008 - Communauté : Cinéma
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Samedi 17 mai 2008 6 17 /05 /Mai /2008 16:19

 

Film allemand de Robert Thalheim
 

 

Titre original : Am Ende kommen Touristen

Interprètes : Alexander Fehling (Sven), Ryszard Ronczewski (M. Krzeminski), Barbara Wysocka (Ania)

 

 

Durée 1 h 25

Note :  8/10

En deux mots : Film sensible et intelligent sur la mémoire, la culpabilité et la reconstruction des relations germano-polonaises. Passionnant.

Le réalisateur : Né en 1974 à Berlin, Robert Thalheim termine son service militaire dans un mouvement international de jeunes basé à Auschwitz. Assistant à la mise en scène au "Berliner ensemble" de 1997 à 1998, il réside ensuite en Pologne et consacre un livre à Wajda. Il suit ensuite des études à l'école de cinéma et de télévision Konrad Wolf de Potsdam. Après plusieurs courts métrages, il tourne son premier long en 2004, "Tout va bien".

Le sujet : Sven Lehnert, un étudiant berlinois, arrive à Auschwitz pour y effectuer son service civil, après s'être vu refuser une place comme animateur d'un centre de jeune à Amsterdam. Il doit travailler au centre international de jeunes, et y faire de menus trvaux : plonge, bricolage, assistance aux conférences destinées aux jeunes Allemands. Il doit aussi aider M. Krzeminski, ancien déporté, et qui restaure les valises exposées au musée d'Auschwitz.

Celui-ci supporte mal la présence d'un jeune allemand, et Sven doit endurer sa mauvaise humeur et ses caprices. Il s'installe chez Ania, une jeune polonaise dont le frère vient d'être licencié par une entreprise allemande.

La critique : Un groupe de jeunes apprentis allemands apathiques écoutent d'une oreille distraite l'exposé que leur fait l'ancien déporté polonais. Ils sont là pour la façade, employés par une entreprise allemande qui vient de racheter une usine de chimie dans la région d'Auschwitz, et si la responsable de la communication fait des ronds de jambes devant les caméras, elle exprime en off le fond de sa pensée : "Il n'y a pas besoin de s'y connaître en histoire, l'économie suffit".

A la fin de sa conférence, place au débat. Long silence, avant qu'un apprenti se lance, sans se rendre compte de l'inconvenance de sa question : " Que mangiez-vous ?". Le public s'ébroue quand pour répondre à la demande d'un jeune, M. Krzeminski relève sa manche et montre son numéro tatoué. Déception naïve d'un des jeunes qui constate : "On ne voit plus rien !". La réplique fuse, cinglante : "Je ne l'ai pas fait renouveler !"

Cette scène illustre parfaitement la richesse de ce nouveau bijou du cinéma contemporain, : cette façon tout en finesse d'aborder sans pathos la question que pose Sven à Ania, " Comment vivre sur le lieu du plus grand crime de l'histoire de l'humanité ?" Robert Thalheim a lui-même effectué son service civil à Auschwitz , et on voit bien comment cette expérience a pu nourrir son film de détails qui font mouche, notamment sur l'accueil goguenard que réservent les Polonais à cet Allemand même pas vraiment idéaliste : "L'Armée allemande est revenue à Auschwitz !", ou cette remarque de M. Krzeminski qui provoque l'hilarité de ses compagnons de bistrot : "Un Allemand sans montre ?"

Sven avait demandé de s'occuper de gamins à Amsterdam, il s'est vu affecter au service d'un vieillard acariâtre à Auschwitz. Il n'est pas donc préparé à cette incongruité que représente un Allemand sur ce lieu si sensible, comme le dit Ania. Quand celle-ci lui demande " Pourquoi ici ?", il lui répond "Je suis en train de comprendre pourquoi".

Robert Thalheim laisse filer intelligemment deux thématiques : l'actualité du devoir de mémoire à l'heure où disparaissent les derniers survivants de l'horreur concentrationnaire, et l'intrigue plus classique de la cohabitation d'une victime avec  un descendant des bourreaux. Il utilise la trame du " Vieil Homme et l'Enfant" ou des "Contrebandiers de Moonfleet", celle de l'approche difficile de ceux que tout oppose : lors de leur première rencontre, M. Krzeminski laisse tomber en voyant Sven dans son bâtiment : "On fait auberge de jeunesse, maintenant ?"

Mais il ne succombe pas à la facilité du happy end, bien au contraire. Ce n'est pas quelques mois de cohabitation tumultueuse qui gommeront l'inconciliable, surtout avec le caractère de cochon de M. Krzeminski , celui-là même qui lui a sans doute permis de survivre. La subtilité du réalisateur se manifeste là-aussi : si l'un et l'autre franchissent une étape à l'issue de cette confrontation, ce sera chacun dans une direction différente.

Quant au thème du devoir de mémoire, il structure le film. Il peut se résumer à cette phrase que lâche M. Krzeminski : " Montrez leur La Liste de Schindler, ça leur fera plus d'effet", ou au conflit qui l'oppose aux conservateurs du Musée qui lui reproche de remettre à neuf "avec ses vieilles méthodes" les valises exposées en vitrine.

Privilégiant les plans fixes, les recadrages discrets et les longs travelings arrière pour filmer les balades à vélo dans la campagne environnante, la réalisation se met au service du propos, sans ostentation ni austérité. Film d'auteur, " Et puis les Touristes" se situe à l'extrême opposé d'un certain cinéma français prétentieux et nombriliste. Il sait raconter une histoire individuelle crédible, tout en évoquant des destins collectifs et des problématiques d'aujourd'hui, rejoignant ainsi le cinéma d'un Ken Loach ou d'un Laurent Cantet.

Cluny

Par Cluny - Publié dans : critiques de mai 2008 - Communauté : Cinéma
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Lundi 12 mai 2008 1 12 /05 /Mai /2008 18:22

Film américain de Stuart Townsend

Titre original : Battle in Seattle

Interprètes :
Charlize Theron (Ella), Ray Liotta (Le Maire), Martin Henderson (Jay), Michelle Rodriguez (Lou)




Durée
: 1 h 40

Note :
  5,5/10

En deux mots
: Le manichéisme larmoyant à la sauce hollywoodienne dilue l'intérêt réel du propos.

Le réalisateur :
Né en 1972 à Howthy, en Irlande, Stuart Townsend est diplômé de la Gaiety School of Acting de Dublin. Il commence un carrière d'acteur en 1996, et joue en 2004 dans deux films aux côtés de Charlize Theron, sa compagne. "Bataille à Seattle" est son premier film en tant que réalisateur.

Le sujet : En novembre 1999, la ville de Seattle accueille la troisième conférence ministérielle de l'OMC. Des milliers de manifestants rejoignent la ville, et un groupe d'activistes écologistes et altermondialistes décide de bloquer les carrefours pour empêcher la tenue de la conférence. Le maire veut éviter les incidents et montrer que la liberté d'expression reste possible.

Mais à la suite d'incidents provoqués par des éléments radicaux, la police en nombre insuffisant intervient brutalement, alors que tout le centre ville est noyé sous les gaz lacrymogènes. Sous la pression du gouverneur, le maire se résout à décréter un couvre-feu et à faire appel à la Garde Nationale.

La critique : La conférence de Seattle a marqué une date, aussi bien dans la conscience américaine que dans l'émergence internationale de l'altermondialisme. Aux Etats-Unis, elle a été le théâtre des affrontements de rue organisés les plus importants depuis la convention démocrate de Chicago en 1968, et elle est restée dans les mémoires comme une victoire de la contestation, puisque le sommet a été très perturbé et s'est séparé sans parvenir à un accord.

Sur le plan international, elle a permis la première manifestation médiatisée de grande ampleur permettant la jonction des luttes écologistes, syndicales et politiques, et c'est suite à cet acte de naissance qu'a eu lieu en 2001 le premier Forum Social Mondial à Porto Alegre.
Autant de raisons pour apprécier un film porté par une floppée d'acteurs bankable, d'autant plus que dès le documentaire d'introduction, Stuart Townsend indique clairement de quel côté il se situe.

Malheureusement, "Bataille à Seattle" ne tient pas les promesses que son sujet et sa distribution laissaient entrevoir. La faute certainement à ce que nous annonce un panneau dès le générique : si les événements sont réels, les personnages sont fictifs. Et fictifs, ils le sont ! Côté méchants, le maire plutôt-gentil-et-démocrate-mais-qui-ne-veut-pas-que-l'image-de-sa-ville-soit-entâchée se voit trahi par un chef de la police obtus et une sorte d'adjudant Laterreur qui excite ses robocops contre la foule des manifestants, sans parler du gouverneur qui n'attend qu'une chose, à savoir d'envoyer la garde nationale.


Côté manifestants, des plutôts-gentils-mais-qui-ont-des-comptes-à-régler-avec-la-vie : Jay qui fait de ce combat une affaire personnelle depuis la mort de son frère dans "la bataille de la forêt de séquoias" et qui est prêt à risquer sa vie en rappel à 200 m du sol mais qui flippe de se faire arrêter, Lou qui bien sûr va succomber au charme ténébreux de Jay, Samatha qui a par le passé déjà succombé au charme ténébreux de Jay (enfin, si j'ai bien compris, car je dois avouer que j'ai un peu décroché à un moment...) ; seul émerge le personnage de Django, éternel optimiste, qui entonne "Don't worry, be happy" dans le panier à salade.

Entre les deux, une journaliste envoyée par sa rédaction pour montrer que les protestataires ne sont que des casseurs et qui se radicalise en 24 h, et surtout un policier de la brigade anti-émeute et sa compagne enceinte, qui, manque de bol et effet scénaristique pas du tout voyant, va perdre son (leur) bébé au cours d'une bavure des collègues de bureau du mari.

Pourtant, il y avait matière à construire un récit passionnant en restant centré sur les vrais sujets du film : comment parvenir à la convergence de luttes disparates, comment assurer des opérations commandos en restant fidèles à ses principes non-violents, comment relayer à l'intérieur la contestation de la rue tout en rendant audible le discours de ONG ou des pays du Tiers-Monde. En choisissant de personnaliser toutes ces contradictions, sans doute à des fins pédagogiques, Stuart Townsend a dilué la dimension fondamentalement collective de ce combat, réduisant les manifestants à des marionnettes manipulés par quelques leaders.

La réalisation est à l'avenant : montage nerveux pour compenser la mollesse du scénario, direction de la photographie assurée par un disciple du Dogme, et une dramatisation excessive du moindre événement ; ainsi, l'annonce de leur future libération est accueilli par les interpellés comme la rentrée dans l'atmosphère d'Appolo XIII dans la salle des opérations de Houston, ou comme l'extermination du dernier alien d'"Independance Day".

L'émergence du mouvement altermondialiste a rarement été traité au cinéma, à plus forte raison américain. Mais un tel sujet méritait un traitement bien moins stéréotypé et un rtyhme beaucoup moins mollasson, et on ne peut que regretter le gachis de cette occasion, à plus forte raison avec autant d'acteurs qui auraient pu servir un scénario autrement plus convaincant. Dommage !

Cluny
Par Cluny - Publié dans : critiques de mai 2008 - Communauté : Cinéma
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