Quantcast

Combien de critiques ?

A ce jour, il y a 536 critiques publiées dans ce blog.

Pages vues

A la télévision cette semaine

Les Aventures de Tintin

Sur Canal +

Intouchables

Sur Canal +

L'Arnacoeur

Sur Canal +

Alpha Dog

Le 21/12/12 à 01:10 sur France 2

La première étoile

Le 23/12/12 à 20:45 sur France 4

 

Recherche

Recommander

Syndication

  • Flux RSS des articles

Calendrier

Décembre 2012
L M M J V S D
          1 2
3 4 5 6 7 8 9
10 11 12 13 14 15 16
17 18 19 20 21 22 23
24 25 26 27 28 29 30
31            
<< < > >>

critiques d'octobre 2007

Samedi 27 octobre 2007 6 27 /10 /Oct /2007 16:36

Film américain de Gus Van Sant

 

Interprètes : Gabe Nevins (Alex), Daniel Liu (Detective Lu), Jake Miller (Jared)

 

Parano.jpg

 

Durée : 1 h 25

 

Note : 8/10

 

En deux mots : Troisième volet de la trilogie sur la solitude de l'adolescence. Gus Van Sant se cite un peu, mais il rentre une nouvelle fois avec brio dans l'incommunicabilité de cet âge.

Le réalisateur : Né en 1952 dans le Kentucky, Gus Van Sant est diplômé de la Rhode Island School of Design. En 1976 il s'installe à Los Angeles où il s'intéresse aux marginaux qui ourniront le thème de plusieurs de ses films. En 1985 il tourne "Mala Noche", romance homosexuelle tournée en 16 mm. Il réalise ensuite "Drugstore Cowboys" (1989), "My Own Private Idaho" (1992), "Even Cowboys get the Blues"(1995) et "Prête à tout" (1996). Il tourne deux films grand public sur des sujets proches : "Will Hunting" (1998) et "A la Rencontre de Forrester" (2001). Il obtient la Palme d'Or en 2003 avec "Elephant" sur le massacre de Columbine, suivi de "Gerry" (2004) et "Last Days" (2005) sur les derniers jours de Kurt Cobain.

Le sujet : Alex est lycéen à Portland, et il partage avec son ami Jared une passion pour le skate. Avec lui, il découvre le Paranoïd park, un skatepark mal famé. Un soir, en revenant du Park, il tue par accident un vigile des chemins de fer. Vu la proximité entre le lieu du crime et le Park, la police soupçonne vite la communauté des skateurs, et l'inspecteur Lu commence à enquêter au lycée.

La critique : "Paranoïd Park" se présente comme le troisième volet d'une trilogie comprenant aussi "Elephant" et "Last Days", et ayant comme thème commun des personnages adolescents -ou adulescent pour Kurt Cobain- enfermés dans un exil intérieur. Moins avant-gardiste que "Gerry", moins jusqu'au-boutiste que "Last Days", cet adaptation du roman de Blake Nelson ne revient pas pour autant à la linéarité de ses succès hollywoodiens, "Will Hunting" ou "A la Rencontre de Forrester".

Mieux, il représente un brillant condensé de ce que sait faire Gus Van Sant, sans que cela ne tourne à l'exercice de style superficiel, car ce brio est constamment au service de l'histoire (très simple), et surtout à celui de la description de la distance au monde de son héros. Il est aidé en cela par Christopher Doyle, le directeur de la photo de Wong-Kar-Wai, qui jongle avec virtuosité entre un 8 mm au très gros grain pour les scènes de skate, et un 35 mm aux teintes parfois saturés pour saisir les nuances du climat océanique qui baigne Portland, en écho aux turbulences intérieures d'Alex.

Ils utilisent les ralentis, la faible profondeur de champ et même les flous, les longs travelings avant, alternant caméra stable, comme dans ses films précédents, et caméra ultra-mobile, pour épouser la sinuosité des skates. Gus Van Sant reconnait d'ailleurs que c'est le travail que Chris Doyle a effectué pour le réalisateur de "In The Mood for Love" qui l'a poussé à faire appel à lui : "J'ai vraiment essayé de pousser Chris dans un territoire instable, un territoire "grand angle", aussi à cause des derniers films de Wong-Kar-Wai que j'avais vus, en particulier Les Anges Déchus." 

Et puis, il y a la pulsation permanente apportée par la musique, parfois en harmonie avec l'image, parfois en décalage totale, comme lors de la scène de rupture, où Jennifer habillée en cheerleader apprend qu'Alex la laisse tomber et l'agonit d'injures, sans qu'on entende un mot de leur dispute, écrasée par la musique d'"Amarcord" jouée sur un vieux 33 T. Là, ce mutisme illustre la coupure d'Alex avec son environnement ; car le recours à ces distorsions s'expliquent par la volonté d'adopter le point de vue d'Alex, comme le long moment où le vigile le regarde, alors qu'il a été coupé en deux par le train et n'aurait certainement pas eu la force de tenir cette position si longtemps ; ou encore le dépucelage de Jennifer, résumé à un gros plan fixe sur une frange de cheveux blonds en train de s'agiter.

De même, ce point de vue exclut les adultes du champ de vision, comme dans "Elephant". La mère est filmée de dos, de loin, ou carrément laissée hors cadre ; le père, lui, est flou, la mise au point étant faite sur Alex. Le seul adulte qui est filmé normalement est l'inspecteur, représentatif de la menace qui pèse sur Alex.

On retrouve de nombreuses citations des autres films de Gus Van Sant, comme ces longs traveling arrière dans les couloirs du lycée, tirés de "Elephant", ou ce long et quasi imperceptible traveling avant sur la table où Alex est interrogé, et qui finit sur le visage de l'adolescent au moment précis où l'inspecteur fait part de ses soupçons, reprise de celui de "Last Days" qui commençait loin hors de la maison et se finissait sur le visage de Blake au moment où il retrouvait un peu de vie en jouant de la musique.
Et le plan-clé d'Alex se lavant de sa culpabilité et de sa peur sous la douche rappelle par sa durée et son jeu de lumière le plan final de "Gerry".

Construit comme les précédentes œuvres de Gus Van Sant à l'aide de flash backs, de répétitions et de transitions cut, "Paranoïd Park" est un film brillant et passionnant, aussi intéressant par ce qu'il montre que par les larges zones d'ombre qu'il laisse entrevoir.

Cluny

Par Cluny - Publié dans : critiques d'octobre 2007 - Communauté : Cinéma
Ecrire un commentaire - Voir les 1 commentaires
Dimanche 21 octobre 2007 7 21 /10 /Oct /2007 15:54

Film américain de Tony Gilroy

Interprètes : George Clooney (Michael Clayton), Tom Wilkinson (Arthur Edens), Sidney Pollack (Marty Bach) 



Clayton.jpg

 

Durée : 1 h 59

Note : 5/10

En deux motsPolar confus, longuet et sans surprise.

Le réalisateur : Né à Manhattan, Tony Gilroy écrit son premier scénario en 1993, "Le Feu sur la Glace", pour Paul Michael Glaser. Il écrit ensuite les scénarii de "Dolores Clairbone" (1995), "L'Associé du Diable" (1997) ou de "L'échange" (2001). Il a aussi signé les scripts des trois films de la trilogie Jason Bourne.

Le sujet : Brillant avocat new-yorkais, Michael Clayton a accepté d'arrêter de plaider pour arranger par tous les moyens les ennuis des riches clients du cabinet pour lequel il travaille. Alors qu'il a besoin d'argent, il découvre que son ami Arthur, avocat dans le même cabinet, a monté un dossier contre U/North, un trust de la chimie client de leur cabinet, et qui a empoisonné de nombreux agriculteurs.

La critique : Une amie me disait il y a quelques temps qu'elle n'irait pas voir "Michael Clayton", car elle avait l'impression que toute l'histoire était contenue dans la bande-annonce. Elle avait raison, mais ce qu'elle ne pouvait pas deviner, c'est que le seul effet supplémentaire apporté par les presque 2 heures du film, c'était précisément la dilution artificielle de cette simplicité narrative.

Le film puzzle est à la mode, depuis "Amours Chiennes" ou "Traffic". Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si, aux côtés de Sidney Pollack et d'Anthony Minghella, on retrouve Steven Soderbergh comme producteur délégué de "Michael Clayton". Le sujet, à savoir une class action de petits propriétaires ruraux contre une multinationale qui les a empoisonnés, avait tout pour séduire le plus jeune vainqueur d'une Palme d'Or : il l'avait traité dans "Erin Brockovich".

Mais tout oppose le combat de la nunuche sympathique jouée par Julia Roberts au polar emberlificoté de Gilroy. La clarté narrative, tout d'abord. Soderbergh, pourtant capable de construire des récits complexes, comme "Solaris" ou "The Good German", avait choisi la simplicité chronologique en plaçant le spectateur dans la même position que celle de son héroïne qui découvrait en même temps qu'eux les arcanes du dossier. 

Ici, au contraire, tout est fait pour opacifier artificiellement la compréhension du spectateur : flash-backs, présentation elliptique de fragments de l'intrigue, décalages fréquents entre les images et la bande-son. Les gens parlent par périphrases, citent des personnages non identifiés et des faits décontextualisés, et comme nous ne possédons pas tous un doctorat en droit comparé, on achève de se perdre au petit jeu de qui est qui.

Et comme tout serait encore trop simple comme ça, on nous balance la vie privée de Michael sur le même mode, et on est drôlement embêté que Timy ait piqué les quatre pneus Michelin de Stéphanie, même si on ne comprend pas trop pourquoi cela met tant en colère notre héros.

L'effet de cet embrouillamini ne se fait pas attendre : on s'ennuie vite, et ferme. Quand les explications arrivent enfin, c'est surtout l'impression de mille fois déjà-vu qui prédomine, jusqu'au coup de théâtre final paresseux. Certains critiques ont évoqué "Syriana", et c'est assez juste : les mêmes causes (la déstructuration artificielle du récit) produisent les mêmes effets (le désintérêt progressif).

La comparaison avec "Erin Brockovich" ne se limite pas à cet aspect, puisque la photographie du film de Soderbergh était baignée de lumières chaudes, alors que dans "Michael Clayton" prédomine une image blafarde et bleutée, à l'unisson du jeu mono-expressif de George Clooney, tout en oeil sombre et en crispation de mâchoires.

Le propos politiquement correct (empoisonner les gens, c'est pas bien, chercher à faire de l'argent à tout prix non plus) ne suffit pas à compenser la mollesse dépressive de l'ensemble et à distinguer "Michael Clayton" du tout-venant de la production américaine.

Cluny

Par Cluny - Publié dans : critiques d'octobre 2007 - Communauté : Cinéma
Ecrire un commentaire - Voir les 0 commentaires
Samedi 20 octobre 2007 6 20 /10 /Oct /2007 19:51

Film sud-coréen de Lee Chang-Dong

Titre original : Milyang

Interprètes : Jeon Do-Yeon (Shin-ae), Song Kang-Ho (Kim Jong-Chan), Cho Young-Jin (Park Do-Sup)
 



Mylang.jpg

Durée : 2 h 30

Note : 7,5/10


cannes-logo-copie-1.gif
Prix d'interprétation féminine

 

En deux mots: Mélo épuré, dérangeant, porté par une comédienne impressionnante.

Le réalisateur : Né en 1954 à Daegu, Lee Chang-Dong s'est d'abord fait connaître comme écrivain. En 1993, il écrit le scénario de "L'Ile étoilé". Il passe à la réalisation en 1996 avec "Poisson vert". En 2000, "Peppermint candy" est remarqué à la Quinzaine des Réalisateurs. "Oasis" (2002) raconte l'histoire d'amour entre un délinquant et une paraplégique. En 2003 et 2004, il occupe le poste de Ministre de la Culture.

Le sujet : Shin-ae arrive à Mylyang avec son fils Jun. Elle a quitté Séoul pour ce bled perdu parce que c'est la ville natal de son mari, décédé peu avant dans un accident de voiture. La première personne qu'elle rencontre, un garagiste lourdaud, l'aide à s'installer comme professeur de piano dans cette bourgade provinciale. Elle réussit petit à petit à se faire accepter, jusqu'à ce que Jun se fasse kidnapper, puis assassiner. Elle trouve d'abord le réconfort dans la foi, prise en charge par la communauté évangélique. Convaincue du discours chrétien sur le pardon, elle décide d'aller visiter dans sa prison l'assassin de son fils. Mais quand elle découvre que lui aussi revendique le pardon de Dieu, elle rejette violemment sa foi et se laisse submerger par la douleur.

La critique : Le premier plan du film est un plan fixe en contre-plongée sur un ciel bleu vu à travers un pare-brise. Puis le contre-champ sur un gamin mutique assis à la place du mort avec la voix hors-champ de sa mère, suivi d'un traveling en caméra portée sur Shin-ae qui téléphone à un dépanneur. 2 heures 30 plus tard, le dernier plan cadre à la poursuite de quelques mèches de cheveux le sol d'un coin de jardin laissé à l'abandon. Entre les deux, le parcours de Shin-ae qui découvre que le réconfort ne se trouvait pas au plus haut des cieux, ou, comme le dit Lee Chang-Dong, "que le sens de la vie ne se trouvait pas dans le ciel mais sur la Terre".

Avant le début du récit, Shin-ae a déjà été confrontée au pire, la trahison et la mort de son mari. Pourtant, c'est une femme mutine, gamine même, qui abandonne Séoul et le jugement de sa famille pour repartir à zéro dans un lieu portant l'empreinte du défunt. Etonnamment gamine, réussissant à arracher un sourire à son fils en faisant semblant de croire qu'ils sont collés, tirant la langue à son frère, applaudissant Jun au concours scolaire d'éloquence comme si elle était au stade, ou s'éclatant avec ses toutes nouvelles copines dans un karaoké bien arrosé.

Pourtant malgré la balourdise de Jong-Chan, touchant Séraphin Lampion amoureux, malgré les petits ragots et les gros cancans de ce Saint-Robin coréen, malgré l'inscription Holly Kids, Holly Life du t-shirt de Jun, il y a comme une menace qui plane sur la volonté de renouveau de Shin-ae. Ses sautes d'humeur, son regard absent sont comme une prémonition. Et deux fois, elle panique en ne retrouvant pas son fils qui joue à cache-cache.

Car c'est une des forces de la réalisation de Lee Chang-Dong que de jouer en permanence de changement de tonalité, flirtant parfois avec le fantastique, zappant sur l'émotion brute pour retourner à la contemplation où son sens du détail rend prolifique cet étirement de la durée. Plusieurs scènes très différentes illustrent cette maîtrise : sortant d'un karaoke avec ses amies, Shin-ae découvre la disparition de Jun ; elle se précipite dans la nuit vers le garage de Jong-Chan pour demander du secours, et elle le découvre seul dans sa boutique en train de beugler dans le micro de son karaoke. Cette vision d'insouciance douloureuse la renvoie à sa propre culpabilité et elle repart, seule. Quand elle reçoit le coup de téléphone du ravisseur, on n'entend que ses paroles, entrecoupées de sanglots, avec en bruit de fond la musique lancinante du jeu électronique auquel jouait Jun.

Et alors que beaucoup de scènes sont filmées avec un caméra mobile, souvent très près des acteurs, la scène de la découverte du corps se fait en plan fixe et très large, avec la frêle silhouette de Shin-ae perdue dans l'immensité du décor au milieu des policiers.

La seconde partie du film, à partir de la mort de Jun, semble épouser la perte du sens de la réalité de l'héroïne. On a certes du mal à croire à ce Chemin de Damas aussi brusque, et à la transformation de la jeune veuve irrévérencieuse en dame patronnesse, même si la scène du karaoke des âmes perdues au temple évangéliste est assez époustoufflante. Mais cette conversion hâtive prend tout son sens plus tard, quand elle rejette Dieu en disant : "Dieu a dit qu'il a pardonné l'assassin de mon fils : à quoi ça sert que je lui pardonne, Dieu l'a déjà fait..." La souffrance niée par l'anesthésie des bondieuseries ressort avec une puissance décuplée, et la colère se cumule au désespoir.

Récompensée à juste titre à Cannes, Jeon Do-Yeon réussit à donner vie aux multiples facettes de son personnage, avec une capacité troublante à passer de la futilité à la gravité ; et c'est justement cette absence de transition qui crée le malaise et rend si crédible son personnage pourtant si excessif.

Loin de se résumer à quelques polars violents inspirés du cinéma hong-kongais ou à des films en costumes, le cinéma coréen a été capable ces derniers temps de présenter sur nos écrans trois drames psychologiques intenses et originaux, avec "April Snow", "Time" et "Secret Sunshine". Dans ce pays où le cinéma bénéficiait jusqu'à il y a peu d'un système d'aide à la production proche de celui de la Farnce, espérons que la remise en cause de ces aides au nom du libéralisme et à l'initiative des Américains ne conduira pas à la disparition d'un cinéma d'auteurs aussi intéressant.

Cluny

Par Cluny - Publié dans : critiques d'octobre 2007 - Communauté : Cinéma
Ecrire un commentaire - Voir les 0 commentaires
Vendredi 12 octobre 2007 5 12 /10 /Oct /2007 20:30

Film britannique de Shane Meadows

Interprètes : Thomas Turgoose (Shaun), Stephen Graham (Combo), Jo Hartley (Cynth)
 

England.jpg

Durée : 1 h 37

Note : 6/10

En deux mots : L'endoctrinement skinhead d'un orphelin des Malouines. Tendu, dérangeant et intéressant à la fois.

Le réalisateur : Né en dans le Stadfordshire en 1972, Shane Meadows a tourné la plupart de ses films dans la région de Nottingham. Il a réalisé "Twenty Four Seven" en 1996, et "Room for Romeo Brass" en 1997, deux films inspirés de sa jeunesse.
Il tourne ensuite "Once Upon a Time in the Midlands" en 2002, et "Dead Man's Shoes" en 2004.

Le sujet : Shaun a 12 ans en 1983 ; il vient de perdre son père, soldat tué aux Malouines, et de déménager. A la veille des vacances, il en a assez des moqueries de ses condisciples et des brimades dont il est l'objet. Il rencontre une bande de skinheads qui l'adoptent et l'entraînent dans des fêtes, et lui font découvrir les filles, l'alcool et les Doc Martins.
Mais l'arrivée de Combo, un skin plus âgé qui sort de prison divise la bande. Séduit par le discours ultra-nationaliste du nouveau venu, Shaun décide de le suivre.

La critique : Le film s'ouvre sur un montage d'images d'archives vidéo qui défilent pêle-mêle sur "54 46 was my number" de Toots & the Maytals : Pacman, Thatcher, le Rubik's cube, la grève des mineurs, Lady Di, les émeutes de Notting Hill, K2000 et la guerre des Malouines. Ce télescopage d'images à la fois proches et déjà terriblement démodées annoncent la tension et la violence sous-jacente qui vont traverser le film : violence sociale du chômage et des grandes luttes anti-thatcheriennes, violence de cette guerre dérisoire pour quelques moutons dans l'Atlantique-Sud, avec la vision presque subliminale d'un soldat sur un brancard, la jambe arrachée, violence des institutions qui pratiquaient encore le châtiment corporel dans les écoles, violence du discours des skinheads et du National Front.

Le propos de Shane Meadows, qui a été lui-même skinhead à 12 ans, est clair dès le début du film : c'est la détresse affective qui pousse ces gamins à la haine et à la violence. C'est cette absence insupportable du père qui conduit Shaun à retrouver une famille dans la bande des skins, et c'est la jalousie de voir un Jamaïcain bénéficier d'une vie de famille équilibré qui amène Combo à massacrer Milky, bien plus que l'idéologie raciste.

Le désœuvrement, la peur de l'autre et la musique ska semblent les seuls ciments de cette bande hétéroclite, avec des skins malingres, des hercules de foire, et des adolescentes aux coupes improbables. Cela, et une incapacité à rentrer dans le monde adulte : ils se déguisent, se délectent à tout casser dans une maison abandonnée et à un sauter dans les flaques d'eau, ils font la bombe à la piscine et se passionnent pour un jeu playskool. 

Le caractère autobiographique du film conduit à un certain manichéisme : comme pour les chasseurs, il y aurait les bons skins et les mauvais skins. Les bons seraient tolérants et multiethniques, gentiment déconneurs, et ils feraient même convenablement fonction de garde d'enfants, à tel point que la mère de Shaun leur confie son fils, ne leur reprochant qu'une coupe à la tondeuse un peu hâtive. Les mauvais seraient pollués par une idéologie exogène représentée par l'orateur du National Front.

Film étrange que ce "This is England", à la fois proche dans son propos et très différent dans son traitement de "Hooligans". Ce dernier souffrait d'un scénario beaucoup trop attendu ; à l'inverse, le film de Shane Meadows semble progressivement déraper à l'unisson des délires cyclothymiques de Combo, avec des passages plutôt bien vus comme le jeu de chaises musicales au sein de la bande pour le rôle de tête de turc, et d'autres franchement ridicules comme le flirt de Shaun et de Smell, une grande gigue maquillée comme Kimera.

Le film repose sur Thomas Turgoose qui joue Shaun, constamment à l'écran. Repéré au cours d'un casting sauvage dans un club de jeunes d'un quartier défavorisé, il incarne parfaitement le mélange de dureté et d'innocence de son personnage. Les autres acteurs ne sont pas mal non plus, notamment Stephen Graham qui compose un personnage qu'on aurait pu croiser dans "A Very british Gangster".

Cluny


Par Cluny - Publié dans : critiques d'octobre 2007 - Communauté : Cinéma
Ecrire un commentaire - Voir les 0 commentaires
Dimanche 7 octobre 2007 7 07 /10 /Oct /2007 19:13

Film français de Claude Miller

Interprètes :Cécile de France (Tania), Patrick Bruel (Maxime), Ludivine Sagnier (Hannah), Julie Depardieu (Louise), Mathieu Amalric (François)  


Secret.jpg
 

Durée : 1 h 40

Note : 6/10

En deux motsAdaptation sensible mais parfois un peu compassée du roman de Philippe Grimbert, servie par une distribution impeccable.

Le réalisateur : Né en 1942 à Paris dans une famille juive ashkénaze, Claude Miller entre à l'IDHEC en 1962. Il est assistant réalisateur pour Jean-Luc Godard, Robert Bresson ou Jacques Demy, puis directeur de production pour François Truffaut. Après trois courts métrages, il tourne son premier long en 1975, "La meilleure Façon de marcher", puis en 1977  "Dites-lui que je l'aime". Il rencontre son premier grand succès en 1981 avec "Garde à Vue". Suivent "Mortelle Randonnée" (1983), "L'Effrontée" (1985), "La petite Voleuse" (1987), "L'Accompagnatrice" (1992), "La Classe de Neige" (1998), "Betty Fisher et autres histoires" (2001) et "La Petite Lili" (2003).

 
Le sujet : Enfant chétif, François sent bien qu'il n'est pas à la hauteur de l'attente de son père, sportif accompli. Il s'invente un frère et ne comprend pas le trouble de sa mère quand il découvre au grenier une vieille peluche. Alors que sa famille est juive, son père le fait baptiser et lui-même rejette sa judaïté, jusqu'à ce que les plaisanteries antisémites d'un condisciple lors de la projection d'un film sur les camps de concentration déchaîne sa colère. Louise, sa voisine kiné qui le soigne depuis sa naissance et qui accompagne la famille depuis toujours lui raconte alors ce que ses parents lui ont toujours caché...

La critique : Quand Claude Miller a lu le roman de Philippe Grimbert, il y a tout de suite perçu un écho de sa propre histoire. "Je suis né en 1942. Il n'y a pas beaucoup de survivants dans ma famille : la plupart de mes oncles, tantes et grands-parents ne sont pas revenus des camps de concentration. Enfant puis adolescent, je fus hanté par cette histoire traumatisante et anxiogène. J'en ai conçu des peurs et des phobies. (...) Mais, bizarrement, c'était un thème dont je n'avais parlé dans aucun de mes films précédents." Certes, Claude Miller n'a jamais abordé cette période ; mais le thème du secret familial pesant sur la vie d'un enfant était au cœur d'un de ses films les plus personnels, "La Classe de Neige". 

On retrouve d'ailleurs dans "Un Secret" le même traveling avant sur la porte au fond du couloir, la même ambiance bleutée de dissimulation menaçante. Mais ici, il ne s'agit pas d'un seul secret, mais de toute une série qui s'emboîtent comme des poupées russes, certains évidents, d'autres plus surprenants.

Je n'avais pas lu le roman de Grimbert dont est tiré le scénario. Je ne sais donc pas d'où provient la gêne qui m'a empêché d'adhérer complètement à l'histoire : trouve-t-elle son origine dans un enchaînement des actions trop prévisible parce que trop symbolique de la destinée des juifs pendant la guerre, ou à une réalisation trop parfaite, et donc trop lisse pour un tel sujet ? La volonté de raconter que derrière une extermination de masse qui est parvenu à transformer l'homme en statistique, se trouvent une multitude de destins et d'histoires individuelles, débouche paradoxalement sur l'effet inverse : on passe le film à chercher quel est le véritable sujet, la déception du père, la culpabilité des parents, la judaïté refoulée du fils ?

La scène où à 15 ans, François massacre à coup de poings son voisin coupable de vannes antisémites, alors qu'il venait de proclamer à Louise son refus de se considérer comme juif, est emblématique de l'ensemble du film : on comprend parfaitement pourquoi elle a été écrite, mais justement parce qu'elle n'est justifiée que par cette seule évidence, on n'y croit pas. Il en va de même pour la réalisation, dont la perfection formelle est trop voyante. Le jeu de répétition entre le passé rêvé et la réalité, le choix de la permanence des lieux (la cour de l'immeuble, la piscine de l'Alsacienne) pour renforcer l'impression d'imposture du cadet, tout cela souligne encore un propos déjà très appuyé.

Heureusement, il y a les acteurs, et particulièrement les actrices. Julie Depardieu, vieille fille amie de la famille et confidente de François ; Cécile de France, avec sa beauté légèrement androgyne ; et surtout Ludivine Sagnier, loin des femmes-enfants un peu garces de ses derniers films, capable de faire comprendre d'un regard tout le basculement qui s'opère en elle. 

Cluny 

Par Cluny - Publié dans : critiques d'octobre 2007 - Communauté : Cinéma
Ecrire un commentaire - Voir les 0 commentaires

Abonnez-vous sur Twitter

Pour être prévenu de chaque article, abonnez vous sur Twitter

 

TwittCC.PNG

Catégories

Créer un blog gratuit sur over-blog.com - Contact - C.G.U. - Signaler un abus - Articles les plus commentés