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Les critiques
clunysiennes
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Amateur de cinéma depuis plus de trente ans, je vais en moyenne deux fois par semaine dans les salles obscures. Je vous propose depuis décembre 2005 mes
critiques clunysiennes sur ce blog. Comme toutes critiques, elles sont subjectives, et elles mêmes susceptibles d’être critiquées. Contrairement aux critiques professionnels, n’étant pas
masochiste, je ne vais voir que des films que je pense aimer. M'étant frotté moi-même à la réalisation, je sais ce que chaque film représente d'investissements et d'espoirs individuels et
collectifs, et je prends plus de plaisir à encenser un film qu'à le descendre.
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Le 15/07/13 à 22:45 sur France 3
Le 18/07/13 à 20:45 sur M6
Film hong-kongais de Wong Kar-Wai
Interprètes : Tony Leung Chi Wai (Ip Man), Zhang Ziyi (Gong Er), Chang Chen
(Yixiantian)
Durée : 2 h 02
Note : 8/10
En deux mots : Tout en poussant le film de kung-fu
à son climax, Wong Kar Wai parvient une nouvelle fois à raconter l'histoire de la possibilité d'un bonheur enfui.
Le réalisateur : Né en 1958 à Shangaï, Wong
Kar-Waï suit sa famille quand elle émigre à Hong-Kong en 1963. Diplômé en arts plastiques, il devient assistant de production puis scénariste à la télévision. En 1988, il écrit et réalise
son premier film, "As Tears go by". En 1990, il tourne pour la première fois avec Maggie Cheung et Tony
Leung "Nos Années sauvages". La même année, il sort une fresque historique, "Les Cendres du Temps", et "Chungking Express" tourné de nuit, caméra à l'épaule. En 1997, il réalise "Les Anges déchus" et "Happy together",
tourné en Argentine, et qui obtient le Prix de la mise en scène à Cannes. Son film suivant, "In the Mood for
Love", permet à Tony Leung de décrocher le prix d'interprétation masculine en 2000. Il en tourne en 2004 une suite/variation, "2046".
Wong kar-Waï a été le président du Festival de Cannes en 2006. Il tourne aux États-Unis en 2007 "My Blueberry Nignts".
Le sujet : En 1936 à Foshan dans la Chine du Sud, Maître Ip Man mène une vie heureuse, entre sa famille
et l'école de Wing Chun qu'il dirige. Le grand maître de l'Ordre des Arts Martiaux chinois, Baosen, cherche son successeur. Il vient à Foshan avec sa fille Gong Er, qui maîtrise la figure
mortelle des 64 mains. Ip Man affronte les autres maîtres du Sud et fait la connaissance de Gong Er en qui il reconnaît son égale. Une histoire d'amour impossible commence alors entre eux. Mais
l'invasion japonaise vient plonger le pays dans le chaos.
La critique : "The Grandmaster" est un film fascinant, en ce qu'il nous montre combien la personnalité d'un réalisateur peut
phagocyter le film de genre. On le sait, Wong Kar Wai porte ce projet depuis plus de dix ans, il y a eu 360 jours de tournage étalés sur trois ans, Tony Leung s'est fait deux fractures, la
construction du décor de la maison de plaisir a nécessité six mois, le tournage de la seule première scène a pris un mois : tous les ingrédients sont là, mis en avant dans le dossier de
presse, pour faire de ce film une légende, au côté de "Fitzcarraldo" ou de "Apocalypse Now". Et effectivement, on en prend plein les yeux de la première à la dernière image ;
chaque plan est travaillé, quand bien même il ne dure que quelques fractions de seconde, et c'est le cas de nombre d'entre eux vu le montage syncopé et presque abstrait des scènes de combat
chorégraphiés par Woo Ping Yuen ("Tigre et Dragons" et "Matrix").
À travers le destin de Ip Man, Wong Kar Wai voulait raconter l'histoire des maîtres d'arts martiaux dans la Chine divisée entre le Nord et le Sud, ravagée par l'occupation japonaise et la guerre civile, et comment la plupart de ceux-ci ont pu pérenniser malgré tout leur art grâce à leur morale. C'est cet axe (et accessoirement le talent) qui différencie "The Grandmaster" de "Ip Man" (2008), de Wilson Yip, qui voulait faire de son personnage un héros de la résistance contre les Japonais, réduite à un affrontement sur les tatamis. Wong Kar Wai a donc centré son intrigue autour de la préservation et de la transmission d'un art, et cela nous vaut par moment des enjeux difficiles à suivre entre les tenants du Wing Chun, du Ba Gua, du Xing Yi et du Hung Gar. De plus, la structure narrative habituelle du réalisateur de "In the Mood for Love" faite de flashbacks emboîtés, de voix off et d'intertitres ne facilite pas toujours la compréhension littérale de l'intrigue, sans évoquer la ressemblance de Zhang Ziyi avec l'actrice coréenne Song Hye Kyo qui interprète l'épouse de Ip Man et qui m'a fait les confondre pendant la moitié du film !
Mais les enjeux se décantent progressivement, et se résument à deux éléments : celui centré sur le personnage de Gong Er, la fille du vieux maître Baosen interprétée par Zhang Ziyi qui sacrifie son destin à la défense des enseignements de son père, et celui centré sur la relation entre Ip Man et Gong Er. Et c'est là où on retrouve la quintessence du cinéma de Wong Kar Wai, celui qui fait dire à Gong Er lors de sa dernière rencontre avec Ip Man : "Sans regrets, la vie serait dérisoire". La scène de leur première rencontre au cours du combat dans le Pavillon d'Or annonce leur destin, à l'image de ce ralenti sur leurs visages et leurs bouches qui se frôlent, suspension du temps et suspension dans l'espace qui évoquent violemment le désir inassouvi. Et ce n'est pas un hasard si c'est à Hong Kong qu'ils confrontent leurs regrets dans des scènes splendides : Gong Er confiant ses secrets à un mur tel M. Chow face à un arbre au Cambodge, ou les deux protagonistes filmés à contrejour et au ralenti dans la nuit de Hong Kong sur la musique de Shigeru Umebayashi.
Wong Kar Wai est avec Terrence Malick le seul réalisateur vivant dont on
reconnaît immédiatement le style, et dont chaque plan donne envie d'acheter le DVD pour pouvoir en analyser la composition. Même si ici, on frôle souvent le trop plein, la virtuosité éblouit
toujours autant, à la fois dans la construction du cadre (avec une prédilection pour les gros plans de personnages tournés vers le bord cadre le plus proche, symboliques d'une fermeture annoncée)
que dans la science du rythme et de l'ellipse, à l'image de ce portrait d'une famille heureuse qui vire au noir et blanc avant de s'embraser dans la violence d'une explosion, suivi de l'image
flou de silhouettes kakis, avec le reflet d'un drapeau japonais dans une mare.
Philippe Le Sourd a succédé à Chris Doyle à la photographie, mais on retrouve bien la palette de Wong Kar Wai, peut-être un peu plus ocre, avec des images superbes, que ce soit dans la captation d'un détail, un bouton vacillant sur une table ou le glissement d'un pied lors d'un combat, ou dans le plan d'ensemble, comme les funérailles de Maître Baosen qui évoque "Ivan le Terrible" ou le combat dans la gare. Tony Leung retrouve WKW pour la septième fois, établissant la continuité avec les personnages des films précédents ; mais c'est Zhang Ziyi qui est au centre du film, filmée comme Hopper savait isoler par la couleur un personnage dans ses tableaux de groupe. Ainsi la voit-on dans le Pavillon d'Or, seule femme aux cheveux lisses au milieu des filles aux coiffures frisées, et la blancheur de son visage s'oppose aux arabesques des costumes et du décor.
Plus corseté par le propos auquel il s'est astreint que ses trois films précédents, "The Grandmaster" séduira sans doute moins le public occidental que "In The Mood for Love". Pourtant, c'est aussi la démesure de ce projet et l'impression qu'une partie de l'intention initiale s'est évaporée lors du montage qui rend finalement ce film tout aussi attachant, avec le sentiment au bout de deux heures de combats virtuoses que l'essentiel est ailleurs, dans la façon de restituer en quelques images et en quelques accords la nostalgie douloureuse d'un bonheur entraperçu.
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