Partager l'article ! Main dans la main: Film français de Valérie Donzelli Interprètes : Valérie Lemercier (Hélène Marchal), Jérémie Elkaïm (Jo ...
Les critiques
clunysiennes
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Amateur de cinéma depuis plus de trente ans, je vais en moyenne deux fois par semaine dans les salles obscures. Je vous propose depuis décembre 2005 mes
critiques clunysiennes sur ce blog. Comme toutes critiques, elles sont subjectives, et elles mêmes susceptibles d’être critiquées. Contrairement aux critiques professionnels, n’étant pas
masochiste, je ne vais voir que des films que je pense aimer. M'étant frotté moi-même à la réalisation, je sais ce que chaque film représente d'investissements et d'espoirs individuels et
collectifs, et je prends plus de plaisir à encenser un film qu'à le descendre.
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Le 21/12/12 à 01:10 sur France 2
Le 23/12/12 à 20:45 sur France 4
La critique : Contrairement à beaucoup, je n'avais pas été emballé par "La Guerre est déclarée", pourtant salué par une standing ovation de 17 minutes à Cannes et 830 000 entrées France. J'avais été touché par l'histoire, j'avais adhéré à l'angle d'attaque, le refus de se laisser abattre par le pire et la volonté de vivre malgré tout ; mais j'avais surtout été agacé par l'empilement de trucs piochés à droite et à gauche qui me faisait penser à propos du style du film à la réponse de Guillaume de Baskerville à la question d'Adso de Melk sur quelle langue parle Salvatore dans "Le Nom de la rose" : "Toutes, et aucune." Pourtant, mollesse de la programmation en période de fêtes oblige, et volonté de vérifier si ces afféteries étaient un accident ou une marque de fabrique, direction "Main dans la Main" en avant-première.
Par rapport au précédent, le sujet du film est nettement plus futile : l'attraction fusionnelle entre deux êtres. L'attraction plutôt que l'amour, puisqu'Hélène et Joachim s'embrassent par accident et c'est de ce contact furtif que nait l'enchantement, au sens magique du terme. Ils sont collés l'un à l'autre, forcés ainsi à cohabiter nuit et jour alors que pourtant tout les oppose. Sujet finalement bien mince, même si comme on le devine à la première minute de leur rencontre (suffit d'avoir vu "L'Impossible Monsieur Bébé" !) ils finiront par s'apprivoiser. Du fait de la ténuité de cet argument, Valérie Donzelli s'est vu obligée de développer les personnages secondaires et les situations annexes, et c'est là que le film fait le grand écart entre du pas si mal et du très mauvais.
Le pas si mal, c'est du côté de Joachim et donc de sa soeur Véro, jouée par Valérie Donzelli qui met toute sa conviction dans le personnage de cette fille à la bonhommie sincère et spontanée qui n'a pas peur de montrer sa choré niveau 5°B à une prof de l'Opéra, protégée par un mari placide qui regarde la tornade se déplacer. Le très mauvais, on le retrouve dans l'entourage d'Hélène, entourée de personnages caricaturaux : une secrétaire au look de Mademoiselle Jeanne et à la voix de crécelle, un ministre libidineux, et surtout l'amie pique-assiette et agressive, jouée par une Béatrice de Staël sans aucune nuance, peu aidée par des dialogues du niveau "Je ne vais pas à France Cul, je n'ai pas envie de voir leurs gueules de cul"...
On retrouve dans ce troisième film cet empilement de styles évoqué pour "La Guerre est déclarée". Est-ce que je m'y habitue, que le sujet s'y prête mieux ou que Valérie Donzelli y a mis plus de fluidité ? Toujours est-il que les passages chantés, dansés, ou illustrés musicalement s'insèrent moins artificiellement dans le récit, et on pense parfois à Xavier Dolan et à Gregg Araki. Et puis, il y a quelques scènes très simples qui s'imposent comme des fulgurances, comme celle où Nelly, la secrétaire nunuche d'Hélène, vient lui annoncer qu'elle la quitte pour suivre son fiancé à Winnipeg, et combien elle a aimé travailler avec elle pendant toutes ces années, et où Hélène se rend compte qu'elle ne sait rien d'elle, et qu'elle ne trouve rien à lui dire ; ou encore la crémation, où Valérie Donzelli qui l'a écrite en pensant à l'enterrement de sa mère en plein milieu de la sortie cannoise de "La Guerre est déclarée", sait agglomérer dans une même scène le rire et l'émotion.
Il y a du brio dans de nombreuses scènes, de l'énergie et un vrai sens du rythme qui traverse l'ensemble, une grande justesse du jeu éternellement étonné de Jérémie Elkaïm. Mais il y manque encore une unité qui cimenterait ce qui apparaît encore trop comme une suite de scènes disparates et trop souvent répétitives, quelque chose qui ne fonctionne pas au moment où l'on passe d'une bonne idée scénaristique à sa concrétisation cinématographique. Dommage, car on a l'impression aussi qu'il ne manque pas grand-chose pour que la sauce prenne, et que le talent indéniable de Valérie Donzelli accouche enfin d'un vrai film.
Cluny