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Les critiques
clunysiennes
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Amateur de cinéma depuis plus de trente ans, je vais en moyenne deux fois par semaine dans les salles obscures. Je vous propose depuis décembre 2005 mes
critiques clunysiennes sur ce blog. Comme toutes critiques, elles sont subjectives, et elles mêmes susceptibles d’être critiquées. Contrairement aux critiques professionnels, n’étant pas
masochiste, je ne vais voir que des films que je pense aimer. M'étant frotté moi-même à la réalisation, je sais ce que chaque film représente d'investissements et d'espoirs individuels et
collectifs, et je prends plus de plaisir à encenser un film qu'à le descendre.
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Le 21/12/12 à 01:10 sur France 2
Le 23/12/12 à 20:45 sur France 4
Film français d'Olivier Nakache et Eric Toledano
Interprètes : Omar Sy (Driss), François Cluzet (Philippe), Anne Le Ny (Yvonne)
Durée : 1 h 52
La critique : C'est peu dire que c'est avec une certaine appréhension que je suis allé voir ces "Intouchables". Les deux précédents succés publics et critiques que je suis allé voir se sont avérés très décevants : "The Artist" et "La Guerre est déclarée", ce dernier partageant avec le nouveau film de Nakache et Toledano deux propriétés, à savoir de présenter la "vertu" inattaquable d'être tiré d'une histoire vraie, et de traiter sur un mode léger un sujet grave, le handicap remplaçant ici la maladie d'un enfant. Et puis, ne doit-on pas mettre ce succés foudroyant sur le compte d'une réaction légitime devant la morosité ambiante ? Le public abreuvé de dette grecque et de plans de rigueur n'est-il pas conditionné à plébisciter n'importe quel film, pourvu qu'il soit gai et porte un message de tolérance gentillement consensuel ?
Certes, les bons sentiments irriguent le film, et la fin prévisible émarge bien au registre du happy end démonstratif. L'opposition entre la très grande richesse de Philippe qui semble habiter Versailles et la téci où zone Driss n'évite pas le cliché, et s'ils sont souvent drôles, beaucoup de personnages secondaires, comme les candidats au poste d'aide à domicile ou les proches de Philippe présents à son anniversaire, sont effectivement plutôt caricaturaux.
Mais l'essentiel est ailleurs : "Intouchables" est une comédie, et ce film présente une qualité indéniable pour cette catégorie : on y rit beaucoup. Quand Philippe décide d'embaucher Driss, ils se mettent d'accord sur un contrat au double sens qui tient en trois mots : pas de pitié. Et de fait, si Driss manifeste de nombreux sentiments à l'égard de celui qui passera du statut de patron à celui de confident et d'ami, il ne tombera jamais dans la compassion ou la commisération, rendant ainsi à Philippe son état d'individu à part entière.
La drôlerie du film repose sur deux qualités : la capacité des réalisateurs à surfer sur la crête du politiquement incorrect (la scène de "Pas de bras, pas de chocolat" est jubilatoire, cruelle mais pas méchante), et la formidable énergie naturelle d'Omar Sy. Déjà dans "Nos Jours heureux", Omar était le seul de cette bande de branquignoles que j'aurais eu envie d'engager dans une de mes colos (enfin, du temps où j'en dirigeais) ; si par malheur, je devais avoir besoin d'un assistant de vie, pas de doute sur le candidat que je retiendrais.
Quand il explose de rire à l'Opéra ("Mais c'est un arbre ! Un arbre qui chante !"), ou quand il reconnait le Printemps de Vivaldi ("Bonjour,
vous êtes bien aux Assedics, et le temps d'attente sera de vingt ans ..."), Omar-Driss emporte tout par son attitude de petit garçon des "Habits neufs de l'Empereur", celui qui
affirme que le roi est nu ; il révèle le ridicule de bien des situations, il bouscule les conventions et pousse Philippe à oser sortir de sa condition d'assisté perpétuel. En même temps, sa
confrontation à une autre forme de ségrégation l'amène à dépasser lui-même certains préjugés, comme de mettre des bas (certes, de contention) à un homme.
"Intouchables" est un succés mérité, car ses réalisateurs ont su la plupart du temps éviter à la fois les pièges du mélo et ceux du cliché. Grâce à un indéniable sens du rythme qu'ils confirment après "Nos Jours heureux" et "Tellement proches", Nakache et Toledano offre un film drôle, optimiste et franchement maîtrisé.
Cluny