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Mercredi 28 novembre 2012 3 28 /11 /Nov /2012 06:49

Film belge de Frédéric Fonteyne    

 

Interprètes : François Damiens (JC), Sergi Lopez (Fernand), Jan Hammenecker (Dominic), Alice Paulicevich (Alice)

Durée : 1 h 37

 

Tango-libre.jpg


Note :  7/10

En deux mots : Le triangle amoureux devient quadrilatère, sur fond de vie carcérale et sur un air de tango.

Le réalisateur : Né en 1968 à Uccle, Frédéric Fonteyne fait des études de réalisation à l'IAD avant de réaliser quatre courts métrages entre 1988 et 1993. En 1995 il met en scène la pièce de théâtre Jef. En 1998 il tourne son premier long métrage, "Max et Bobo", une comédie existentielle sur le gérant d'un salon de coiffure. En 1999, il tourne "Une liaison pornographique" avec Nathalie Baye et Sergi Lopez. Il attend quatre ans pour tourner son film suivant, "La Femme de Gilles".

 

Le sujet : JC est un gardien de prison sans histoire et sans relief. Sa seule fantaisie consiste à suivre un cours de tango, où il rencontre une jeune femme Alice. Il la retrouve le lendemain au parloir, où elle rend visite à deux hommes, Fernand son mari et Dominic son amant.

La critique : "Tango Libre", n'est-ce déjà pas un pléonasme ? Le principe même du tango est l'improvisation, la marche dans une direction impromptue, guidée par le seul poids des corps et où la partenaire se laisse aller naturellement sans chercher à deviner les pas. C'est sur ces principes et sur l'opposition entre la liberté consubstantielle à cette danse et l'espace carcéral qu'est construit le quatrième long métrage de Frédéric Fonteyne, réalisateur rare. Il explique ainsi son choix : "le tango et le cinéma ont pour moi un point commun. Tous deux dévoilent des choses sur les corps qu’on n’aurait pas vues sans eux. Le tango révèle la maladresse tragi-comique des personnages, la beauté de cette maladresse. Il véhicule aussi des thèmes comme la passion, la trahison, l’homosexualité latente, le combat pour une femme".

 

La maladresse, c'est d'abord celle de JC, grand escogriffe embarrassé de son corps qui essaie de se soigner en suivant un cours de tango, et qui tente de mettre une frontière entre le quotidien de son métier de maton et la solitude de sa vie, frontière symbolisée par un feu rouge au milieu de nulle part, et réaffirmée désespérément à plusieurs occasions à Alice qui fait irruption dans cette vie bien rangée : le règlement interdit tout contact entre gardiens et proches des prisonniers. Oui mais voilà, des contacts, il y en a eu forcément, puisque sans connaître l'identité de sa partenaire, JC a rencontré Alice sur un parquet. JC, c'est François Damiens, très sobre, qui déplace sa carcasse avec un burlesque ralenti dans un registre keatonien.

 

Une grande part de l'action se déroule en prison, et pourtant, "Tango Libre" n'est pas un film de prison, comme peuvent l'être "Zonzon", " Un Prophète" ou encore " César doit mourir". La condition pénitentiaire n'est qu'une toile de fond, et très vite Frédéric Fonteyne s'affranchit de l'étroitesse de l'espace d'une cellule ou d'un parloir individuel ; il leur préfère le parloir-tables et la cour intérieure qui permettent à la fois la mise en place du triangle amoureux et ce qui constitue le pivot du film, les cours de tango donnés par un détenu argentin, où la fierté machiste réussit à dissimuler l'indiscutable dimension sensuelle de la danse. Dans l'opposition entre le dedans et le dehors, il est intéressant de noter que les appartements de JC et d'Alice sont encore plus claustrophobiques que la prison elle-même : papier-peint sombre et sale, obscurité, espace restreint par des décrochements de murs et des huisseries.

 

Frédéric Fonteyne s'émancipe aussi de cet espace oppressant par le dynamisme du montage, particulièrement dans les scènes de danse où ils alternent les plans larges qui mettent en valeur la dramatisation des postures et les plans serrés sur un détail : un bandana autour d'une cheville, le graphisme d'un tatouage qui émerge d'un col, deux mains qui se joignent. La musique joue aussi un rôle important, jamais redondante mais bien dans l'anticipation de l'action, avec Agnès Obel, Gotan Project, The Supremes ou Lisa Hannigan. On sent chez les acteurs leur adhésion au projet, que ce soit Sergi Lopez qui retrouve Frédéric Fonteyne 13 ans après "Une liaison pornographique", toujours aussi généreux dans son jeu, ou Alice Paulevich qui signe aussi le scénario et qui incarne avec une énergie obstinée cette Catherine (de "Jules et Jim") moderne.

 

Il y a bien quelques longueurs aux deux tiers du film, avec un effet de répétitions des scènes de parloir qui peut provoquer le décrochage. C'est d'ailleurs à ce moment que le scénario oublie un peu le tango éponyme. Heureusement, la scène finale remet le film dans le tempo, avec notamment une savoureuse chorégraphie de François Damiens dans le fameux parloir. Film poétique et atypique, "Tango libre" est symptomatique de ce que Frédéric Fonteyne lui-même définit comme la spécificité du cinéma belge dans toute sa diversité, "cette étrangeté particulière", faite d'"une singularité très forte, une liberté, fragile, qui est toujours un risque".

 

Cluny

Par Cluny - Publié dans : critiques de novembre 2012 - Communauté : Cinéma
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Lundi 26 novembre 2012 1 26 /11 /Nov /2012 21:00
Film Français d'Hugo Gélin

Interprètes : François-Xavier Demaison (Boris), Nicolas Duvauchelle
(Elie), Pierre Niney (Maxime), Mélanie Thierry (Charlie)

Durée : 1 h 44

Freres.jpg

Note :
   4/10 

En deux mots :
Premier film au formatage lacrymal qui sonne faux de bout en bout.

Le réalisateur : Né à 1980 à Paris, Hugo Gélin est le fils de Xavier Gélin et le petit-fils de Daniel Gélin et Danièle Delorme. Il a réalisé deux courts métrages : "La Vie sans secret de Walter Nyons" (2001) et "A l'abri des regards indiscrets" (2002).

 

Le sujet : Boris, 40 ans, Elie, 30 ans et Maxime, 20 ans, partagent leur amitié pour Charlie. Quand celle-ci meurt, ils se retrouvent aux obsèques et découvrent que Charlie leur a demandé de faire ensemble le voyage jusqu'à sa maison en Corse qu'ils devaient faire tous les quatre. .

La critique : Dans le dossier de presse, Nicolas Duvauchelle et Pierre Niney racontent tous les deux la même chose, à savoir combien ils ont ri quand ils ont lu le scénario : " Et puis j’ai reçu celui de Comme des frères et je me suis marré du début à la fin" pour le premier, "J’ai su que j’allais tout faire pour en être, tellement j’ai ri sur de vraies scènes de comédie" pour le second. Je leur fais crédit de leur bonne foi, il est possible, et même plausible qu'ils aient effectivement ri à la lecture du scénario ; et pourtant, je n'ai esquissé un sourire qu'une ou deux fois au milieu d'un agacement qui montait progressivement. Une des deux raisons de l'échec du film repose sur la réalisation, et peut-être encore plus sur le montage : tout est téléphoné, appuyé, étiré, et la maladresse devient vite faute de goût.

 

Les exemples sont légions : le jeu intello incompréhensible que lance Maxime, avec un champ-contrechamp pachydermique pour montrer le décalage entre la jubilation de Maxime et l'incompréhension de ses deux acolytes ; le gag à la kolossal finesse de Maxime qui vomit dans la Porsche Cayenne ; Maxime qui s'indigne qu'Elie s'en fiche de posséder le bateau pirate Playmobil et qui compare cette inconscience au fait de dormir dans la baignoire quand on a Scarlett Johanson dans son lit, ce sur quoi Boris surenchérit "Ou Mireille Darc !", avec silence gêné des deux autres, histoire de bien souligner la différence d'âge. Ce qui était une bonne idée de gag, à savoir le fait que Charlie demande à Elie puis à Boris de passer pour son copain afin de dissuader son metteur en scène qui la poursuit de ses assiduités, et que les deux se succèdent en lui roulant une galoche, devient à l'écran une sène boulevardière du fait d'un tempo systématiquement à contretemps.

 

Mais il y a plus grave encore, ce que je qualifierais de syndrome "Petits Mouchoirs": la volonté de passer du rire aux larmes comme savaient si bien le faire les comédies italiennes de la belle époque. Maladroit dans le registre comique, le film devient vite putassier dans le registre dramatique, à l'image de la scène où le trio apprend la mort de Charlie, avec montée de violon sur gros plans sur les yeux humides, scène qui se répète à la fin de chacun des flashbacks qui reconstituent à rebours la genèse de leur relation à Charlie. Même lourdeur, même impression de fausseté dans la façon de révéler les fêlures de chacun d'eux : la difficulté de Boris d'être le fils d'un grand acteur (cf la bio d'Hugo Gélin), la stérilité d'Elie, et, comble du malheur, le fait d'être un enfant adopté pour Maxime ! Désolé du spoiler, mais vu l'épaisseur de l'enjeu...

 

On sent bien que les acteurs y croient quand même un peu, mais en roue libre et avec un choix de montage qui laisse toujours les trois secondes où tout le plateau attend le "Coupez !" du réalisateur, cette énergie finit par se diluer, à la notable exception de Mélanie Thierry, radieuse dans son rôle de muse et qui profite du choix d'Hugo Gélin de filmer les scènes de flashback de façon plus dynamique que celles du road movie capté avec une pesanteur académique. Quelques répliques échappent à la moulinette de l'étirement : "Je vais changer mon statut sur Facebook, comme ça ma mère saura que c'est fini avec Cassandre. - Ta mère est sur Facebook ???", ou "Ils sont juifs et ils habitent Vichy ? - Ils ont beaucoup d'humour."

 

Il y avait deux bonnes idées de départ : celle du trio de trois âges différents, qui tranche avec les bandes habituelles ("Petits Mouchoirs", "Le Coeur des Hommes"), et celle de ce voyage de trois hommes qu'unit juste le souvenir de l'absente. Malheureusement, faute d'un véritable point de vue, d'un scénario plus approfondi et d'un minimum de rythme, "Comme des frères" se traîne au rythme asthénique de la Caravelle du trio, nouvel exemple après " Populaire" de la comédie française + premier film sans ambition ni réelle consistance.

 

Cluny

Par Cluny - Publié dans : critiques de novembre 2012 - Communauté : Cinéma
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Dimanche 25 novembre 2012 7 25 /11 /Nov /2012 08:22

Film roumain de Christian Mungiu


Titre original : Dupa Dealuri  

Interprètes : Cosmina Stratan (Voichita), Cristina Flutur (Alina), Valeriu Andriuta (Le prêtre), Dana Tapalaga (La mère supérieure)

Durée : 2 h 30

Collines-copie-1.jpg

Note :
8/10
 
En deux mots : Film austère mais passionnant sur la mécanique du pouvoir obscurantiste en ce début de XXI° siècle.

Le réalisateur : Né en 1968 à Lasi, Cristian Mungiu a d'abord étudié la littérature anglo-américaine avant de suivre les cours de l'Ecole de Cinéma de Bucarest. Il officie comme assistant-réalisateur sur "Train de Vie" de Radu Mihaileanu et "Capitaine Conan" de Bertrand Tavernier. Il tourne trois courts-métrages et des publicités, avant de réaliser son premier film, "Occident", en 2002. En 2007, " 4 mois, 3 semaines, 2 jours" emporte la Palme d'or à Cannes. Il participe en 2010 au film collectif "Les Contes de l'âge d'or"

L'histoire : Alina et Voichita se sont connues à l'orphelinat et sont devenues des amies très proches. Quand Alina revient d'Allemagne, elle vient trouver refuge dans le monastère où Voichita est devenue nonne. Elle espère que Voichita quitte le monastère et parte en Allemagne avec elle. Mais Voichita a rencontré Dieu et refuse d'abandonner sa condition.

La critique : Au même titre que les Frères Dardenne, Emir Kusturica ou Bille August, Cristian Mungiu fait partie de ces réalisateurs qui ont le bonheur de plaire à Cannes, alors que même si la sélection est assurée par les mêmes personnes d'année en année, le jury change à chaque fois. Sa première sélection officielle lui a valu la Palme d'Or, et son second film en compétition a raflé le double prix d'interprétation féminine et le prix du scénario. Tant mieux, car sinon, aurions-nous eu la possibilité de voir ces films austères venus de la lointaine Roumanie, avec des sujets peu funky (l'avortement sous le régime communiste, la mort d'une jeune femme au cours d'un exorcisme dans un monastère orthodoxe), qui plus est pour le dernier avec le handicap d'une durée de 2 h 31.

 

Et pourtant, il aurait été bien dommage de passer à côté d'un tel film. Le cinéma offre une ouverture sur le monde, à la fois dans l'approche d'autres cultures et dans l'interrogation de thématiques peu traitées. C'était le cas par exemple d'" Augustine", auquel "Au delà des Collines" m'a fait penser plusieurs fois, notamment par l'approche religieuse de la maladie mentale. C'est le cas de ce nouveau film de Mungiu, qui nous raconte une histoire qui aurait pu se passer bien avant Charcot, et qui pourtant s'est déroulée en 2005 en Moldavie, où une jeune nonne est morte au cours d'un exorcisme pratiqué par un prêtre qui l'avait séquestrée et privée d'eau et de nourriture.

 

Cristian Mungiu s'est inspiré de cette histoire, notamment en travaillant avec Tatiana Niculescu Bran qui a écrit deux non fiction novels dessus. Il s'en est inspiré, mais il a greffé aussi dessus son propre regard, notamment en développant le thème de l'amitié entre Alina et Voichita, écho des personnages d'Otilia et Gabita dans " 4 mois, 3 semaines, 2 jours", déjà une blonde et une brune.

 

Le premier plan cadre la tête d'une femme de dos qui avance entre deux trains à contre-courant du flot de voyageurs qui en descendent. Arrivée au bout, elle découvre l'objet de sa quête de l'autre côté de la voie, lui crie de ne pas traverser, ce qu'Alina fait quand même juste avant que ne passe un autre train, pour se jeter dans les bras de Voichita. Puis on voit les deux dans le bus, en plan italien, on voit juste que Voichita est habillée en noir, et qu'elle se signe. Enfin, les deux femmes montent une colline en plan large, on voit enfin que Voichita porte une robe de nonne, et la caméra pivote et s'élève pour découvrir le monastère où se déroulera l'essentiel de l'intrigue. Tout l'art de Mungiu est concentré dans cette ouverture en trois plans : l'amitié (l'amour ?) entre les deux jeunes femmes d'un côté, point de départ visuel de la narration, et la foi aveugle de l'autre, symbolisée par le monastère.

 

La plupart des réalisateurs nous auraient montré la communauté comme une bande d'arriérées envoûtées par le charisme manipulateur du Père, et la lecture du synopsis nous autoriserait à les qualifier ainsi. Pourtant, notamment grâce aux personnages de Voichita et de la Mère supérieure, Mungiu ne porte pas de jugement autre que la violence des faits, adoptant ainsi la même posture qu'un Asghar Farhadi. Il nous montre aussi la sincérité de la foi de ces femmes et même de cet homme qui pensent bien faire, et qui confrontés à la demande d'amour violente et blasphématoire d'Alina, tentent tout pour parvenir à trouver une solution. Il y a une vraie joie de vivre chez les soeurs, qu'on voit rire en jouant au baccalauréat, et le prêtre que toutes appellent "Papa" tente de concilier des principes d'un autre temps avec une véritable humanité.

 

La scène finale de l'hôpital est d'ailleurs troublante : ce que dit la femme médecin qui constate le décès d'Alvina est juste, mais sa virulence mauvaise opposée à la réelle douleur de la mère entraîne notre sympathie du côté de cette dernière. Comme dans "4 mois, 3 semaines, 2 jours", Mungiu donne du temps aux scènes pour laisser les sentiments s'installer ; pourtant, ou ne s'ennuie pas car l'enjeu finit par devenir passionnant, et parce qu'il y a du rythme dans le montage, notamment dans le passage de plans serrés à des plans larges, comme celui répété où les nonnes portent Alina ligotée sur sa planche de la sacristie à l'église.

 

Cosmina Stratan et Cristina Flutur sont deux actrices débutantes, et elles ont eu l'honneur du prix d'interprétation à Cannes, récompense méritée tant elles portent la tension douloureuse du film, la première par une foi sourde loin de l'exaltation d'une Hadewijch ou d'une Jeanine Deckers, la seconde par un entêtement éperdu qui rappelle les personnages dardenniens. Par l'impressionnante maîtrise de sa mise en scène, par la beauté époustouflante de sa photographie, par l'efficacité évidente de sa direction d'acteurs, "Au-delà des collines" confirme tout le talent de Cristian Mungiu ; tant qu'à donner une deuxième Palme, le jury aurait été mieux inspiré de la lui attribuer plutôt que de couronner le très surestimé "Amour".

 

Cluny

Par Cluny - Publié dans : critiques de novembre 2012 - Communauté : Cinéma
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Mercredi 21 novembre 2012 3 21 /11 /Nov /2012 20:22
Film danois de Nikolaj Arcel

Interprètes : Mads Mikkelsen (Johann Struensee), Alicia Vikander
(Caroline), Mikkel Boe Folsgaard (Christian VII) 

Durée : 2 h 16

Affair.jpg

Note :
   6/10 

En deux mots :
Un sujet intéressant, mais plombé par une réalisation académique et délayée.

Le réalisateur : Né en 1972 à Copenhague, Nikolaj Arcel est diplômé de l'École nationale danoise de cinéma. En 2001, Nikolaj Arcel tourne un court métrage "Woyzecks sidste symfoni".Il écrit plusieurs scénarios, dont celui de "Fighter" en 2007 et celui du film de Niels Arden Oplev, "Millénium" en 2009. En 2004, il réalise le thriller "King's Game" qui sera un immense succès au Danemark, enchaîne avec le film d'aventure "L'île aux sorciers" en 2007, et la comédie dramatique "Truth About Men" en 2010.

 

Le sujet : En 1769, la jeunesse princesse anglaise Caroline Mathilde de Hanovre débarque au Danemark pour épouser le roi CHristian VII. Celui-ci, atteint de folie, la délaisse au profit de prostituées. Le nouveau médecin du roi, l'Allemand Johann Struensee, fils de pasteur et adepte de Lumières, se rapproche de Caroline Mathilde jusqu'à devenir son amant. Ensemble, ils poussent le roi à révoquer les ministres conservateurs et à prendre des mesures libérales.

La critique : A ma courte honte, je dois avouer que j'ignorais tout de l'histoire du règne de Christian VII du Danemark, qui apparemment décida du sort du Royaume de Hamlet, même si finalement ce fut le règne de son fils Frédéric VI qui abolit définitivement le servage et établit les réformes libérales. Session de rattrapage donc, avec ce "Royal Affair" présenté par certains comme un nouveau "Barry Lyndon". Bigre, rien que ça ! Certes, nous sommes à la même époque, la deuxième moitié du XVIII° siècle, Alicia Vikander porte le même chapeau penché que Marisa Berenson, et deux-trois fois on peut se demander si la scène a été éclairée à la bougie. Mais la comparaison s'arrête là, car il y avait dans le destin du parvenu irlandais l'itinéraire d'une boule de flipper, alors que la narration de Nikolaj Arcel est on ne peut plus linéaire, pour ne pas dire téléphonée.

 

Le film démarre plutôt bien, avec l'arrivée de la toute jeune Caroline Mathilde (15 ans) qui rappelle celle de Marie-Antoinette dans le film de Sofia Coppola, avec le même long voyage en carrosse qui marque l'entrée dans l'âge adulte, puis la rencontre avec son futur époux, où un montage habile permet de faire comprendre qu'un regard du souverain suffit pour constater que le jeune princesse n'a pas les arguments pour séduire l'amateur de prostituées à la poitrine opulente. Christian est interprété par Mikkel Boe Folsgaard qui a reçu l'Ours d'Argent du meilleur acteur à Berlin pour cette prestation ; à mi-chemin entre Tom Hulce dans "Amadeus" et Helmut Berger dans "Ludwig", il joue très bien cette folie qu'on diagnostiquerait aujourd'hui comme une forme de paranoïa, avec ce mélange d'incapacité et de violence arbitraire, comme quand il pique un caprice devant le palais royal désert pour son retour de voyage et qu'il exige "Amenez-moi le peuple !".

 

L'apparition de Johann Friedrich Struensee, fils de pasteur et austère partisan de l'Aufklärung, version allemande des Lumières, vient éteindre le peu de folie qu'il y avait dans le récit. Struensee est joué par Mads Mikkelsen, récompensé lui à Cannes pour son rôle dans "La Chasse", et il met tant de gravité compassée dans son personnage qu'il réussit à rendre cet homme qui supprima la censure et le servage finalement assez antipathique. Caroline Mathilde n'était pas une beauté, Wikipédia dixit, ce que confirme son portrait à 20 ans par Jens Juel. Nikolaj Arcel ne doit pas avoir internet, puisqu'il a choisi l'actrice suédoise Alicia Vikander pour incarner avec grâce et fièvre la jeune souveraine.

 

Est-ce la durée excessive (2 h 16) pour une telle histoire ? Est-ce la musique anesthésiante de Gabriel Yared ? Est-ce l'académisme sans surprise de la réalisation ? Toujours est-il que ce sujet intrinsèquement intéressant finit par nous lasser, faute de savoir vraiment de quoi on parle, à l'image de l'ambiguïté de cette question de Caroline à Johann "Serons-nous libres un jour ?"  Ni franchement drame romantique, ni réellement étude politique, "Royal Affair" manque surtout du souffle romanesque qui portait "Barry Lyndon" ou "Mission", pour ne prendre que deux étalons du drame historique.

 

Cluny


Par Cluny - Publié dans : critiques de novembre 2012 - Communauté : Cinéma
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Lundi 19 novembre 2012 1 19 /11 /Nov /2012 22:58

Film français de Claude Miller      

 

Interprètes : Audrey Tautou (Thérèse Desqueyroux), Gilles Lellouche (Bernard Desqueyroux), Anaïs Demoustier (Anne), Chaterine Arditi (Mme De la Trave)

Durée : 1 h 48

 

Desqueyroux.jpg


Note :  8/10

En deux mots : Le dernier film de Claude Miller, point d'orgue très réussi d'une oeuvre qui nous a accompagnés durant quarante ans.

Le réalisateur : Né en 1942 à Paris dans une famille juive ashkénaze, Claude Miller entre à l'IDHEC en 1962. Il est assistant réalisateur pour Jean-Luc Godard, Robert Bresson ou Jacques Demy, puis directeur de production pour François Truffaut. Après trois courts métrages, il tourne son premier long en 1975, "La meilleure Façon de marcher", puis en 1977  "Dites-lui que je l'aime". Il rencontre son premier grand succès en 1981 avec "Garde à Vue". Suivent "Mortelle Randonnée" (1983), "L'Effrontée" (1985), "La petite Voleuse" (1987), "L'Accompagnatrice" (1992), "La Classe de Neige" (1998), "Betty Fisher et autres histoires" (2001), "La Petite Lili" (2003), "Un Secret" (2007) et " Marching Band" (2009).

 

Le sujet : Thérèse Larroque est l'héritière d'une grande propriété de pins dans les Landes. Depuis l'enfance, elle est promise à Bernard Desqueyroux, propriétaire des terres mitoyennes : leur union donnera naissance à une domaine de 4 500 hectares. Mais Thérèse est une femme qui lit beaucoup, et qui supporte mal les conventions de cette bourgeoisie terrienne dont elle est issue.

La critique : A bien y regarder, les meilleurs films de Claude Miller racontent tous l'histoire d'une femme en butte avec son environnement : "L'Effrontée", "La petite Voleuse", "La Petite Lili", et il n'est finalement pas étonnant que quand son producteur Yves Marmion lui a proposé d'adapter une oeuvre de François Mauriac, ce soit vers "Thérèse Desqueyroux" qu'il se soit tourné pour entreprendre ce qu'il savait être son dernier film. A sa façon de capter les émois de cette femme qui méprise les conventions, se réfugie dans la lecture pour fuir la trivialité de son milieu et observe la pétrification d'un monde prêt à disparaître, il aurait pu dire tel Flaubert, "Thérèse Desqueyroux c'est moi" ; comparaison renforcée par le fait qu'il y a de l'Emma Boravy dans ce personnage, certes mâtinée d'un peu de Marie Besnard.


Déjà à ma génération, on ne lisait plus François Mauriac, trop vieux, trop gaulliste. Je me suis donc plongé pour la première fois dans une de ses oeuvres dans la perspective de cette critique, et si le style m'a semblé effectivement d'une autre époque, la férocité de la dénonciation des convenances bourgeoises et machistes m'a séduit. Claude Miller a fait le choix judicieux de ne pas reprendre la structure en flash back du roman ; chez Mauriac, le récit commence avec le non-lieu de Thérèse, et plus de la moitié du livre est constitué des pensées de son héroïne alors qu'elle rentre à Argelouse retrouver son mari. Il lui a préféré une structure linéaire, partant de l'amitié adolescente entre Anne et Thérèse, gommant un peu trop le léger mépris de Thérèse pour sa future belle-soeur, et déroulant chronologiquement le fil de l'histoire, jusqu'à la même scène finale au Café de la Paix.

 

Il a par contre été extrêmement fidèle aux dialogues (dès la première scène, le "Mettez vos gilets, c'est une glacière" de Tante Clara) et à certains détails, comme la façon d'Anne de caresser de ses lèvres l'alouette qu'elle vient d'abattre avant de lui tordre le cou. Du fait de cette fidélité, la réussite du film reposait sur la capacité des acteurs à mettre ces dialogues en bouche, à donner l'impression qu'ils viennent naturellement. Pari réussi, déjà pour Audrey Tautou qui incarne le mélange d'obstination douloureuse et de vulnérabilité de celle dont Mauriac disait que son drame était celui de l'inadaptation à la vie. Filmé souvent dans la pénombre ou à contre-jour, son visage buté en dit plus encore que l'impertinence de ses saillies.

 

Bernard justement, joué par Gilles Lellouche qui disait hier à l'avant-première qu'il pensait que "Thérèse Desqueyroux" était son plus beau rôle, son plus beau film et sa plus belle rencontre avec un réalisateur. Je confirme : il parvient à donner vie à ce personnage plein de la suffisance bornée des rejetons de sa race, mais aussi d'un amour maladroit pour cette femme trop intelligente, cette "fille qui réfléchit" comme la définit avec reproche sa mère. La tendresse de Miller pour les monstres ordinaires transparait dans sa façon de saisir la part de générosité dans ce bloc de certitude modelé par la reproduction sociale de sa caste et de son sexe, symbolisé par ce plan où on le voit parader lors d'une procession religieuse.

 

"Thérèse Desqueyroux" est aussi indissociable des Landes que Giono peut l'être des Basses-Alpes. Claude Miller sait rendre grâce à cette attache en filmant les forêts de pins sous toutes les lumières ou en captant le clair-obscur des maisons de maîtres d'Argelouse et de Saint-Clair. La superbe photographie à dominante sépia de Gérard de Battista qui l'accompagne depuis "La Petite Lili" apporte l'écrin souhaité à cette histoire vénéneuse, et Mathieu Alvado plaque quelques accords de piano à la Erik Satie qui ponctue avec discrétion (c'est si rare aujourd'hui !) l'avancée du récit. Film testament, "Thérèse Desqueyroux" apporte un point final à une des filmographies les plus riches et les plus cohérentes du cinéma français, tout en nous offrant un modèle d'adaptation littéraire, à la fois respectueuse du texte et de l'esprit tout en l'enrichissant du regard d'un véritable auteur.

 

Cluny


Par Cluny - Publié dans : critiques de novembre 2012 - Communauté : Cinéma
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