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Samedi 27 octobre 2012 6 27 /10 /Oct /2012 17:09
Film américain de Sam Mendes

Interprètes : Daniel Craig (James Bond), Judi Dench
(M), Ralph Fiennes (Mallory), Javier Bardem (Raoul Silva)

Durée :
2 h 23

Skyfall.jpg 

Note :
  8/10 

En deux mots :
Sam Mendes s'empare brillamment du mythe James Bond pour y traiter ses sujets : la fidélité, la perversité maternelle, le devoir. 

Le réalisateur :
Né en 1965 en Angleterre, diplômé de Cambridge, Sam Mendes a commencé au théâtre. Engagé par la Royal Shakespeare Company en 1992, il monte aussi plusieurs pièces à Broadway. Spielberg lui confie la réalisation de "American Beauty" en 1999. Il tourne "Les Sentiers de la Perdition" en 2002, avec Tom Hanks et Paul Newman,  "Jarhead, la fin de l'innocence" en 2006 sur la première guerre du Golfe, puis "Les Noces rebelles" et "Away we go" en 2009.


Le sujet : Au cours d'une mission en Turquie, Bond est donné pour mort et une liste des principaux agents occidentaux infiltrés dans les groupes terroristes tombe entre les mains d'une mystérieuse organisation. Peu après, le MI6 est victime d'un attentat, et M est obligée de replier ses locaux dans un QG souterrain datant de la seconde guerre mondiale. Le nouveau responsable du comité qui supervise le MI6 menace de mettre M à la retraite. James Bond réapparait, et M lui confie la mission de retrouver à Shangai celui qui a dérobé la liste.


La critique : On l'oublie souvent, mais l'auteur de "American Beauty" est un sujet de sa Gracieuse Majesté. Quoi de plus naturel donc pour lui que de tourner ce 23° épisode des aventures du plus célèbre agent secret britannique, l'année des 50 ans de la série. Quand je dis série, il faudrait plutôt dire franchise, tant au cours de ce demi-siècle, la nature des films a changé en même temps que les interprètes de 007 et les évolutions de la géopolitique, et si les méchants sont toujours des organisations du crime en free-lance qui se déplacent en hélicoptère militaire en Ecosse sans être dérangés, leurs clients ont changé : fini les Soviétiques, les Cubains, les Nord-Coréens, place aux terroristes.

 

Donc, Sam Mendes s'est emparé du cahier des charges et il est parvenu à le respecter tout en y mettant indubitablement sa patte. Le film s'ouvre sur une des plus belles scènes de poursuite d'un James Bond, et pourtant, dans les 22 films précédents, on s'est déjà poursuivi en motoneige, en voiture sous-marine, ou en char d'assaut ; là, aux motos sur les toitures du grand bazar d'Istanbul, succèdent une course sur les toits d'un train où James remplace le flingue qu'il a perdu par une pelleteuse, avant de subir un tir ami. Suit la deuxième figure de style obligée, le générique. La chanson est signée Adèle, une des plus belles depuis celle de Shirley Bassey dans "Goldfinger", alors que se déroule à l'écran un kaléidoscope gothique et psychanalytique, avec une citation de la scène des miroirs dans "L'Homme au pistolet d'or": c'est clair, amateurs d'action et amateurs de cinéma vont être servis.

 

Il y a bien une mystérieuse organisation, il y a bien un vaste complot, mais pour une fois l'appât du gain ne semble pas être le motif principal : la cible se trouve au coeur du MI6, puisqu'il s'agit de M, jouée pour la septième fois par Judi Dench. James réapparait, juste un peu éraflé de s'être pris deux balles dans le caisson et d'avoir fait une chute de cent mètres dans un rapide, et la chef menacée et l'agent revenu d'entre les morts vont mener un dernier combat seuls contre tous, qui vont les conduire via Shangai et Macao jusqu'à l'Ecosse natale de Bond. Il y a une dimension crépusculaire dans ce chemin de croix, et les références au passé qui n'est plus pullulent : Churchill, évoqué par son QG sous terrain et le bulldog en porcelaine sur le bureau de M, l'Aston Martin que j'avais eu en Dinky Toys à Noël 64, celle avec le siège éjectable, ou l'opposition entre les gadgets sophistiqués des anciens épisodes et la technologie minimaliste du nouveau Q, archétype du geek boutonneux. Cette impression crépusculaire culmine dans la scène de la fin, tournée sous un ciel de feu et de fumée qui évoquent celui des puits de pétroles koweitiens enflammés dans "Jarhead".

 

James lui-même a pris un coup de vieux, et il a du mal à rester accroché à deux mains sous un ascenseur, c'est dire. Daniel Craig, excellent, est filmé assez crûment, poches sous les yeux et barbe sarkozienne, même si sa plastique continuera à en faire rêver plus d'une. Car bien entendu, autre figure de style, il croise des James Bond girls, Naomie Harris, pétillante, et Bérénice Marlohe, un peu nunuche. Mais la figure de style la plus importante reste celle du méchant, et là, on ne peut pas se plaindre. Après avoir incarné un des pires psychopathes de l'histoire du cinéma avec Anton Chigurh dans " No Country for Old Men", Javier Bardem rempile dans le rôle de Raoul Silva, coiffé comme Michou et débitant une parabole sur les rats qui s'entretuent dans un très beau plan séquence.

 

Il y a aussi beaucoup d'humour dans les dialogues, notamment dans le jeu de ping-pong entre M et James Bond, comme par exemple quand 007 commente sa nécro écrite par M ; il y a aussi de la finesse dans la réalisation, comme cette ellipse où après avoir vu James partir dans sa chambre avec Eve, on voit sur l'image suivante un feu d'artifice... A la fin, on entend Javier Bardem dire "Toutes ces cascades, toutes ces bagarres, c'est exténuant !". Pour les personnages oui, pour les acteurs certainement, mais pas pour les spectateurs, tant Sam Mendes a su imposer un rythme palpitant qui ménage en même temps des pauses qui permettent de donner de l'épaisseur aux situations et aux personnages. Vraiment, c'était une excellente idée de confier ce 23° épisode à un grand réalisateur, comme cela a été fait pour Batman avec Chris Nolan ; incontestablement, ce "Skyfall" est un des meilleurs James Bond, si ce n'est même le meilleur.

 

Cluny

Par Cluny - Publié dans : critiques de novembre 2012 - Communauté : Cinéma
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Jeudi 25 octobre 2012 4 25 /10 /Oct /2012 21:46
Film français de Philippe Béziat

Interprètes : Natalie Dessay (Violetta), Jean-François Sivadier (le metteur en scène), Louis Langrée (direction musicale)

Durée :
1 h 52

Traviata.JPG

Note :
  7/10 

En deux mots :
Documentaire sur le processus de création qui sait aussi rendre grâce à la musique de Verdi. 

Le réalisateur :
Phlippe Béziat a collaboré sur la mise en scènes d'opéras : Carmen de Alfredo Arias en 1997, Adonis de Christian Rist en 1998, Récits Aztèques de la conquête  de Paula Mesuret en 1999. Il a aussi réalisé de nombreux documentaires sur la création musicale, dont un portrait pour la télévision de Marc Minkowski répétant La Belle Hélène. Il a réalisé un film-opéra, "Pelleas et Melissande, Le Chant des aveugles", en 2008.


Le sujet : Au printemps 2011, Jean-François Sivadier monte La Traviata pour le Festival d'Aix-en-Provence, sous la direction de Louis Langrée qui dirige le London Symphony Orchestra. Pendant deux mois, ils répètent au Théâtre de l'Archevêché avec Natalie Dessay qui interprète Violetta.


La critique : Dans une vie antérieure, j'avais réalisé un film de 15 minutes sur la découverte de la Traviata par des élèves de CM. Pour préparer ce travail, nous avions regardé avec eux le film de Zeffirelli, entendu au conservatoire une cantatrice en chanter les airs principaux, réfléchi sur la modernité de l'histoire et écrit un scénario qui parlait de ce qu'évoquait pour eux aujourd'hui l'idée du sacrifice. C'est donc en terrain connu que je me suis aventuré en allant voir ce documentaire de Philippe Béziat sur la préparation de la représentation de l'opéra de Verdi au festival d'Aix-en-Provence. Même si le film aborde tous les aspects de ce travail de mise en place, de la confection des costumes et des décors jusqu'aux répétitions de l'orchestre et des choeurs en passant par le travail à la table ou les cours de prononciation italienne donnés aux chanteurs, c'est surtout le travail entre le metteur en scène Jean-François Sivadier et sa Violetta, Natalie Dessay, que l'on suit au long de ces presque deux heures.

 

Metteur en scène de théâtre et d'opéra, Jean-François Sivadier a une idée très précise de ce personnage ; il trouve que la puissance de la musique de Verdi raconte suffisamment clairement toutes les grandes émotions, et que le travail de mise en scène doit plutôt mettre en valeur la fragilité et l'humanité de Violetta. Mais même s'il sait assez précisément ce qu'il veut, il a l'intelligence de s'appuyer sur les propositions de ses chanteurs - j'allais écrire acteurs -, et particulièrement sur celles de Natalie Dessay qui se montre prête à donner de sa personne, ce qui nous vaut quelques éclats de rire, notamment quand Sivadier explique "Ce n'est pas facile non plus de dire : Je suis une mouette" et qu'elle réplique du tac-au-tac "Je suis une morue", ou encore quand il parle de la nécessaire dimension de plaisir sexuel à propos de la façon de dire "Gioire", et qu'elle lui répond dans une mimique "Enfin, sauf pour la fille, parce qu'avec toute cette technique..."

 

Si lors des premières scènes de répétition on commence à s'interroger sur le fait de savoir si le film pourra tenir la durée, très vite cette inquiétude est levée, tant les échanges entre Sivadier et Natalie Dessay deviennent concrets, et que surtout, même avec juste un piano, en costume de ville et sans décor, la force de la musique de Verdi et l'expressivité du jeu de Violetta suffisent à faire (re)naître l'émotion, une émotion encore plus brute et plus viscérale que celle de la représentation elle-même, la caméra présente sur le plateau n'ayant pas à subir les contraintes de la captation et saisissant ainsi en gros plan le moindre détail du jeu des acteurs. Les répétitions sont montrées dans l'ordre de l'opéra, et un peu comme dans " César doit mourir", elles permettent un filage de l'oeuvre en visitant les airs principaux (Libiamo, E strano, Sempre Libera, Dite alla giovine, Noi siamo zingarelle...)

 

D'abord très classique (des plans fixes qui posent le cadre, un gros plan d'un lustre, la scène, les échafaudages, un établi dans l'atelier, les marques au sol dans la salle de confection des décors), la réalisation de Philippe Béziat s'émancipe progressivement, introduisant un décalage entre l'image et le son, musique ou indication scénique, introduisant quelques images presque subliminales de la représentation au milieu de celles des répétitions, isolant Natalie Dessay en pleine concentration dans le silence. Le choix de ne filmer quasiment que les répétitions et de ne faire que suggérer ce que sera le produit fini est courageux, et au final, payant. Car si même les chanteurs économisent leurs voix dans les répétitions et que manque parfois l'orchestre pour faire l'accord, la sincérité de l'engagement de chacun et la beauté de l'oeuvre sont présentes de bout en bout à l'écran, et il faut pour s'en convaincre de voir combien résonnent encore dans nos têtes les airs de cette Traviata longtemps après la fin du film.

 

Cluny

 

Par Cluny - Publié dans : critiques de novembre 2012 - Communauté : Cinéma
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Lundi 22 octobre 2012 1 22 /10 /Oct /2012 08:09
Film français de Michael Haneke

Interprètes : Jean-Louis Trintignant (Georges), Emmanuelle Riva (Anne), Isabelle Huppert (Eva)

Durée :
2 h 07

Amour.jpg 

Note :
  5/10 

En deux mots :
Haneke et Trintignant mettent leur immense talent au service d'un oeuvre douloureuse à regarder. 

Le réalisateur :
Né en 1942 à Munich d'une actrice catholique et d'un metteur en scène protestant, Michael Haneke a étudié la philosophie à Vienne. Il monte de nombreuses pièces au théâtre, et réalise des téléfilms. En 1989, il tourne son premier film de cinéma, "Le Septième Continent", premier d'une trilogie sur la glaciation émotionnelle qui comprend aussi "Benny's Video" (1992) et "71 Fragments d'une chronologie du Hasard" (1994). Présenté à Cannes en 1997, "Funny Games" choque une partie du public, et en enthousiasme une autre partie.
Michael Haneke tourne ensuite "Code Inconnu" en 2001, puis "La Pianiste" qui obtient le Grand Prix du Jury à Cannes en 2002, "Le Temps des loups" en 2003, "Caché" en 2005 et "Funny Games US" (2008), duplicata américain de son film de 1997. Il obtient coup sur coup deux Palmes d'or avec "Le Ruban blanc" (2009) et "Amour" (2012).


Le sujet : Georges et Anne, deux octogénaires, vivent ensemble dans un grand appartement. Le lendemain du concert d'un pianiste ancien élève d'Anne, celle-ci est victime d'une petite attaque cérébrale. Quand elle revient de l'hôpital, à la suite de l'opération, Anne est paralysée d'un côté. Georges réorganise sa vie pour prendre en charge Anne, malgré les réticences de sa fille Eva qui vit à Londres.


La critique : Dans la scène-clef du film où sa fille lui reproche de la tenir à l'écart de la lente décrépitude de sa mère, Georges lui assène, après avoir décrit combien ce processus était triste et humiliant : "Rien de tout ceci ne doit être montré". Lucidité tardive ou perversion suprême de Michael Haneke ? C'est bien toute la problématique de ce film : malgré son titre, malgré cet amour de Georges pour Anne qui devrait transcender la trivialité de ce douloureux quotidien, la réalité du spectateur est de devoir subir 127 minutes du traitement austère et méticuleux de la fin de vie d'une vieille femme, et là, rien ne lui est épargné : la pose de la couche, la maltraitance d'une infirmière (russe, pourquoi ?), les hurlements de douleur, la bouillie donnée à la cuillère, la douche... Plusieurs spectateurs, pourtant motivés puisque venus pour une avant-première, ont quitté la salle et je peux les comprendre.

 

Quand Trintignant a reçu le scénario, il a répondu à Haneke : "Je suis content de l’avoir lu parce que ça, c’est un film que je n’irai pas voir". C'est un peu ce que je m'étais dit en voyant le synopsis du film à Cannes, et puis, c'est quand même Haneke, je ne vais quand même pas rater une Palme d'or, ce serait une première depuis "L'Eternité et un jour"... Incontestablement, Haneke reste un très grand réalisateur, et il le montre dans de nombreuses scènes : la plan fixe, large, de la salle de concert, sans le contre champ de la scène, où rapidement on repère Jean-Louis Trintignant et Emmanuelle Riva et où on ne voit qu'eux, évidents après une si longue absence ; le moment de grâce où Anne, gamine, essaie son fauteuil électrique et fonce sur Georges ; le plan séquence où Trintignant raconte comme si c'était hier la maltraitance qu'il a subie dans une colo 70 ans avant.

 

Au delà de l'insistance à montrer la déchéance physique et mentale d'Anne, le film pêche aussi par la dimension caricaturale des personnages secondaires : l'infirmière maltraitante, et surtout la fille, jouée par Isabelle Huppert, qui semble plaquée sur l'histoire principale qui est ce huis-clos entre Georges et Anne. Le jeu très particulier d'Emmanuelle Riva déroute un peu, mais participe de l'ambiguïté de la relation de ce très vieux couple : sa façon abrupte d'énoncer ses vérités ne la rend pas forcément sympathique, mais on comprend aussi que des codes perceptibles uniquement par eux deux se sont mis en place depuis des décennies. Trintignant est immense dans ce personnage toujours à l'écran, assumant la dimension physique du rôle de sa démarche claudicante, signifiant tant de choses d'un seul regard, et débitant des horreurs acceptables du seul fait de son timbre si particulier.


Il n'en reste pas moins que voir "Amour" est une expérience pénible, que c'est visiblement intentionnel, et de ce point de vue je partage l'avis de Jean-Philippe Tessé dans les Cahiers du Cinéma quand il dit qu'"Amour" est un "Funny Games" qui ne dit pas son nom, notamment par le jeu d'alternance entre de la tension et du soulagement, entre de l'insoutenable qu'il étire et des respirations qu'il concède. Une grande Palme d'or récompense souvent un grand festival ; après les ratés de "Cosmopolis", de "Sur la Route" et d'"Holy Motors", après la déception de "Reality", Grand Prix, et celle d'"Amour, non, décidément, Cannes 2012 ne restera pas comme un grand cru.


Cluny


Par Cluny - Publié dans : critiques d'octobre 2012 - Communauté : Cinéma
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Dimanche 21 octobre 2012 7 21 /10 /Oct /2012 08:14

Film italien de Paolo et Vittorio Taviani

Interprètes :
Cosimo Riga (Cassius), Salvatore Striano (Brutus), Giovanni Arcuri (César) 


Cesar.jpg

 

Durée : 1 h 16

Note :
  6/10

En deux mots
: Les frères Taviani filment Shakespeare en prison, mettant en scène les acteurs ; mais qu'en est-il des hommes derrière les acteurs ?


Les réalisateurs :
Nés en 1929 et 1931 en Toscane, Paolo et Vittorio Taviani suivent des courts d'ar
ts à l'université de Pise et s'orientent vers le cinéma après avoir vu "Païsa" de Roberto Rossellini. Aux côtés de Valentino Orsini, ils montent des spectacles engagés et réalisent des documentaires sur l'Italie du sud, avant de tourner leur premier long métrage en 1961, "Un Homme à brûler". Le premier film qu'ils réalisent sans Orsini est "Les Subversifs" en 1967. En 1977, ils emportent la Plame d'Or avec "Padre Padrone". Suivent "La Nuit de San Lorenzo" (1982), "Kaos" (1984), "Good Morning Babilonia"(1987), "Le Mas des alouettes" (2007).

Le sujet : Dans la prison de Rebibbia, des détenus jouent "Jules César" de Shakespeare. On les voit six mois avant, au moment du lancement du projet et du casting, puis des répétitions qui occupent toute la prison comme décor.

La critique : Dans mon cycle des jeunes réalisateurs, après Manoel De Oliveira et William Friedkin, au tour des frères Taviani dont je ne savais même pas qu'ils étaient encore en activité. Il faut dire que je garde un souvenir ému de ma vision de "Padre padrone" en 1977 dans un cinéma de Rome, non sous-titré bien sûr, sachant que la plupart des dialogues étaient dans un dialecte sarde... De dialecte, il en est encore question dans "César doit mourir", puisque les prisonniers qui jouent ce "Jules César" de Shakespeare ont adapté les dialogues dans leur propre dialecte : napolitain, calabrais, sicilien. Les frères Taviani avaient découvert cette expérience de théâtre carcéral dans la banlieue de Rome, en voyant les détenus réciter certains chants de "L'Enfer" de Dante. Les deux réalisateurs leur ont alors proposé ainsi qu'à leur metteur en scène de monter Shakespeare.

 

Le film commence par des images en couleurs de la représentation, même si le découpage et les angles de prise de vue laissent à penser qu'il s'agit d'un mélange de scènes tournées lors des répétitions, voire spécialement rejouées pour le film, et de captation du spectacle. On assiste donc à une représentation théâtrale, juste un peu étonnés des biscoteaux et des tatouages des Romains, avec standing ovation à la fin et explosion de joie des acteurs. Puis le cadre s'élargit, et on voit des gardiens en uniforme de l'administration pénitentiaire monter sur scène et canaliser la sortie des acteurs redevenus détenus, jusqu'à la répétition de la scène frontale de la rentrée de chacun d'entre eux dans sa cellule.

 

Un panneau nous annonce "Six mois plus tôt", et on passe au noir et blanc, un noir et blanc très contrasté avec des trappes de lumière qui sculptent les visages. Lors du casting, il est demandé aux candidats de se présenter de deux façons, une fois en vivant la douleur de la séparation, l'autre fois sous le coup de la colère. Leur présentation est suivie d'un trombinoscope où apparaît la durée et le motif de leurs condamnations : homicide, trafic de stupéfiants, association maffieuse, certains ont pris perpète. Là encore le casting est très découpé, et ça sent la reconstitution après-coup, puisque sont mis en valeur ceux qui seront finalement retenus pour les rôles principaux.

 

Au travers des répétitions, la pièce nous est finalement montrée dans l'ordre, avec un affranchissement progressif de la dimension documentaire. Si on début, on voit le cadre de la répétition (définition de l'espace, indications scéniques du metteur en scène, répétition d'un dialogue entre Cassius et Brutus de cellule à cellule, une des plus belles scènes du film), au fur et à mesure cet environnement réaliste disparaît pour laisser la place à une appropriation du décor de la prison comme espace de l'action : un couloir devient la Curia Pompeia, la cour de promenade se transforme en Champ de Mars, et quand Antoine s'adresse au Peuple de Rome, celui-ci lui répond à travers les barreaux des cellules, tout cela filmé avec cette rigueur un peu hiératique dont parlait Gérard Legrand à propos de "La Nuit de San Lorenzo".


Si cette intégration de l'histoire dans l'espace prend tout son sens au regard des thèmes traités par la pièce (la violence, la culpabilité, l'aspiration à la liberté), beaucoup plus discutable est la fictionnalisation qui entoure cette démarche : on voit un détenu qui croise les acteurs et qui maugrée : "Ce n'est plus un détenu digne, c'est un bouffon", ou l'antagonisme de Gianni qui joue César et de Juan qui joue Decius, mis en scène de façon théâtrale, et disons-le, franchement ridicule. Et c'est là que s'insinue une petite question : les frangins ne seraient-ils pas venus de l'extérieur pour mettre en scène une de leurs thématiques préférées, à savoir la rédemption par la culture, déjà illustrée par l'accès au langage de Gavino dans "Padre padrone" ou par la reconnaissance de la qualification des maçons dans "Good morning Babilonia" ?

 

Cette théâtralisation de tout le processus de création ne se fait-elle pas au détriment de ce qui est le plus intéressant dans cette expérience, c'est-à-dire ce que cela apporte aux détenus ? La parole des prisonniers se limite à la déclaration de l'un d'entre eux dans le dernier plan : "Depuis que j'ai rencontré l'art, cette cellule est devenue une prison." Le paradoxe de cette phrase méritait à elle seule un film, et ce n'est pas celui qui nous est présenté.

 

Cluny


Par Cluny - Publié dans : critiques d'octobre 2012 - Communauté : Cinéma
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Samedi 20 octobre 2012 6 20 /10 /Oct /2012 14:00

Film américain de Lee Daniels

Interprètes : Zac Efron (Jack), Matthew McConaughey (Ward), Nicole Kidman (Charlotte Bless), John Cusak (Hillary Van Wetter)

Paperboy.jpg

Durée : 1 h 48

Note : 4/10

En deux mots : Lee Daniels a plaqué sa propre vision sur le livre de Pete Dexter, en lui ôtant ainsi toute sa subtilité.


Le réalisateur :
Né en 1959 à Philadelphie dans une famille afro-américaine, Lee Daniels a commencé sa carrière comme directeur de casting. Il est ensuite devenu producteur, produisant notamment "A l'ombre de la haine" en 2000. Il passe à la réalisation en 2005 avec "Shadowboxer", puis en 2009 avec "Precious" qui obtient deux Oscars, dont celui du meilleur scénario adapté.

 
Le sujet : En 1969, Hillary Van Wetter attend dans le couloir de la mort d'une prison de Floride, condamné pour le meurtre du shériff Call, connu pour avoir massacré quelques noirs de sa juridiction. Jack Jansen, renvoyé de son université, est engagé comme chauffeur par son frère Ward qui vient mener une enquête avec Yardley Acheman sur le procès bâclé qui a condamné Van Wetter. Ils sont bientôt rejoints par Charlotte Bless, une pétulante quadragénaire qui entretient une correspondance avec de nombreux meurtriers en prison, dont Hillary Van Wetter.

La critique : J'ai découvert assez récemment Pete Dexter, et j'ai tout de suite beaucoup aimé. Dans Cotton Point, Spooner ou Paperboy, j'apprécie sa façon de raconter des histoires en laissant toujours des zones d'ombre, en adoptant un point de vue teinté d'ironie laconique sur l'absurdité d'une situation. Pour le plaisir et pour en donner une idée, je peux citer sa façon de présenter le shériff Call
dans Paperboy :"En août 1965, un certain Thurmond Call qui, même selon les critères du comté de Moat, avait tué un nombre inhabituel de nègres pendant son service, fut lui-même assassiné dans le nord de la Floride, entre les villes de Lately et de Thorn", ou encore ce passage de la description du mariage du père  : "Un homme de l'âge de mon père accorda Ellen Guthrie à World War. Quelque chose dans son expression révélait qu'il faisait contre mauvaise fortune bon coeur. Tous les invités du mariage étaient trempés, sauf Ellen Guthrie qui avait réussi à traverser l'ouragan Sylvia pour se présenter sans une goutte de pluie devant l'autel. C'était, bien sûr, une femme de caractère".

 

Paperboy, le roman, présente deux qualités qui s'équilibrent : une histoire terrible, faite de désirs, de frustration, de violence et de déchirement, et une distanciation due au procédé narratif (témoignage de Jack des années après) et surtout l'ambiguïté qu'elle laisse sur de nombreux aspects du récit et qui place le lecteur face à ses propres doutes. Malheureusement, Lee Daniels n'a retenu que le premier aspect du roman, et il a évacué toute la pulpe du livre, réduisant l'intrigue à une suite de scènes trash dont il gommé toutes les équivoques. Ainsi, l'homosexualité de Ward n'est que suggérée dans le livre, et le fait que lui-même la nie et la refoule est un des éléments qui inscrit l'histoire dans son époque. Dans le film, non seulement c'est montré, mais ça devient même un élément d'explication de la relation entre Ward et Yardley, ce qui est un contresens complet par rapport au propos de Dexter.

 

De même, le choix portant sur les personnages de Yardley Acheman et d'Anita Chester. Lee Daniels est noir, ça arrive même au Président dans les Etats-Unis d'aujourd'hui. Mais dans le Sud des Etats-Unis de la fin des années soixante, la couleur et la place des personnages a un sens bien précis. Dans le roman, même si sa couleur de peau n'est jamais précisée, Yardley Acheman est certainement blanc, comme le prouve son attitude aristocratique et sa fiancée mannequin. Dans le film, il est noir (joué par David Oyelovo), et de nombreuses scènes se transforment de ce simple fait : le dîner chez le père de Jack et de Ward, l'altercation entre Jack et Yardley, l'hostilité d'Hillary, tout se résume à une question de racisme.

 

Pourtant, la dimension raciale est présente dans le livre, à travers le personnage d'Anita, décrite ainsi par Pete Dexter : "Elle cuisinait, faisait le ménage et s'occupait de la maison, nous adressant rarement la parole sinon pour répondre à nos questions. En cela, elle ne ressemblait pas aux autres employés de maison de cette époque - prêtes à tout pour se faire bien voir de leur patron, - mais c'était une jeune femme intelligente et la situation était sans ambiguïté. Elle s'appelait Anita Chester et il me semblait qu'il aurait mieux valu qu'elle échangeât son boulot avec la rédactrice en chef du journal de mon père". Cette discrétion et la nature exacte de sa relation aux membres de la famille de Jack expliquent la scène du mariage dans le livre ; las, dans le film, Lee Daniels la transforme en une soeur jumelle de Minny Jackson, la grande gueule de "La Couleur des sentiments" ; mieux, ou pire, il en fait même la narratrice.

 

Vidé de sa substance, transformé en un manifeste rétroactif pour les droits civiques, le "Paperboy" de Lee Daniels ne se rattrape pas dans la forme, faute d'un choix clair : il mélange la tentation de donner une couleur d'époque (grain très 16 mm, split screen) et une caméra parkinsonienne très actuelle. Dans une distribution haut de gamme, le jeune Zac Efron, transfuge des teens movies, s'en sort plutôt bien, ainsi que John Cusak dans le rôle de l'innocent qu'on n'a pas envie de voir sortir de prison. Matthew McConaughey est bien moins bon que dans " Magic Mike" et " Killer Joe", beaucoup trop caricatural. Mais le casting est dominé par Nicole Kidman, qui incarne parfaitement le mélange de générosité, de folie et de peur de vieillir de Charlotte Bess, et qui, elle est parfaitement fidèle à son modèle de papier. Vous l'aurez compris, mon conseil est clair : si vous avez quelques sous à dépenser, investissez-les dans l'achat du bouquin, et attendez un ou deux ans pour admirer la composition de Nicole Kidman sur Canal +.

 

Cluny


Par Cluny - Publié dans : critiques d'octobre 2012 - Communauté : Cinéma
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